Pour une gestion durable des zones humides, des littoraux et des espaces fluviaux publié le 28/08/2007  - mis à jour le 25/06/2012

L’accès à l’eau n’est pas complètement gratuit : les Québécois s’acquittent d’un abonnement pour le raccordement à l’eau mais la quantité d’eau utilisée n’est pas facturée. Il n’y a pas de compteur qui mesure la consommation domestique de chaque ménage. On peut s’interroger sur le caractère durable de la gestion de cette ressource. De manière un peu caricaturale on peut rapprocher cette situation de celle d’un forfait illimité. Pourtant il semble que la situation soit remise en cause notamment par les gouvernements en raison du coût du traitement des eaux usées. Qu’en est-il de la consommation des espaces au Québec ? La réflexion sur la gestion des espaces fluviaux, des zones humides et des littoraux est-elle plus engagée ? Comme en France, des mesures sont prises pour protéger et conserver ces espaces jugés fragiles, ces écosystèmes menacés. Le ministère du développement durables et de l’environnement est d’ailleurs aussi celui des parcs !

Les enjeux aujourd’hui : menaces du réchauffement climatique et exportation de la ressource

Un large débat sur la tarification de l’eau ne peut être compris sans avoir en tête les enjeux soulevés. Le réchauffement climatique menace certains stocks d’eau douce, ceux des régions boréales en particulier. Si le Canada dispose d’une gigantesque ressource en eau, la consommation est croissante et les exportations, pour l’essentiel vers les États-Unis, représentent des volumes conséquents de cette ressource.
Parmi les ressources en eau douce, le réseau des Grands Lacs et du Saint-Laurent représente le cinquième des eaux douces de surface de la planète. Il occupe une place importante dans la réalité géographique et économique de huit états américains et de deux provinces canadiennes (Ontario et Québec). Pas surprenant que l’eau des Grands Lacs soit tant au cœur des discussions canado-américaines.

Certains incidents aux conséquences inquiétantes ont contribué à faire de l’eau une question d’actualité dans toutes les provinces du Canada. Ainsi au tout début de l’année 2000, les résidents de Walkerton, en Ontario, durent faire bouillir leur eau ! Plusieurs mois après la levée de cet avis des autorités, la méfiance reste profonde chez plusieurs membres de cette communauté agricole ontarienne, traumatisés par la pire épidémie de bactérie E. coli de l’histoire du Canada.
Une épidémie a tué sept personnes et en a rendu 2300 autres malades. Une enquête a démontré que la contamination de l’eau a été causée par du fumier, qui a été entrainé par de fortes pluies dans des puits de la municipalité.
En mai 2000, la Commission sur la gestion de l’eau du Québec recommandait déjà de ne pas :

  • exporter massivement d’eau par dérivation, pipeline, citernes ou autres contenants en vrac,
  • privatiser des réseaux d’aqueducs du Québec.

Par contre elle encourageait :

  • la soumission de tous les projets de captation d’eau souterraine pour l’embouteillage à une étude d’impact environnemental,
  • la réduction de la pollution agricole.
    Selon cette commission, l’eau doit être considérée comme un bien collectif, et les grands utilisateurs, comme les municipalités et les industries, doivent payer des redevances à l’État.

    Qu’en est-il de la ressource ?

    Le littoral océanique du Canada est le plus long au monde, et près de 9 % de sa masse terrestre totale est recouverte d’eau douce. Ses deux millions de lacs occupent plus d’espace que ceux de n’importe quel autre pays, et ses cours d’eau évacuent chaque année 7 % de l’approvisionnement de la Terre en eau renouvelable.
    Le plus grand ensemble de lacs (les Grands Lacs) chevauche la frontière canado-états-unienne : il renferme 18 % de l’eau douce lacustre du monde. La plupart des rivières canadiennes ont été formées depuis la dernière époque glaciaire. Presque 75 % de la masse continentale canadienne draine des eaux qui se déversent vers le nord, soit dans l’océan Arctique, soit dans les baies d’Hudson et James. Le Canada dispose de 7 régions hydrographiques, le Québec en compte deux : la baie d’Hudson et l’océan Atlantique.
    Le Saint-Laurent est au 17ème rang des fleuves du monde, selon la superficie de son bassin versant, qui représente près d’un million de km².

Au Québec, le véritable enjeu est sans doute celui du traitement de l’eau.

Ce n’est pas la rareté de l’eau qui est en jeu mais le coût du traitement de cette eau, auquel cas d’autres approches moins onéreuses et moins controversées existent :

  • fonds d’investissement pour renouveler les infrastructures (comme à Montréal),
  • campagnes de sensibilisation des citoyens,
  • incitatifs fiscaux (comme aux États-Unis)
  • installation de toilettes à faible débit ou d’électroménagers peu consommateurs,
  • réglementation des usages (comme l’interdiction de l’arrosage le jour ou du lavage des trottoirs à grande eau).

