BIBLIOGEEKS : un défi littéraire et numérique publié le 04/06/2020
En préambule
Professeur documentaliste en poste au collège Georges Texier depuis la rentrée 2017, j’ai expérimenté depuis mes débuts dans la profession des projets autour de la lecture sous diverses formes. Je suis convaincue que la pratique de la lecture chez nos élèves doit passer par des projets massifs (qui impliquent des classes entières), obligatoires, ludiques et interactifs.
C’est aussi, selon moi, le meilleur moyen de promouvoir la littérature jeunesse qui n’entre pas toujours dans le cadre institutionnalisé des programmes scolaires.
Le cadre
J’ai adhéré un temps à l’idée de ne pas évaluer les élèves dans le cadre de ces projets pour ne pas gâcher le "plaisir de lire". Mais le problème se posait alors de l’implication de tous dans les lectures proposées et bien souvent, ce sont les élèves déjà conquis par la pratique de la lecture, qui étaient le plus impliqués. Je me suis ensuite posée la question suivante : si l’évaluation nuit au plaisir de lire, ne nuit-elle pas aussi au plaisir d’apprendre ? Le meilleur moyen d’obtenir une réponse à ma question était de tester une "formule évaluante" d’un projet lecture.
L’opportunité est venue de ma collègue de lettres, Julie Grégoire, avec qui je collaborai déjà sur plusieurs actions pédagogiques. Elle me proposait de consacrer 1h quinzaine avec ses classes de 5ème à un projet autour de la lecture au CDI.
Nous avions déjà testé des dispositifs "clés en main" type Défi-Babélio ou les Incorruptibles.
Si nous saluions la qualité de ces dispositifs, nous avions éprouvé des difficultés à nous approprier les sélections et à nous adapter à leur calendrier. Nous voulions créer un projet 100% adapté aux besoins de nos élèves, aux limites de nos compétences professionnelles et aux équipements disponibles dans notre environnement numérique.
La chronologie du projet
Après avoir trouvé un nom à notre projet (Bibliogeeks), pour les vacances d’été nous nous sommes répartis des lectures pour créer deux sélections proportionnées, nous avons rédigé des fiches méthodes pour chacun des outils :
...et nous avons créé un carnet de lecteur :
BIBLIOGEEKS : un défi littéraire et numérique - Académie de Poitiers.
A la rentrée, il a fallu imprimer et relier les carnets de lecteur et publier les sélections sur E-Sidoc.
Nous avons également défini les compétences (info-documentaires, français et transversales) à évaluer :
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Évidemment, nous avions l’accord de notre administration : les créneaux Bibliogeeks ont été saisis sur Pronote, ce qui nous permettait de faire l’appel à partir de nos deux sessions, de saisir et d’évaluer des compétences, de compléter une ligne sur le bulletin semestriel :
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Puis le projet s’est lancé rapidement (2ème semaine après la rentrée) : les premières séances ont été consacrées à la présentation du défi, au choix des premières lectures, à la création des comptes en ligne et à la rédaction de la charte :
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Ensuite, au CDI, les élèves ont été "lancés" en autonomie sur la réalisation de leur premier défi à l’aide des fiches méthodes. Évidemment, ces premières séances ont été bruyantes et plutôt chaotiques. Nous étions sans cesse sollicitées, beaucoup d’élèves restaient passifs jusqu’à ce que nous venions les voir, certains se retrouvaient en difficulté sur la prise en main des outils numériques, et tous étaient déstabilisés par l’autonomie dont nous leur demandions de faire preuve. Mais rapidement des mécanismes se sont mis en place :
- Remplir en priorité son carnet de lecteur après avoir fini la lecture d’un livre
- Utiliser la fiche méthode pour réaliser un défi et ne solliciter l’enseignante que si on est réellement coincé
- Toujours soumettre à la relecture de l’enseignante avant de publier
- Chercher un nouveau livre disponible sur E-Sidoc lorsqu’on a terminé une lecture
Les séances ont été de plus en plus efficaces et sereines.
Le bilan
Il y a eu des ratés très instructifs : peu après la rentrée, des élèves ont utilisé le compte Babelio de la classe à mauvais escient. Des mesures ont été prises, des discussions ont été amorcées et il y a eu une vraie prise de conscience : celle de ne pas respecter la charte et de mettre tout le projet classe en péril. De plus, l’incident nous fournissait un parfait exemple des limites à la liberté d’expression.
Quelques élèves n’ont pas joué le jeu : 2 ou 3 par classes. Ils venaient sans leur matériel, n’avançaient pas dans leur lecture, procrastinaient pendant les séances. C’est là que l’évaluation a joué son rôle : en fin de semestre, il fallait avoir lu au moins deux livres et relevé deux défis. Les élèves n’ont pas eu le choix, ce qui a bien souvent eu l’effet du "pied à l’étrier".
Ce qui est vraiment positif c’est la différenciation : en février certains élèves avaient déjà lu 15 livres et relevé autant de défis. Pour d’autres, l’accompagnement devait être plus prégnant et l’accent devait être mis sur la confiance en soi : "je suis capable de lire un roman en entier", "je suis capable de réaliser une production numérique".
La bonne marche du projet nous a permis d’inclure les élèves d’ULIS au deuxième semestre, alors qu’ils ne participent habituellement pas au cours de français. A la rentrée prochaine, nous les inclurons dès le premier semestre.
La compétition interclasse a aussi été un vrai moteur : il a toutefois fallu tempérer pour que celle-ci reste bon enfant.
La crise du Covid et le confinement ne nous ont pas permis d’aller au bout de ce projet pour cette année scolaire. Mais nous le renouvellerons sans hésitation l’année prochaine.
La valorisation des travaux d’élèves
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