
Repenser les espaces d'apprentissage pour favoriser l'autonomie des élèves grâce à des environnements flexibles et un accompagnement bienveillant publié le 18/11/2024
Une salle de permanence flexible : pourquoi ?
Stéphane Bonnin, Conseiller Principal d’Education du collège Jean Monnet de Saint-Agnant (17) propose un article sur la réalisation d’une salle de permanence flexible dans son collège.
Un grand merci pour son travail.
Les besoins des élèves évoluent constamment, et il est de notre responsabilité, en tant qu’acteurs éducatifs, de nous adapter pour répondre à ces nouveaux défis. C’est dans ce cadre que j’ai récemment mené une réflexion approfondie sur la transformation d’un espace traditionnel — la salle de permanence — pour en faire un lieu d’apprentissage flexible et inclusif. Cette initiative m’a permis de constater à quel point un environnement réaménagé pouvait stimuler l’engagement des élèves et renforcer leur autonomie.
Un projet ancré dans les besoins des élèves
Le constat initial est simple : nos élèves ont de plus en plus de difficultés à rester attentifs dans des environnements figés. Les besoins sont multiples, qu’il s’agisse d’élèves en situation de handicap, de troubles de l’attention ou simplement en recherche d’un environnement propice à leur épanouissement.
Face à ce constat, j’ai initié un projet d’aménagement flexible de la salle de permanence, visant à repenser cet espace pour qu’il soit à la fois stimulant et adapté aux différents styles d’apprentissage. En repensant cet espace, l’objectif était d’offrir un environnement où chaque élève pourrait trouver sa place, à la fois pour collaborer et pour travailler de manière autonome, et ainsi renforcer leur motivation à apprendre.
La flexibilité au service de l’apprentissage et de l’autonomie
L’aménagement s’est structuré autour de plusieurs pôles :
- Un espace lecture , permettant aux élèves de se plonger dans la lecture en toute tranquillité, renforçant ainsi leur capacité de concentration et inspiré par l’action « Silence, on lit ! » que nous avions instituée dans l’établissement.
- Des îlots collaboratifs qui encouragent le travail de groupe et la coopération, en écho aux demandes croissantes des enseignants et des inspecteurs pour intégrer davantage de pédagogies collaboratives. (un réel besoin dans mon établissement rural car les élèves ne pouvaient travailler ensemble qu’au collège)
- Des espaces individuels pour favoriser le travail en autonomie, où chaque élève peut se recentrer, en particulier ceux nécessitant un environnement plus calme (des casques anti-bruit sont à la disposition des élèves pour renforcer cet aspect s’il le désire).
- Un espace de présentation , qui favorise les échanges, les débats et les projets collectifs, contribuant ainsi à la dynamique de la vie scolaire et au climat scolaire apaisé. Pour exemple, je m’en sers pour mes formations, mes actions de prévention, un professeur de français s’en sert également dans le cadre d’un atelier d’aide aux devoirs pour les parents...
- Un espace numérique avec ordinateurs , devenu indispensable pour répondre aux besoins croissants des élèves en matière de recherche, de production de documents et d’activités collaboratives. Cet espace permet aux élèves de travailler sur des projets nécessitant des ressources en ligne, d’approfondir leurs connaissances sur des sujets vus en cours ou encore de s’entraîner sur des outils numériques. L’accès à cet espace facilite également la mise en place d’activités comme le dispositif « Devoirs Faits » ou des ateliers encadrés par des enseignants offrant, ainsi un soutien personnalisé et ciblé.
Focus sur le mobilier choisi pour encourager la flexibilité et l’autonomie
L’un des aspects clés de cet aménagement flexible repose sur le choix du mobilier, pensé pour répondre aux divers besoins des élèves.
Ainsi :
- Tables hautes pour permettre aux élèves qui préfèrent travailler debout de rester actifs tout en se concentrant.
