Une "Moticlasse" au collège François Albert de Celles-sur-Belle publié le 04/12/2023

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L’expérimentation et son évaluation

Effets positifs constatés

Témoignage et avis de Madame Clochet

Quelles sont les effets de la mise en place de la moticlasse ?

MMe Clochet

Tout d’abord, la cohésion de la classe est forte dans un tel dispositif : bonne entente, ressenti positif sur le bien-être côté élèves. De plus, le développement des compétences psychosociales chez les élèves est indéniable : empathie, expression émotionnelle, entraide, prise d’initiatives de communication envers les adultes dans des projets créatifs en dehors de la classe, un esprit collectif se développe au détriment de l’esprit de compétition.
Je note chaque année une adhésion des élèves à l’évaluation positive (car « ça m’aide » ou « ça aide les autres »), en découle un rapport de confiance de qualité avec l’équipe pédagogique au sens large et le progrès des élèves fragiles grâce aux remédiations et à la différenciation.

Quelles sont les difficultés constatées ?

Je constate une difficulté à homogénéiser la pratique de l’évaluation positive au sein des équipes pour plusieurs raisons. Il y a parfois des freins touchant aux valeurs sous tendues par l’évaluation (que cherche t-on à faire lorsqu’on évalue ? faire progresser ? trier ? cultiver l’inter-performance ? l’auto performance ?). Se retrouve parfois également une crainte d’évoluer à plusieurs vitesses avec le groupe, fondée sur une peur de perdre le contrôle, or, la pédagogie différenciée constitue un axe fort sur le plan pédagogique et c’est précisément souvent par un assouplissement du modus operandi (différenciation) que les élèves libèrent leur potentiel, car c’est en s’adaptant au rythme de l’élève que ce dernier peut réellement être en mesure de progresser. Le cadre implicite peut alors reposer davantage sur le lien de confiance en soi et à l’enseignant que sur le respect d’un cadre normatif auquel tous doivent s’adapter au prix de dégâts cognitifs et émotionnels. La question liée à "se situer" dans ses apprentissages revient par ailleurs et notre travail consiste aussi à déconstruire le rapport classificatoire à la note (inter-performance). On a vert ou on a blanc, et si on a blanc on pourra, à la prochaine occasion, progresser pour transformer l’essai et le faire passer au vert, c’est à dire valider la compétence. L’idée est de déconstruire le regard habituel sur la note qui n’est plus un couperet. La note, et surtout les conseils précisés sur la copie doivent servir à progresser et non à se classer sur une échelle d’inter performance. On casse un peu les codes et au départ certains peuvent être déconcertés tant côté prof qu’élève ou parent. Néanmoins, le bénéfice est en grande majorité vite ressenti et palpable (au niveau cognitif, relationnel, sur l’estime de soi) et cette question tend à s’effacer au cours du premier trimestre au profit d’un ressenti positif.
A chaque nouvelle équipe se pose la question de l’adhésion à ce dispositif de la part des enseignants, chacun est libre de s’y inscrire ou non. Il n’y a pas d’imposition de pratique mais je constate que la plupart des enseignants acceptent d’essayer et que les pratiques s’égrainent avec le temps. En outre bien enseigner ne repose pas sur la pratique de l’évaluation positive et il ne s’agit pas d’opposer les pratiques aux autres. Expérimenter suppose humilité quant à l’appropriation par chacun et respect envers ceux qui ne sont pas prêts ou ne le souhaitent pas. Chaque enseignement, qu’importe sa forme, est une valeur ajoutée pour les élèves qui travaillent leur capacité d’adaptation, et donc leur intelligence. La diversité pédagogique quoiqu’il en soit reste enrichissante pour les élèves au sein d’une équipe, d’autant plus que chacun-e s’empare et soutient à sa façon le projet (remédiation ponctuelle, évaluation positive de révision, projet avec les élèves, utilisation du mémoclasse, expertise de la Vie scolaire sur le volet psychosocial par la co animation PP/CPE, entretiens CPE de régulation et d’écoute, médiations, etc).

Par ailleurs certaines contraintes disciplinaires (densité du programme, faiblesse du volume horaire/semaine) freinent la pratique de la remédiation indépendamment des valeurs ou de l’adhésion de l’enseignant.

Malgré la diversité des moyens de communication utilisés, nous n’atteignons pas toutes les familles (réponses aux sondages, réunion d’information), ce qui constitue une difficulté en raison d’un partenariat bancal subséquent (manque de compréhension du dispositif, manque de retours), le partenariat tripartite visé n’est pas total mais en cours d’évolution très encourageante cependant.

Nous constatons également, une augmentation du nombre d’élèves en souffrance (manque de disponibilité cognitive) au fur et à mesure des années impliquant une priorisation du travail de soutien émotionnel de la part de l’équipe au détriment de la métacognition en tant que telle même si cette dernière reste active.