On peut également installer, outre des compteurs aux entreprises, des compteurs par quartiers, permettant aux gestionnaires de la Ville de repérer les zones où la consommation résidentielle est anormalement élevée et de disposer d’outils pour mieux gérer les quantités produites.
S’il s’agit plutôt de réduire la consommation excessive d’eau potable parce qu’elle coûte cher à l’ensemble de la collectivité (il faut assainir cette eau selon des normes de plus en plus sévères, la pomper à travers le réseau, puis l’épurer), on a plutôt affaire à une question d’ordre fiscale qu’à une question de préservation de la ressource. D’ailleurs certains dénoncent déjà une privatisation de ce secteur à l’image de ce qui s’est passé assez largement en France.
Pourtant le système d’affermage de l’eau potable, tel qu’il est pratiqué en France notamment, ne permet pas d’améliorer la qualité de l’eau, ni même la gestion du service. Les entreprises privées refusent souvent de participer à l’investissement dans les infrastructures, qui restent à la charge des municipalités, tandis que les résidents payent leur eau plus cher dans les agglomérations desservies par le privé.
L’affirmation selon laquelle la délégation de la gestion de l’eau au secteur privé accroît son efficacité est un mythe : l’absence de concurrence, une fois le contrat attribué, n’incite l’entreprise qu’à réaliser ses profits sans chercher à améliorer sa gestion.

Bibliographie

 Frédéric Lasserre, « Faut-il faire payer l’eau au Québec ? »,
Le Devoir, éditorial jeudi 7 juillet 2005, p. A6 ]

Le lancement de la Politique nationale de l’eau au Québec en 2002 a été l’aboutissement de cinq années de recherches, de consultations, de recommandations et de prises de position sur les enjeux, les orientations et les engagements à mettre en œuvre en matière de gestion de l’eau au Québec. Outre le texte intégral de la Politique, les faits saillants de celle-ci ainsi qu’un dépliant promotionnel sont accessibles sur le site du ministère du développement durable, de l’environnement et des Parcs.
La mise en œuvre de la gestion intégrée de l’eau par bassin versant constitue un engagement majeur de cette Politique.


Des zones humides et des espaces littoraux et fluviaux à préserver, protéger ou conserver

Les espaces littoraux et fluviaux ou encore les zones humides sont souvent les plus menacés. C’est souvent sur eux que s’exercent une forte pression urbaine, agricoles ou même touristiques. Hélas ce sont aussi des espaces souvent très riches d’un point de vue biologique d’une part d’un point de vue paysager d’autre part.
Pour ces deux raisons il a été nécessaire de protéger, préserver ou conserver ces espaces par des mesures législatives qui imposent un certain nombre de garanties et de contraintes pour les éventuels consommateurs de ces espaces.
En 1974, le Québec adopte la Loi sur les réserves écologiques dont l’un des objectifs est la protection des espèces menacées. En 1978, est créée la réserve écologique du Pin-rigide, soit la première réserve écologique protégeant un arbre rare. En 1981, le parc de conservation de la Gaspésie est constitué afin de sauvegarder une population distincte de caribou et son habitat. Des parcs et des réserves sont ainsi créés dans le but de protéger certains éléments exceptionnels du patrimoine naturel du Québec.
Enfin, et c’est là un événement majeur, le gouvernement du Québec adopte en 1989 la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables, en réaction aux menaces croissantes qui mettent en péril l’intégrité de la biodiversité du Québec et en réponse aux demandes pressantes des environnementalistes.

En France on les retrouve dans les sites classés natura 2000, ou encore dans le patrimoine du Conservatoire du littoral dont le siège se trouve à la corderie royale de Rochefort.
Les statuts possibles sont cependant plus nombreux concernant ces espaces (réserve naturelle volontaire, ZNIEFF, parcs régionaux, parcs nationaux...). Le cas échéant on pourra se reporter à l’ouvrage d’Yvette Veyret intitulé Géo-environnement dans la collection Campus. Il est également possible de consulter le site Géoconfluences qui propose un dossier sur le thème : "les espaces littoraux : gestion, protection, aménagement".

La législation du Québec contient aussi un corpus pour protéger et préserver certains espaces menacés. Il est possible d’établir la typologie suivante :

  • Parcs nationaux :
    aires protégées dont l’objectif prioritaire est d’assurer la conservation et la protection permanente de territoires représentatifs des régions naturelles du Québec ou de sites naturels à caractère exceptionnel, notamment en raison de leur diversité biologique, tout en les rendant accessibles au public pour des fins d’éducation et de récréation extensive.
  • Réserves aquatiques :
    aires protégées axées principalement sur la protection de la biodiversité en milieu aquatique d’eau douce et d’eau salée et des milieux naturels adjacents.
  • Réserves de biodiversité :
    aires protégées constituées dans le but de favoriser le maintien de la biodiversité en milieu terrestre et plus spécialement de la représentativité des différentes régions naturelles du Québec.
  • Réserves écologiques :
    territoire conservé à l’état naturel : une île, un marécage, une tourbière, une forêt, un bassin hydrographique, etc.
    Tous les sites choisis présentent des caractéristiques écologiques distinctives.

La protection des espaces fluviaux, notamment des rives du Saint-Laurent, suscitent une réflexion et une politique spécifique. Nous invitons le lecteur à consulter à ce sujet les articles sur l’eau dans la rubrique "Géographie et civilisation" ou encore la fiche sur les grands lacs dans cette rubrique.

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