- Assises mobiles et flexibles comme les tabourets culbuto, qui offrent la possibilité de se balancer et de tourner sans risque de chute, idéales pour les élèves ayant besoin de mouvement pour se concentrer.
- Poufs confortables dédiés à l’espace de lecture pour créer un environnement apaisant.
- ZTOOL au niveau du sol , parfaits pour des activités collaboratives en petit groupe.
- Tables et chaises modulables qui facilitent la création d’îlots de travail selon le nombre d’élèves ou le type d’activité.
- Tableaux blancs à différentes hauteurs pour encourager les échanges et les réflexions collectives.
Ce mobilier a été choisi pour sa capacité à s’adapter à des configurations variées et à favoriser un environnement d’apprentissage dynamique et stimulant.
L’autonomie comme levier de motivation
Un principe clé a guidé ce projet : l’autonomie ne se décrète pas, elle se construit dans un cadre bienveillant. Selon le modèle de Boud (1988), le développement de l’autonomie repose sur trois axes : la préparation cognitive, l’interaction sociale et la répétition. En permettant aux élèves de choisir leur espace de travail selon leurs besoins du moment, nous renforçons leur capacité à s’auto-réguler et à prendre des décisions éclairées.
L’impact a été immédiat : les élèves, en s’appropriant ces nouveaux espaces, ont montré plus d’engagement et de motivation. C’est très gratifiant lorsque les assistants d’éducation vous font le retour d’un élève décrocheur qui préfère aller en salle de permanence flexible pour travailler plutôt que de se rendre au foyer. Cette approche rejoint également les travaux de Deci et Ryan (2000) sur l’autodétermination qui soulignent que le fait de donner davantage de choix aux apprenants favorise leur engagement en renforçant leur autonomie et leur sentiment de responsabilité.
Accompagner les équipes pour une transformation durable
La réussite d’un tel projet ne repose pas uniquement sur la réorganisation de l’espace, mais aussi sur l’accompagnement des équipes éducatives. J’ai veillé à impliquer les enseignants, les assistants d’éducation et l’ensemble de la communauté scolaire dans ce processus , en les encourageant à expérimenter, à échanger, et à ajuster leurs pratiques. L’objectif était de créer une dynamique collective, où chaque acteur se sent investi et soutenu dans l’évolution de ses pratiques.
Pour que cette démarche soit pérenne, il est essentiel d’intégrer des moments d’échanges réguliers entre collègues, permettant ainsi à chacun de partager ses retours d’expérience et de réfléchir ensemble aux ajustements nécessaires.
Encourager les initiatives similaires
Depuis quelques années, j’ai été contacté par certains d’entre vous qui envisageaient de se lancer dans des projets similaires, si vous avez l’occasion, comme moi, de le faire dans le cadre d’une restructuration, je ne peux que vous y encouragez. Pour ceux qui souhaite tester, je recommande de commencer modestement, en identifiant un espace propice au changement et en le transformant pas à pas. Il ne s’agit pas de révolutionner tout un établissement, mais de créer des îlots de flexibilité, qui peuvent par la suite inspirer d’autres initiatives.
Il est également crucial d’intégrer les élèves dans cette démarche, en leur permettant d’exprimer leurs besoins et d’être partie prenante du projet. Cette co-construction renforce non seulement leur autonomie mais aussi leur sentiment d’appartenance à l’établissement.
Conclusion : une vision pour l’avenir
Mon parcours m’a montré à quel point il est gratifiant d’accompagner les élèves et les équipes dans cette transformation. Cette démarche s’inscrit pleinement dans les objectifs de notre académie de promouvoir l’autonomie, la responsabilité et l’épanouissement des élèves, conformément aux axes de nos projets d’établissement.
En partageant ces pratiques, j’espère donner l’envie à d’autres établissements de se lancer dans des projets similaires, en repensant leurs espaces pour répondre aux besoins diversifiés de leurs élèves et ainsi contribuer à un système éducatif plus inclusif, plus souple, et plus humain.
Je suis à votre disposition si certains souhaitent échanger sur le sujet.