De TDHC au Ghana : l’anglais comme passeport culturel à l’école publié le 15/04/2025  - mis à jour le 17/04/2025

Apprendre l’anglais en milieu rural : un levier pour grandir ouvert sur le monde

Dans les territoires ruraux éloignés des centres urbains, l’apprentissage précoce des langues vivantes constitue un levier essentiel pour l’ouverture culturelle des élèves. Le réseau d’éducation prioritaire (REP) du collège Jean Michaud de Terres-de-Haute-Charente, situé à Roumazières-Loubert, illustre cette dynamique. Ce réseau regroupe plusieurs écoles primaires, dont l’école élémentaire Jean Éverhard, et se caractérise par un indice de position sociale (IPS) inférieur à la moyenne nationale, reflétant des conditions socio-économiques modestes.

Conscient des défis liés à l’isolement géographique et aux contraintes socio-économiques, le réseau REP Jean Michaud a mis en place des initiatives visant à renforcer les compétences linguistiques des élèves. Notamment, une section bilangue anglais-espagnol a été instaurée dès le CM2, animée par Madame Beaumatin, professeure d’espagnol au collège Jean Michaud, favorisant une continuité pédagogique jusqu’au collège.

Dans ce contexte, l’école élémentaire Jean Éverhard, dirigée par Madame Virginie Thybaud s’est engagée, depuis septembre 2024, dans un dispositif d’anglais renforcé. Ce projet, soutenu par Alexia Noué, conseillère pédagogique départementale en langues vivantes, comprend une formation continue pour les enseignants et l’intervention de Naâ, assistante de langue originaire du Ghana, de novembre à avril auprès des 143 élèves de l’école.

Ce dispositif vise à enrichir les compétences linguistiques des élèves et à promouvoir une ouverture sur le monde, essentielle dans ce contexte rural.

Un dispositif structuré autour d’une formation et d’une assistante de langue

Ce projet, accompagné par la DSDEN et soutenu par la formation continue, repose sur deux axes :

  • une formation de 12 heures destinée aux enseignants,
  • la présence d’une assistante de langue anglophone, Naâ, venue du Ghana, qui intervient de novembre à avril, environ 12 heures par semaine, auprès des élèves de l’élémentaire.

Le projet devait également se déployer également à l’école maternelle des Grillons, mais l’assistante américaine initialement prévue pour cette tranche d’âge n’a pu mener à bien la totalité du projet ce qui n’a pas permis un développement aussi poussé dans les classes maternelles.

Une dynamique vivante en classe et hors classe

L’arrivée de Naâ a permis d’installer rapidement une routine anglophone au sein de l’école.

  • Les rituels d’anglais sont pratiqués dès le CP, avec des salutations et des consignes intégrées dans la journée.
  • Les fêtes traditionnelles anglophones (Halloween, Noël…) ont été célébrées avec les élèves.
  • Un coin anglais a vu le jour en CE2, avec affichage et livres en VO, et une mascotte accompagne certains apprentissages.
  • Un atelier jeux de société en anglais est également proposé sur la pause méridienne : le lundi avec le cycle 2 (13h–13h30) et le mardi avec le cycle 3 (12h–12h30), sur la base du volontariat.

Intérêt du dispositif anglais renforcé.

Paroles d’enseignants.

  • En CM1, les enseignants soulignent l’intérêt de séances d’anglais plus courtes, régulières et variées, favorisant la concentration et la motivation des élèves.
  • En CM2, la présence de Naâ a été particulièrement appréciée pour son apport en prononciation, son accent, et les interventions lexicales précises.
  • En CE1, les séances sont parfois articulées avec l’EPS : des échauffements en anglais permettent de combiner motricité et compréhension orale. Les activités, souvent ludiques, comme les jeux de loto ou les jeux de société, facilitent l’implication des élèves et rendent l’apprentissage plus naturel.

Une séance observée : jeux, interaction et aisance à l’oral en CE1

Lors d’une séance observée à la BCDI, un petit groupe d’élèves de CE1 a travaillé avec Naâ autour d’un jeu de 7 familles basé sur la famille royale britannique. Chaque famille était identifiée par une couleur, et les élèves devaient poser des questions en anglais à leurs camarades pour collecter les cartes du type “I want the aunt in the purple Family”.

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L’activité permettait de travailler simultanément :

  • les structures de phrase simples,
  • le lexique familial et les couleurs,
  • la prononciation et la compréhension orale.

Les élèves étaient concentrés, engagés, et participaient activement. Le caractère ludique du jeu, associé à un encadrement rassurant en petit groupe, favorisait les prises de parole et la répétition des structures. L’ambiance calme et conviviale contribuait à un climat propice à l’apprentissage de l’oral.

Un impact visible sur les pratiques

  • L’une des plus-values soulignées est l’effet de démystification de l’anglais : les élèves osent parler, prennent des habitudes d’écoute et de répétition, et comprennent peu à peu que l’objectif est de communiquer, même sans tout maîtriser.
  • La formation de 12h et la présence de l’assistante offrent un appui concret pour diversifier les pratiques, adopter de nouveaux gestes pédagogiques, et envisager des perspectives comme la certification DNL premier degré. Les échanges avec Naâ et la construction collective du projet renforcent également le travail d’équipe au sein de l’école.
  • Pour tous les niveaux, l’un des apports majeurs du dispositif réside dans la découverte d’une autre culture, ici la culture ghanéenne, qui permet aux élèves de dépasser les stéréotypes associés à la langue anglaise. Cette exposition à un anglais non britannique – loin de l’image figée de Londres – participe au développement des compétences interculturelles et à une meilleure compréhension de la diversité du monde anglophone. Le dispositif prévoit, lorsque les conditions le permettent, la présence d’assistants issus de pays anglophones différents en année 1 et en année 2. Cela renforce la prise de conscience par les élèves de l’ampleur géographique et culturelle de l’anglais.
  • L’objectif est également de montrer que, quel que soit l’accent ou le pays d’origine, ce qui compte est la capacité à interagir, à comprendre et à se faire comprendre.
  • Dépasser les barrières phonologiques, s’habituer à une variété d’accents, et s’ouvrir à d’autres façons de vivre et de penser sont autant de clés pour mieux communiquer. Ces apports concernent aussi les élèves à besoins éducatifs particuliers : les élèves ULIS ont particulièrement apprécié la découverte de la cuisine ghanéenne et des traditions culturelles lors des séances animées par Naâ.

À Jean Éverhard, l’anglais renforcé n’est pas un simple “plus” : c’est une entrée dans une culture vivante et plurielle, où les élèves découvrent à la fois une langue et une ouverture sur le monde. Si l’équipe souhaite que la présence de l’assistante puisse se prolonger sur l’année entière, la première année a déjà démontré l’intérêt de ce dispositif.

Les plus-values du dispositif sont doubles :.

  • Pour les élèves : une exposition précoce, régulière, structurée et motivante à la langue, le développement de compétences interculturelles, phonologiques, langagières et métalinguistiques, ainsi qu’une meilleure aisance à l’oral.
  • Pour les enseignants : une implication dans un projet motivant, un travail en équipe (enseignants, CPD LV, assistant), un enrichissement professionnel, et la possibilité de faire évoluer leur parcours vers une certification DNL premier degré.