Des adolescents, des médias sociaux, des enseignants publié le 23/06/2014  - mis à jour le 04/09/2023

fonctionnalité "identifier"
Facebook

Les adolescents fréquentent, parfois assidûment, les réseaux sociaux1 tels que Snapchat, Instagram et Facebook, et les communautés de partage de contenus telles que Youtube.
L’Éducation Nationale, après s’être focalisée sur les risques encourus, tâche maintenant de s’intéresser à ces pratiques et de les accompagner.

Que font les adolescents sur les réseaux sociaux ?

Un sondage mené entre décembre 2020 et janvier 2021 auprès de 4682 jeunes âgés de 16 à 25 ans par Diploméo (site d’orientation) montre qu’ils y trouvent majoritairement des émotions positives.

Un réseau social offre à minima des fonctionnalités qui permettent de :

Rencontres par centre d'intérêt

Facebook
suggestion de groupe

  • se définir au sein d’un système un profil public ou semi-public, dans lequel on fournit plus ou moins d’informations sur soi-même.
  • gérer une liste de contacts avec lesquels on partage un lien (les "amis" sur Facebook, "followings"2 et "followers"3 sur Twitter), et communiquer avec ces personnes...
  • naviguer sur la liste de liens de ces contacts, voir les documents et commentaires qu’ils partagent, ainsi que les relations qu’ils entretiennent entre eux et avec d’autres abonnés du système.

Les adolescents s’en servent pour se créer des relations (par exemple avec des personnes ayant des centres d’intérêts ou des problèmes communs), mais surtout pour étendre les relations avec ceux qu’ils fréquentent déjà dans les différents cercles auxquels ils participent (école, sports, etc.).

Ils transmettent des images drôles et des informations, discutent par messagerie instantanée, expriment des humeurs, des coups de cœur (musicaux notamment), des opinions. Facebook leur fournit aussi des jeux en ligne.

Les réseaux sociaux aident les plus dynamiques d’entre eux à organiser des évènements et des projets.

Ce qu’on exprime et partage sur un réseau social est valorisé par les réactions des autres. Il est fréquent de voir des demandes de commentaires entre des jeunes avec les phrases du type : « un com donné, 5 com rendus ».

Les adolescents n’apprécient pas que les adultes les "surveillent" sur ces espaces où ils "traînent" entre pairs.

Comme le reste de la société ils ont gagné en maturité s’agissant de leur vie numérique, au fur et à mesure que l’usage de ces outils s’est répandu. Beaucoup sont conscients de la nécessité de garder le contrôle de leur vie sociale, explique l’enseignante chercheuse Danah Boyd4. Certains éducateurs et enseignants tentent de les y aider.


Que leur apportent ces pratiques ?

Quelques fonctionnalités d'un réseau social

Capture d’écran Facebook

 Une vie sociale : des études5 montrent que les échanges à distance complètent les autres interactions sociales. L’internet ne permet pas d’enrayer une certaine "culture de la chambre" potentiellement désocialisante chez les adolescents, mais contribue à remédier à un certain isolement et procure le sentiment d’appartenance communautaire.

 Des miroirs : les réseaux contribuent à la construction identitaire au cours d’une période où le « je » existe essentiellement par le regard des autres6.

 Du bien-être. L’humour et l’ambiance chaleureuse font partie des traditions de ces espaces d’échange. Les "j’aime" (like) et les commentaires positifs sont bons pour le moral.

 De l’autonomie : l’IFE7 a constaté que ces expériences stimulent l’auto-apprentissage et gomment les traditionnelles barrières liées au statut et à l’autorité ; elles favorisent une démarche exploratoire autonome.

 Des compétences relationnelles. Écrire publiquement des « billets » sur les blogs ou sur les murs de Facebook, savoir qui ajouter, qui refuser, comment agrandir son groupe d’amis (son capital social) exige un savoir-faire et un savoir-être, utiles pour évoluer dans une société où se développent le co-voiturage, la co-location, le wwoofing, le réseautage professionnel...

Ce sont donc des lieux potentiels d’apprentissages utiles, mais ce qu’on y apprend a peu de rapport avec ce que l’école enseigne8.

Que craignent les adultes ?

Parents, enseignants et éducateurs voudraient éviter que les jeunes :

Video harcèlement

les rumeurs, vignette
"agir contre le harcèlement
à l’école"

  • se fassent des illusions sur les personnes rencontrées via les réseaux sociaux,
  • y dévoilent trop leur intimité au risque de se faire humilier, harceler ou racketter,
  • compromettent leur avenir,
  • soient influencés par les publicités ciblées et les messages de propagande,
  • passent sur internet plus de temps que de raison, un temps "inutile"...

Des ressources (vidéos, concours...) ont été créées pour aider les adolescents à réaliser la violence que peuvent représenter le harcèlement, les rumeurs et insultes : l’empathie fait partie de l’apprentissage de la citoyenneté.

