L’oral au cœur des apprentissages publié le 23/05/2025  - mis à jour le 26/05/2025

Retour sur la journée de l’oralité du réseau Éclore Angoulême Sud du 18/04/2025

Pourquoi fêter l’oral  ? Pourquoi un concours d’éloquence  ? Pourquoi mettre l’oral est au cœur de l’apprentissage, de la construction de soi et de l’égalité des chances ?

  • Les recherches en sciences de l’éducation mettent en évidence que les compétences langagières, notamment orales, sont fondamentales pour la réussite scolaire. Elles permettent aux élèves de structurer leur pensée, de comprendre les consignes et d’interagir efficacement dans le cadre scolaire.
  • Cependant, des écarts significatifs subsistent entre les élèves issus de l’éducation prioritaire et ceux des autres secteurs. Par exemple, selon une note d’information de la DEPP en 2021, 30 % des élèves en éducation prioritaire présentaient un niveau faible en compétences langagières, contre 16,6 % hors éducation prioritaire .

Ces disparités soulignent la nécessité d’un enseignement explicite de l’oral en éducation prioritaire qui ne se limite pas à des pratiques implicites ou informelles.

Ainsi, promouvoir l’oralité à travers des initiatives comme le concours d’éloquence du Réseau Eclore d’Angoulême Sud contribue à réduire les inégalités scolaires en renforçant les compétences langagières des élèves les plus défavorisés. Cela leur offre des outils essentiels pour réussir leur parcours scolaire et s’insérer pleinement dans la société.

Une démarche inscrite dans un projet départemental

  • La journée de l’oralité organisée par le réseau Éclore s’inscrit dans une dynamique départementale portée par l’IA-DASEN de la Charente, Thierry Claverie.
  • Ce projet vise à structurer un parcours de formation à l’oral de la maternelle au lycée, en cohérence avec les priorités de l’éducation prioritaire, notamment l’enseignement explicite des compétences langagières.

L’oral comme levier d’apprentissage et d’émancipation

  • Laurent Didier, Inspecteur de l’Éducation nationale pré-élémentaire, rappelle que l’oral constitue un enjeu majeur de l’école dans sa mission d’égalité des chances.
  • Il souligne que la maîtrise de la parole, bien au-delà d’une compétence scolaire, est une condition essentielle pour accéder à la citoyenneté, à l’autonomie et à la réussite personnelle.
  • Selon lui, «  fêter l’oral  » revient à reconnaître la parole comme un outil de construction de soi, mais aussi comme un moyen de lutter contre les inégalités sociales et scolaires, en particulier en éducation prioritaire.
  • Il insiste sur la nécessité de sortir d’une approche intuitive ou implicite de l’oral pour aller vers un enseignement explicite, fondé sur des progressions, des gestes professionnels repérés et des contextes pédagogiques favorables.
  • La journée organisée dans le réseau Éclore a permis de mettre en lumière des pratiques concrètes qui vont dans ce sens, à travers des projets collaboratifs écoles et collèges, des concours d’éloquence, et des espaces où les élèves prennent la parole, apprennent à l’organiser et à la faire entendre.

Déroulé de la journée

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La journée a été rythmée par plusieurs temps forts :

  • Finale du Concours d’éloquence inter-établissements (EP et hors EP) : des élèves de collèges ont présenté des discours sur des thématiques variées telles que "Peut-on dire tout ce que l’on pense ?", "La femme est-elle l’égale de l’homme ?" ou encore "Les réseaux sociaux sont-ils une liberté ?".
  • Prestation musicale : la chorale du collège Puygrelier de Saint-Michel a interprété des morceaux issus de bandes originales de films, offrant une dimension artistique à l’événement.
  • Diffusion de podcasts  : des productions réalisées par des élèves du réseau REP+ Michelle Pallet ont été diffusées abordant des sujets tels que la pollution, des portraits historiques ou des lectures chorales d’album.

A titre d’exemple, voici le podcast sur le "Fou Volant d’Angoulême" réalisé par les élèves de CM2 de l’école Alain Fournier (REP+) :

Ces productions permettent de développer des compétences transversales chez les élèves : recherche d’informations, structuration du discours, expression orale, travail en équipe et utilisation des outils numériques. Elles offrent également une valorisation du travail des élèves, renforçant leur motivation et leur engagement.

Durant cette journée, les élèves de CM2 de l’école Alain Fournier encadrés par Mme Anne-Lise Audrerie et Mme Amélie Peytour ont réalisé des interviews des lauréats, des membres du jury et de l’organisation de la journée dans le cadre de leur projet webradio.

