Projet Mot Espace publié le 05/07/2010  - mis à jour le 06/07/2016

Pour commencer

Je me suis posé la question de cette manière : que faut-il savoir pour pouvoir « concevoir, conduire un projet et l’évaluer  » en termes de connaissances, de techniques ou d’attitudes ?

Je suis parti de deux constats que j’ai faits auprès de mes élèves :
 ils ont du mal à dépasser la première idée qui leur traverse l’esprit. Les plus aventureux avancent plusieurs idées. Mais rares sont ceux qui développent à partir d’une idée ou fouillent la dite idée.
 une difficulté ou une réticence plutôt chez de nombreux élèves à faire voir le cheminement de leur idée. L’important reste à leurs yeux le résultat final.

Je me suis arrêté sur cette attitude de recherche et d’exploration qui me semble être un élément important pour la construction de cette compétence.

Ma séquence est construite à partir de ces deux constats et je précise aux élèves dès le départ que l’évaluation portera essentiellement sur cette capacité à fouiller et développer une idée.


J’insiste auprès d’eux sur le fait que pour « faire voir » on peut utiliser n’importe quelle technique : dessin, maquette, photographie, vidéo, logiciel informatique... Le résultat final n’est pas indispensable.

Mise en oeuvre

Le projet proposé à des classes de 3ème est le suivant :

imaginer des lettres, des mots ou des phrases dans d’autres espaces que celui du livre ou du parchemin en vous appuyant sur des espaces existants dans le collège.

Travailler sur des espaces existants du collège permet de mettre les élèves dans la situation d’envisager des modes de représentation variés, un coin de table étant d’une autre dimension que par exemple une façade d’un bâtiment.

Documents montrés :

la Bible de Gutenberg , la Torah, une salle d’exposition de Barbara Kruger, un néon, un T.shirt et une oeuvre projetée sur une architecture de Jenny Holzer.


[Les élèves ont également vu un documentaire sur Georges Rousse au 1er trimestre]

Déroulement prévu sur 3 séances d’une heure (il se fera finalement sur 4 séances).

Contexte matériel dans lequel s’est déroulée cette séquence : salle d’arts plastiques avec possibilité de travailler dehors mais toujours dans l’enceinte du collège. Équipement dans la salle d’arts plastiques : 5 appareils photo, 1 caméscope, 1 ordinateur, 1 vidéoprojecteur. La salle informatique n’a pas été privilégiée afin de laisser le choix des techniques aux élèves.

Une réalisation d’élève

(phrases de l’élève en italique)

Cet élève voulait intégrer une lettre dans chaque vitre de la baie vitrée de la salle sur des fonds de couleur (image 1).

Même idée mais le plafond « troué » à la place de la baie vitrée (image 2). Les lettres sont intégrées à l’aide du logiciel Photofiltre.

Idée de projeter cette image sur un mur pour donner l’impression que le mur est troué (image 3).

Idée que les lettres semblent plus ou moins « enfoncées » dans les trous (c’était jusqu’à présent trop en surface). Photographie qui permet de percevoir la profondeur des trous (image 4).

De ces trous des lettres vont être accrochées à des fils. Jouer sur la longueur des fils (image 5).

Projection de l’image sur le plafond à l’aide d’un miroir (donner l’illusion que les lettres pendent des trous du plafond) et photographie (image 6).

Nous avons dans ce travail d’élève l’utilisation d’outils de production d’image (photographie numérique et logiciel de traitement d’image) et d’outil de diffusion (vidéoprojecteur) envisagé également comme outil de production. Il a fait le choix de la simulation (il ne veut pas le réaliser avec du papier, du fil et des ciseaux), mais il ne prend pas en compte les déformations apportées par sa projection au plafond (donner l’illusion que les lettres pendent des trous du plafond).

 


Outils numériques / outils traditionnels

Tous ces outils ont la plupart du temps été mélangés dans un même projet.

Du point de vue de la mise en œuvre :

Les outils numériques ont facilité les variations et les essais par leur vitesse d’exécution.

Le développement dans les travaux dessinés a été plus lent, l’attitude fréquente étant de travailler toujours sur le même dessin ou de vouloir le fignoler.

La photographie a été très utilisée quand il s’est agi de représenter le réel (photo retouchée sur ordinateur, dessin sur photos imprimées, photo projetée et photographiée à nouveau, etc.). Rapidité et simplicité apparente de mise en œuvre.

Elle a été également utilisée comme trace d’une action ou d’une présentation éphémère.

La difficulté très souvent rencontrée a été de ne pas voir ce qu’on était en train de faire, de ne pas être capable d’analyser ce qu’on avait produit. C’est en questionnant les élèves là-dessus qu’on pouvait parfois débloquer la situation. C’est ce qui a été le plus long et a concerné les élèves quelque soit les outils utilisés, qu’ils soient numériques ou traditionnels.

D’un point de vue esthétique :

Les outils numériques ont souvent amené les élèves à travailler autour de l’idée d’écran : projection sur une armoire, transparence ou les deux côtés d’une vitre, surface trouée ou transparente qui joue avec la lumière, écran d’ordinateur…

photo de la projection d’une diapo sur plexiglass

Les réalisations non numériques ont été essentiellement des travaux dessinés sur papier ou des maquettes. Les travaux sur papier ont présenté des idées proches des précédentes ou ont accompagné les travaux numériques. Mais ils se sont orientés vers des questions de couleurs plutôt que de lumière.

Les maquettes se sont intéressées plus particulièrement à des espaces en volume : escalier, murs orientés dans des directions différentes…Elles se sont accompagnées la plupart du temps de dessins et ont été quasiment toujours uniques.

Évaluation

Ce que j’ai pu observer en fin de compte me permet de faire apparaître divers attitudes de recherche de la moins propice à la plus favorable :

  une première idée et une seule : la flemme quoi !
  la notice de fabrication : envisager son travail comme la fabrication d’un produit en usine. Décomposition de la réalisation (unique) en plusieurs étapes : d’abord j’ai fait ceci, après cela, etc. Ces élèves ont en général travaillé à l’envers et ont produit à rebours.
  proposer plusieurs idées mais ne pas les développer.
  Proposer des variations autour d’une idée.
  Une idée amène une autre et ainsi de suite.

Par ailleurs

Dans le cadre d’autres projets les outils numériques ont pu être utilisés pour le travail de recherche :

par exemple, utilisation d’ un logiciel de 3D (Google Sketchup) dans un projet sur le logement collectif (3ème).
Utilisation de ce même logiciel de 3D pour aborder des questions liées à la prise de vue vidéo en 4ème.

Quelques remarques

  Un seul ordinateur dans la salle, ce n’est pas assez pour ce genre de situation.
  Des connaissances techniques de base sont nécessaires et le matériel doit être totalement identifié par les élèves dans la salle d’arts plastiques.
  Le temps est nécessaire aux élèves pour pouvoir explorer, essayer des choses…