Les pouvoirs publics bataillent pour leur préserver un « droit à l’oubli numérique » : Google a par exemple mis à disposition un formulaire de demande de retrait de contenu, à la demande de l’Union Européenne.
Le monde de l’éducation tente pour sa part d’aider les jeunes à se construire une identité numérique positive et de prendre conscience des enjeux liés à des pratiques imprudentes.


Faut-il utiliser les médias sociaux grand public à l’école ?

Il est tentant d’utiliser des services attractifs pour permettre une implication forte des élèves dans les activités scolaires

Un guide de l’usage des réseaux sociaux en classe est fourni depuis 2018 par le Clemi et l’académie de Paris.

Le cadre de confiance souhaité par le ministère vise à éviter un usage des données à caractère personnel notamment pour influencer le jeune par ciblage comportemental.
Utiliser des outils dont le modèle économique repose sur la vente de données impose de savoir interpréter et prendre en compte les conditions générales d’utilisation de l’outil choisi, et de rester vigilant sur l’évolution du produit. Voir un exemple de recours en justice à suivre.

Les publicités peuvent faire l’objet de pratiques de repérage, qui éclaireront les élèves de manière efficace. On peut aussi utiliser des courtes vidéos telles que celle de Lumni : Données personnelles : quand le numérique nous transforme en produit.

Utiliser les réseaux sociaux en classe suppose une vraie réflexion sur la création des comptes (personnels ? de groupe ? publics ? privés ?), sur leur suppression, sur le traitement des données personnelles. Voir un exemple de dossier pour l’usage de Twitter.

Cela suppose aussi d’adopter une attitude exemplaire : par exemple appliquer les 10 conseils clés de la CNIL pour rester "net sur le web".

Un enseignant peut aussi former à la collaboration en ligne et à la publication avec des outils alternatifs, hébergés par des associations à but non lucratif et à vocation éducative (tels que Framasoft), et par l’institution.
Dans notre académie par exemple on pourra utiliser pour les activités visant l’expression ou le partage d’informations la plateforme académique de blogs pédagogiques Wordpress, qui est exempte de publicité, hébergée au rectorat, et optimisée pour l’usage scolaire. Elle offre notamment la possibilité d’ouvrir et de gérer les commentaires, ou de restreindre l’accès au blog à un groupe (voir un exemple de scénario pédagogique).

blog pédagogique technologie
collège Joachim du Bellay
Loudun.

Les sites établissement offrent des espaces d’échanges réservés aux inscrits, et la possibilité de rendre publiques certaines de ces informations. La plateforme académique de sites sous SPIP respecte une stricte déontologie “école républicaine” (la charte signée par le recteur et le chef d’établissement stipule que ces services "respectent la neutralité politique, commerciale et religieuse).

Des plateformes collaboratives telles que Moodle9 peuvent être utilisées par ceux qui souhaitent des outils de collaboration plus élaborés .

Pour le partenariat scolaire européen eTwinning offre une solution institutionnelle. Les outils fournis (blog, page web, webmail, agenda, wiki, forum, chat, dépôt de documents…) permettent une vraie collaboration à distance.
Les projets qui engagent vraiment les élèves dans une démarche collaborative finissent en fait souvent par sortir du cadre fourni par l’institution : les élèves s’échangent leurs comptes Instagram, et poursuivent sur leurs réseaux privés une communication démarrée dans le projet scolaire.


Comment éduquer à un usage raisonnable des médias sociaux ?

Si c'est gratuit vous êtes le produit

extrait vidéo
Adesias.fr

L’utilisation d’un espace numérique de collaboration, même institutionnel, participe à cette éducation

Le respect mutuel et le respect des règles de sécurité dans l’usage de cet espace se formalisent dans une charte. Ce document contractuel, à élaborer collectivement et progressivement, ne visera pas à anticiper tous les incidents possibles, mais fixera les grands principes liés à la loi informatique et libertés et à la netiquette.

La mise en place d’un espace de publication participe aussi à cette éducation

On réfléchira avec les élèves aux précautions à prendre pour que les lecteurs du site y trouvent des informations fiables, datées. Pour un blog, il est souhaitable de mentionner qui met ce blog à disposition ("la classe de 3e A du collège de XXX"), quel est son but ("journal de bord du voyage scolaire à Séville en mai 2013"), qui écrit (surtout quand ce sont des élèves), quel est son fonctionnement (décide-t-on d’autoriser les commentaires ? seront-ils modérés ? par qui et selon quels critères ? les fautes d’orthographe sont-elles tolérées ? etc.).
L’usage de cet espace par l’enseignant doit tracer la voie : les photos d’élèves y seront diffusées seulement après avoir recueilli l’accord du jeune et de ses parents.
 Voir un exemple de rubrique "à propos" dans un blog pédagogique.