Focus sur le travail de préparation du concours d’éloquence au collège Michelle Pallet (REP+)

Déroulé de la séquence

Au collège Michelle Pallet, Camille Bréchaire, professeur de français, a mis en place un projet autour de l’éloquence impliquant l’ensemble des élèves de 4e. Certaines séances se sont déroulées en co-intervention avec sa collègue, Coralie Filiot.

L’originalité du projet repose sur sa dimension inclusive et progressive : tous les élèves, sans exception, ont participé à ce parcours, structuré sur plusieurs semaines, avec une dizaine d’heures d’ateliers intégrés à l’emploi du temps.

  • Le point de départ de la séquence a été la projection du documentaire À voix haute, retraçant le parcours de jeunes participants au concours Eloquentia en Seine-Saint-Denis.

«  Ce film a été une révélation pour beaucoup d’élèves. Ils se sont reconnus dans les trajectoires des jeunes du film, ce qui leur a donné la légitimité d’oser prendre la parole.  »

  • À la suite de cette mise en confiance, les élèves ont été formés aux fondamentaux de l’éloquence : les cinq étapes du discours (exorde, narration, argumentation, réfutation, péroraison), mais aussi le souffle, la posture, la gestuelle et la présence scénique.

«  On a vraiment travaillé la posture, le regard, le souffle. C’est un apprentissage progressif. J’ai vu des élèves se transformer au fil des séances.  »

  • Les ateliers ont alterné des temps d’écriture individuelle et des exercices de mise en voix, dans une logique de montée en compétence.
  • Chaque classe a organisé un mini-jury, composé de deux enseignants, pour sélectionner trois à quatre élèves qui se sont ensuite affrontés en finale interne.

«  Ce qui m’importe, ce n’est pas seulement la performance finale, mais que chaque élève ait eu l’occasion de passer à l’oral, devant les autres, et de recevoir un retour construit.  »

  • Camille Bréchaire souligne aussi la portée transversale de cet enseignement :

"On prépare à la fois aux épreuves du brevet, mais aussi à ce qu’on attend d’eux plus tard : prendre la parole, argumenter, défendre une idée. C’est une compétence de citoyen. C’est en 4e que ça se joue : ils ont de la disponibilité mentale, pas encore la pression des examens, et c’est un moment où ils peuvent encore se transformer."

Le regard de Yasna, élève de 4e au collège Michelle Pallet

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Parmi les élèves ayant participé, Yasna, élève de 4e, a été l’une des demi-finalistes du concours inter-établissements.

  • Son discours portait sur la question : Peut-on dire tout ce que l’on pense ? Elle y évoquait avec lucidité la puissance du silence, le courage d’assumer ses émotions et l’importance de la retenue. Elle y parlait de la vulnérabilité comme une force, parce que ce n’est pas en criant qu’on est plus fort, mais en sachant écouter. 
  • Interrogée par les élèves de CM2 d’Alain Fournier, elle se dit très fière de représenter le collège.

«  J’ai d’abord présenté mon discours devant ma classe, puis j’ai été choisie pour représenter le collège avec trois autres camarades. Ça m’a fait très plaisir. Ils m’ont dit que je le méritais.  »

Yasna confie également que parler devant un public était «  moins impressionnant que devant la classe  », car elle s’y sentait «  plus libre  ». Elle a vu dans cette expérience une occasion de se dépasser :

«  Je n’avais jamais parlé en public comme ça. Maintenant, je me sens capable de le refaire. J’ai pris confiance.  »

L’importance de l’enseignement explicite de l’oral en éducation prioritaire

  • L’enseignement explicite de l’oral est reconnu pour son efficacité dans la réduction des inégalités scolaires.
  • Il permet de structurer les apprentissages, de clarifier les attentes et de fournir aux élèves des outils concrets pour s’exprimer avec aisance.
  • Dans le contexte de l’éducation prioritaire, où les écarts langagiers peuvent être significatifs, cette approche est particulièrement pertinente. Elle favorise la confiance en soi, l’estime de soi et la réussite scolaire.

La journée de l’oralité du réseau Éclore a illustré l’importance de l’oral dans le parcours éducatif des élèves, en particulier dans les contextes d’éducation prioritaire.
Les initiatives présentées, qu’il s’agisse de concours d’éloquence, de productions numériques, témoignent de l’engagement des équipes éducatives à promouvoir des pratiques innovantes et inclusives.

L’enseignement explicite de l’oral, en structurant les apprentissages et en valorisant la parole des élèves, constitue un levier essentiel pour favoriser la réussite de tous.

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