François Réau – Du prisme enflammé de l’air publié le 07/10/2022

Un compte-rendu d’exposition réalisé par les étudiant.e de la CPES-CAAP

Les étudiant.es de la CPES-CAAP sont allés visiter l’exposition de l’artiste François Réau à la Chapelle des Dames Blanches et à la Tour de la Chaîne de La Rochelle – compte-rendu de Rose BURNET-BOUYER et Audrey MATHIAS. L’exposition est visible jusqu’au 16 octobre 2022

L’exposition de François Réau présente la particularité d’être sur deux lieux au cœur de la Rochelle, chacun chargé de l’Histoire de la ville : La Chapelle des Dames Blanches d’une part, et la tour de la Chaîne d’autre part. L’artiste a décidé de prendre en compte les spécificités des deux lieux, pour proposer au public deux espaces qui, bien que liés par une permanence de certains éléments, nous plongent dans une atmosphère bien spécifique à chacune des deux visites. L’odeur, la température de l’air ou son humidité nous mettent à chaque fois dans une disposition particulière et qui évoque des souvenirs à certains Rochelais.

Installation de François Réau à la Chapelle des Dames Blanches

Installation de François Réau à la Chapelle des Dames Blanches

François Réau choisit un poème d’Alfred de Vigny pour faire le lien entre ses œuvres et la Rochelle, La frégate, la sérieuse. Un long extrait de celui-ci, faisant référence au siège de la ville par Richelieu au XVIIe siècle est recopié sur un pan de mur, encadrant un tableau. Néanmoins, le but n’est pas qu’il soit lu mais vu afin de mettre en valeur le dessin qu’il encadre. François Réau considère les écritures au même titre que des dessins, comme de simples lignes au fusain. D’autres extraits, beaucoup plus courts, dessinent des lignes d’horizon ailleurs dans l’exposition.

Sa technique plastique de prédilection étant le dessin, bien qu’il se soit également essayé à d’autres techniques telles que la peinture, ce sont donc majoritairement des œuvres réalisées à la mine de plomb ou à la poudre graphite qui composent l’exposition. Elles offrent un rendu dans un dégradé de gris du plus clair au plus foncé. François Réau propose ainsi de multiples paysages mentaux, dont il laisse l’interprétation complète au visiteur. Leur titre, Stellae, mot latin qui signifie étoile, nous permet malgré tout de faire un lien avec le temps et sa mesure, thématique récurrente chez le plasticien. Dans la Chapelle, les vitraux projettent à certaines heures leur reflet directement sur certains tableaux, renforçant la symbolique des étoiles et l’élévation spirituelle.

Le temps est aussi abordé dans les plus grandes œuvres de cet artiste. Le tableau central de la Chapelle est une carte d’un ciel de 1772, réalisée il y a trois ans, qui nous fait contempler une image du passé ; beaucoup des étoiles qui y figurent ont probablement disparu aujourd’hui. Il est le premier tableau choisi par François Réau, lui apparaissant comme une évidence. Dans la Tour, le dessin “Mesurer le ciel la nuit” est une évocation de la mémoire, lacéré au scalpel dans la partie inférieure, comme représentation de la perte de nos souvenirs et de la dégradation de notre mémoire.

Installation de François Réau à la Chapelle des Dames Blanches

Installation de François Réau à la Chapelle des Dames Blanches

Des paysages sont directement créés dans les salles grâce à cette fois des éléments tridimensionnels, des caissons de flottaisons usés, découverts à la suite d’une visite de François Réau au musée maritime de la Rochelle. Le cuivre originel de ces caissons s’est dégradé avec le temps, le vert de gris créant des motifs pouvant rappeler des peintures impressionnistes, ou les marines du peintre britannique William Turner. Ils ont été laissés dans leur état originel, sans aucune retouche de l’artiste, afin de former des chemins jusqu’aux pièces majeures de chaque site. Certains d’entre eux sont placés à la verticale, guidant notre regard sur la hauteur de plafond de ces deux lieux à l’architecture impressionnante.

Installation à la Tour de la Chaîne

Installation à la Tour de la Chaîne

A la Tour, on peut également retrouver les étoiles symbolisées d’une façon différente : par des néons, grimpant le long d’un mur ou posés sur un filet de pêche. Une nouvelle fois, on peut y retrouver l’idée d’élévation, cette fois-ci manifestée directement par le placement des néons.

Dans chacun des deux lieux, une œuvre détonne néanmoins ; le tableau peint à l’aquarelle jaune teinté de rouge dans la Chapelle, et un autre représentant une fleur d’acanthe dans la Tour. Le premier nous saute au yeux par sa couleur vive ; il avait en fait était pris par hasard par François Réau, qui décida de la placer après s’être rendu compte que son jaune était de la même teinte que les inscriptions d’époque sur les caissons. Le second, par ses traits fins et nets, tranche avec le flou qui règne sur les tableaux qui l’entourent, et évoque l’architecture traditionnelle du monument qui l’accueille : la feuille d’Acanthe est la décoration des colonnes corinthiennes. Sa signification est également l’expression des sentiments du plasticien pour l’art : “rien ne pourra nous séparer”.

Cherchant toujours à mettre en lien son exposition et le lieu d’accueil, les deux espaces de visite présentent de nombreux éléments faisant référence à la tradition maritime et portuaire de la Rochelle, comme des cordages ou un filet de pêche, faisant office tantôt de décorations, tantôt d’œuvres.

Cette exposition nous propose un voyage au cœur de paysages laissés à notre imagination, teinté du poids du temps et de la mémoire, de sa détérioration.

médiation à la Chapelle des Dames Blanches

médiation à la Chapelle des Dames Blanches