L’organisation d’activités abordant les questions éthiques, de responsabilités et de respect mutuel

Des exemples :

 Apprendre à argumenter, à citer ses sources : voir un exemple de scénario pédagogique autour d’un débat.

 Apprendre le droit d’auteur et les diffusions autorisées. Exemple de scénario pédagogique pour y sensibiliser les élèves : une "copy party" .

 Développer l’esprit critique, la compréhension des phénomènes de désinformation, rumeurs, buzz, leader d’opinion, etc. en s’appuyant sur des vidéos ou jeux sérieux.

 Partager et commenter des résultats de veille ou de collecte d’information (outils de "social bookmarking" utilisés lors de travaux personnels ou de groupes : Tumblr, Scoop It, Diigo, Pearltrees, NetVibes, Pinterest, outils fourni par l’ENT des collèges) : voir des exemples de démarches pédagogiques.

 Travailler de manière collaborative, en se corrigeant et s’enrichissant mutuellement. Exemple de séance d’écriture collective.

 Développer l’empathie, par un travail sur les commentaires.

 Présenter et utiliser des outils alternatifs, en justifiant ces choix.

 Organiser des réflexions sur la vie privée, l’empreinte numérique, l’identité (l’avatar, le pseudo, les différentes expressions de soi).

Ces activités peuvent être notamment mises en œuvre en s’appuyant sur le Cadre de Référence des Compétences Numériques et sur Pix.

Accompagner les élèves dans la progressive maîtrise des réseaux socio-numériques est d’abord une posture : faire confiance, reconnaître la légitime curiosité des élèves sur "comment ça marche", accepter d’apprendre avec eux, rester en éveil.


Exemples de pratiques pédagogiques utilisant les réseaux sociaux

Isabelle Kesler, professeur documentaliste au lycée Simone Signoret, raconte une expérience de Webjournalisme avec des élèves de seconde, en séances d’accompagnement personnalisé, pour former à l’usage raisonné de la presse en ligne : les élèves suivent un évènement d’actualité, en l’occurrence les JO de Sotchi, pour observer et analyser la posture des journalistes.

Objectifs
  Découvrir la pluralité de la presse en ligne (Panorama)
  Droits et devoirs du journaliste
  Journalistes et réseaux sociaux
  Initiation à Twitter (Compte établissement)

 1ère séance : le modèle économique et le lexique du "web journalisme", l’offre des pure players, droits et devoirs du journaliste,
 2ème séance : Les réseaux sociaux comme canaux de diffusion de l’information. Twitter (fonctionnement, vocabulaire) et définition de règles communes pour l’activité.
 3ème séance : collecter des informations grâce à Twitter (revue de presse ou surveillance d’un thème d’actualité) et commenter le positionnement des journalistes.
 4ème séance : éditorialiser les tweets pour en faire un journal avec Twitario. Le scénario prévoyait d’utiliser Paper li mais il aurait fallu plus de temps.10.

Séquence web journalisme (PDF de 35.9 ko)

Scénario pédagogique
2013 2014

Séance 1 vocabulaire web journalisme (OpenDocument Text de 13.1 ko)

Fiche à compléter

Séance 1 séquence web journalisme (OpenDocument Text de 14.8 ko)

Les modèles économiques
Fiche à compléter

Séance 1 les pure players (PDF de 118.4 ko)

Fiche à compléter

Séance 2 lexique Twitter (PDF de 34.9 ko)

ressource

Séance 2 charte Twitter (PDF de 69.1 ko)

Charte usage de Twitter
pour la séquence

Séance 3 activité Twitter (OpenDocument Text de 13.8 ko)

fiche activité élève

ressources web journalisme (PDF de 95.1 ko)

Les tendances 2014

Des lycée ont une page officielle Facebook alimentée par le comité de vie lycéenne (par exemple le lycée Berthelot à Châtellerault).

D’autres pistes sont fournies dans la brochure "medias et information, on apprend !" du Clemi, et sur le site de documentation de l’académie de Caen.

(1) outils et services de communication ayant pour vocation de rencontrer des pairs, de créer et partager des contenus avec eux, de maintenir des liens sociaux.

(2) adhérent de Twitter dont on suit les publications

(3) adhérent de Twitter qui suit nos publications

(4) voir article du Monde sur l’ouvrage publié en 2014 "it’s complicated : the social lives of networked teens"

(5) "sociologie des réseaux sociaux", Pierre Mercklé, 2011

(7) Institut français de l’Éducation, École Nationale Supérieure de Lyon, bulletin "veille et analyse" ("jeunesse 2.0", fév 2012)

(8) voir à ce sujet l’étude menée auprès de lycéens par Nicolas Guichon, laboratoire sticef en 2012

(9) une plateforme hébergée au rectorat est mise à disposition depuis la rentrée 2014

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Auteurs

 Bernard Usé

 Chantal Bernard

 Nicolas Faure