L'apport des neurosciences en éducation : présentation du laboratoire Techné - GTL de Chauvigny publié le 12/05/2017  - mis à jour le 15/05/2017

Le GTL de Chauvigny a eu la possibilité de découvrir les missions de Techné le 11 avril dernier.

 Site du laboratoire Techne

Nous avons été reçus dans le laboratoire - ou zone d’observation - par Jean-François Cerisier, directeur du laboratoire, et trois jeunes chercheuses doctorantes.

L’apport des neurosciences en éducation

Ce compte-rendu a pour vocation d’introduire à ce sujet et pourra être approfondi par de plus amples lectures : la majorité de nos échanges a pris la forme d’une discussion à bâtons rompus dont il est difficile de rendre compte.

Notez que je vous livre les données brutes, c’est à dire telles que je les ai entendues et comprises. Elles seront le point d’ancrage de nos réflexions dans nos usages et/ou orientations pédagogiques.

  • Objectifs du laboratoire Techné : comprendre comment les élèves utilisent le numérique : ce qu’ils en font, le type d’usages.
  • Présentation des missions de Techné : le laboratoire participe à des groupes de travail pour le ministère de l’Éducation, qui a identifié 10 thèmes liés au numérique.
    Le laboratoire travaille sur le learning analytique. Il s’agit de :
    • répertorier tous les outils pouvant contribuer à la recherche et mettre en place une démarche de travail,
    • procéder à l’analyse des usages du numérique : le laboratoire va faire appel à des collègues pour enrichir leur corpus de « cobayes »,
    • travailler sur l’aspect déontologique et éthique de l’analyse des traces laissées sur le net par les usagers (explications plus loin).

L’ Intelligence artificielle

Le projet majeur actuel de recherche de Techné est le projet Living Cloud, en partenariat avec le lycée LP2II. Les deux chercheuses Hassian El Kachai et Julie Pottier nous l’ont présenté : ce projet, financé par la Grande Région, a débuté dès 2013.
Les élèves ont d’abord tous été équipés de tablettes ; depuis 2015-16, ils sont passés au Byod (Bring your own device : les élèves ont la possibilité de travailler sur leurs propres appareils numériques nomades) notamment par le biais de tablettes hybrides avec clavier.
Les chercheurs ont noté que les élèves ont tous préféré l’ordinateur portable.

Techné accompagne scientifiquement les élèves : le but est d’amener les élèves vers la dématérialisation des ressources, des outils, et le travail collaboratif.
Pour savoir ce que font les élèves avec le numérique, l’objet d’étude des chercheuses est l’analyse des traces laissées sur le net.
C’est un objet d’étude novateur, pour lequel tout est à créer : les outils, les protocoles d’analyse. Il leur faut donc collecter et analyser ces traces.
Les élèves du LPII constituent le corpus d’analyse.

Deux types de démarches sont employés :

  • la démarche systématique : c’est la fouille de données massives ;
  • la démarche prescriptive : le learning analytique (voir plus haut).

Pour obtenir le maximum de résultats, il faut croiser les deux démarches.
Pour tracer les élèves, on utilise le logiciel de tracing Kidlogger (également employé pour le contrôle parental).
Tout est tracé : les sites, les applis téléchargées... Les traces donnent des indications de comportement.
Cependant, le fait de se savoir tracé peut modifier le comportement des internautes : le traçage est donc complété par des entretiens avec les chercheuses.
L’observation de la circulation des pratiques numériques permet d’élaborer des indicateurs très fins, mais par conséquent très lourds et longs à étudier.


Sur le terrain

Tous les élèves et adultes de l’établissement ont été sollicités pour être tracés.
250 parents ont donné leur autorisation pour que leur enfant soit tracé.

Sur ces 250 élèves potentiels :

  • 200 ont donné leur accord pour être tracés uniquement sur le Wifi du lycée ;
  • 65 ont donné leur accord pour être tracés 24h/24 dans et hors du lycée.
  • Aucun adulte n’a donné son accord !

