Effets d’une intervention ciblée en production narrative sur le développement des capacités langagières des élèves de GS/CP publié le 18/01/2021

Objectif

Cette recherche porte sur l’étude de l’impact d’une intervention ciblée en production narrative sur le développement des capacités langagières des jeunes élèves de la GS au CP en difficultés de langage. Des données issues de la littérature ont mis en évidence l’importance du développement des capacités narratives pour le développement du langage oral.
Il a été montré en effet que les capacités narratives étaient prédictrices du développement ultérieur du langage oral et écrit (Griffin et al. 2004 ; Roth et al. 2002), que les enfants qui avaient eu un retard de langage ou de parole produisaient des narrations écrites appauvries (Bishop & Clarkson, 2003) et que les enfants faibles lecteurs avaient de faibles capacités narratives (Cain, 2003). L’ensemble de ces travaux indiquent de forts liens entre le développement des compétences narratives orales et le développement des pré-requis de l’entrée dans la langue écrite (Cragg & Nation, 2006).
Toutefois, peu de travaux ont testé l’impact d’une intervention ciblée en production narrative, en début d’apprentissage, pour favoriser le développement des compétences langagières. Dans le cadre de cette recherche, nous chercherons à tester l’hypothèse selon laquelle un entraînement basé sur l’identification des caractéristiques clés d’une narration permettrait d’améliorer les capacités langagières des jeunes élèves repérés comme étant en difficulté de langage. Pour cela, nous comparerons les performances d’élèves ayant bénéficiés d’une intervention ciblée à celles d’élèves ne bénéficiant pas d’une telle intervention.

Méthode

Notre population se composait de 67 élèves de GS/CP de cinq établissements scolaires de Deux-Sèvres. Dans chaque établissement, la classe d’élèves était divisée en deux sous-groupes : un groupe expérimental (GE) et un groupe témoin (GT). Ces deux groupes étaient appariés sur la base des scores obtenus à une épreuve d’évaluation initiale (test E.L.O. - Evaluation du langage oral - Khomsi, 2001). Le groupe expérimental bénéficiait d’un programme d’entraînement tandis que le groupe témoin poursuivait les activités habituelles de la classe.

Le programme d’entrainement du groupe expérimental a consisté en 14 séances de 30mn de conversation libre autour d’albums sans texte, en présence d’un enseignant spécialisé (ES-ADP), en raison de deux séances par semaine pendant sept semaines.

Après cette phase d’intervention, nous avons proposé aux deux groupes d’élèves une tâche de production narrative s’appuyant sur une planche de BD de 8 images extraites de Cubitus de Dupra (Eme et al. 2009).
Nous avons alors recueilli et codé les narrations produites par les élèves des deux groupes, puis procédé à une comparaison des capacités langagières (aspects linguistiques et discursifs) des élèves du groupe expérimental à celles des élèves du groupe témoin.

Résultats

Au niveau des aspects linguistiques, nos principaux résultats indiquent que tous les élèves, quel que soit leur groupe d’appartenance, ont amélioré leurs performances linguistiques entre l’évaluation initiale et l’évaluation finale. Toutefois, les progrès étaient plus importants sur tous les indicateurs en évaluation finale pour les élèves du groupe expérimental comparés à ceux du groupe témoin (exemple : plus de mots produits, plus de diversité lexicale, plus d’utilisations appropriées des déterminants et des pronoms, etc.).

Au niveau discursif, nous observons des résultats similaires. Même si tous les élèves ont progressé dans la connaissance du schéma narratif, les élèves du groupe expérimental ont progressé de façon plus importante que ceux du groupe témoin.
Nos résultats indiquent clairement l’efficacité d’une intervention ciblée sur le développement des compétences langagière des élèves en difficulté de langage. Ce qui constitue une base essentielle pour l’entrée dans l’écrit et les apprentissages scolaires à venir au cours de la scolarité.

Perspectives

Une deuxième phase d’expérimentation a démarré, avec à la fois des groupes d’élèves en prévention ciblée et des groupes tout venants. Il s’agit de mesurer l’effet d’une sélection des élèves en difficultés autour des compétences narratives. Les résultats sont en cours d’analyse.

Références

• Bishop, D. V., & Clarkson, B. (2003). "Written language as a window in to residual language deficits : a study of children with persistent and residual speech and language impairments". Cortex, 39(2), 215-237.
• Cain, K. (2003)."Text comprehension and its relation to coherence and cohesion in children’s fictional narratives". British Journal of Developmental Psychology, 21, 335–351.
• Cragg, L., & Nation, K. (2006). "Exploring written narrative in children with poor reading comprehension". Educational Psychology, 26(1), 55–72.
• Eme, E., Reilly, J., & Almecija, Y. (2009). "Compétences narratives et communicatives chez des personnes en situation d’illettrisme". Revue européenne de psychologie appliquée, 59 (2009) 123–138.
• Griffin, T. M., Hemphill, L., Camp, L., & Palmer, D. (2004). Oral discourse in the preschool years and later literacy skills. First Language, 24, 123-147
• Khomsi, A. (2001). ELO : évaluation du langage oral. Paris : ECPA, Les Éditions du Centre de psychologie appliquée.
  Roth, F. P, Speece, D. L., Cooper, D. H. (2002). A longitudinal analysis of the connection between oral language and early reading. Journal of Educational Research, 95(5), 259-272