Certains parents ont demandé à ce que leur enfant soit tracé à son insu (ce qui a été refusé !), c’est aussi un indicateur sur les comportement envers le numérique.

Autres attentes de l’étude :

  • voir s’il y a une transformation pédagogique induite par le projet : comment les enseignants ont transformé ou non leur pédagogie. Pour cela des entretiens sont réalisés avec les profs et avec les élèves. 60 % ont bien voulu y participer.
  • l’impact du projet sur la réussite des élèves : y-a-t-il une corrélation entre l’utilisation du numérique et la réussite ? 10 classe sont expérimentées : en cours d’analyse.
  • mieux comprendre le point de vue des élèves : la mise à disposition permanente des outils numériques modifie-t-elle la relation à l’école des élèves ? (sur ce sujet, 15 établissements sont aussi testés en Sâone & Loire).
  • peut-on noter une efficacité collaborative au lycée ? Ce sujet de recherche est travaillé à Techne par Carolina Gracia Moreno « instrumenter l’édition collaborative des cartes conceptuelles (ou cartes mentales)  ». 

Aspects déontologique et éthique du traçage

JF Cerisier a insisté sur cet aspect de l’utilisation du traçage et aimerait une vraie réflexion menée au ministère. Il nous a cité l’exemple d’Hachette qui a fait appel à une société américaine pour tracer les jeunes afin de déterminer le contenu de ses prochaines éditions numériques, non pas en termes pédagogiques mais économiques : publicité ajoutée, publicité placée etc.
Bien entendu, le traçage des élèves du LPII n’est utilisé qu’à des fins de recherches scientifiques et non économiques.

Premières données

Les toutes premières observations (brutes, c’est à dire non expliquées ni argumentées et donc à prendre avec circonspection) font ressortir que les garçons préfèrent utiliser le navigateur Firefox, les filles préfèrent Chrome.
Les filles utilisent aussi plus souvent les logiciels libres.

Autres missions de Techné

JF Cerisier participe à un autre projet : « Comment faire pour développer les compétences des élèves à l’utilisation du numérique (soit une suite au B2I) » : fin août, une audition se déroulera lors de Ludovia, université d’été à Ax les thermes (vous y êtes tous invités ! )

COBALT : lieu dédié au numérique en centre ville de Poitiers (en face du lycée Victor Hugo, dans les anciens locaux de Centre Presse). Il marie entreprises privées et institutions publiques (municipalité, EN…). Les élèves du lycée le fréquentent assidûment... serait-ce parce qu’il y fait bon en hiver ?

CEE : campus e-éducation, en coopération avec CANOPE, dont la thématique pour 2017 est l’edutainment, mélange entre le domaine éducatif et la forme du divertissement.
 Site de CEE

Le projet débute par un « créathon », suite de l’hackathon, le 10 mai.
Le projet se poursuivra la 1ère semaine d’octobre sur divers lieu : l’espace Mendès France, l’Hôtel de Région, l’atelier Canopé de Chasseneuil. Voir le site du CEE pour plus d’informations.

Visite de la BU

Nous avons terminé notre matinée par la visite de « la Ruche » learning center, le nouvel espace de la BU, qui s’interroge sur « quels nouveaux espaces pour quels nouveaux usages ? ».

Je vous invite toutes et tous à le visiter (c’est la BU avec la façade de béton très particulière), afin que nous puissions en discuter lors d’un prochain GTL.
Pour ma part j’ai trouvé ce lieu franchement intéressant et ne pouvant tout à la fois convenir à tous les publics, mais nous en reparlerons car évidement cela repose la question de notre rôle dans un tel lieu.

Merci à celles et celui qui étaient présent-es de compléter, rectifier ou désavouer ce compte-rendu !
Bonne lecture !
Marie-Noelle Delgado