"Mythologie et surréalisme" publié le 28/12/2012  - mis à jour le 18/12/2015

Le thème de la reprise dans les arts

« Mythologie et Surréalisme »

  • Niveau : classes de troisième
  • Disciplines conviées : français, langues vivantes, langues et cultures de l’antiquité, histoire, géographie, svt, chimie, technologie, arts plastiques, informatique
  • Référence au programme du collège : « Les arts, témoins de l’histoire du monde contemporain »

Ce synopsis, qui évoque la question de la reprise dans le répertoire artistique, effectue un voyage transversal à travers les siècles. Il affère aux programmes de 6ème et de 3ème et constitue une bonne révision des notions fondamentales pour le brevet des collèges.

  • Domaine : « Arts du visuel »
  • Thématique : « Arts, ruptures, continuités »
  • Objectifs  : Approcher Dalí et le Surréalisme par l’étude de deux Vénus calquées sur la fameuse Vénus de Milo.
  • Démarche : Nous assimilerons quelques notions de mythologie en se penchant notamment sur la Vénus de Milo. Nous aurons un aperçu de la géographie de la Grèce avant d’étudier un texte poétique de C.M.Leconte de Lisle. Nous travaillerons sur la biographie de Dalí en nous aidant d’une activité en langue sur sa biographie. Nous évoquerons les mouvements artistiques de son temps – de l’impressionnisme au surréalisme -. Nous étudierons 2 vénus de Dalí.
    Une vidéo de l’INA nous montrera l’excentricité du personnage et nous montrera la fameuse Vénus aux Tiroirs. Il s’agit aussi de découvrir les grands musées : le Louvre ; la Tate Modern de Londres ; le Musée du Prado et citer des chefs-d’œuvre qui sont conservés...

I - Le mythe et l’archéologie

A. Aphrodite alias Vénus

Aphrodite est la déesse de l’Amour et de la Séduction dans la mythologie grecque. Née dans un tourbillon marin là où étaient tombés le sang et les organes génitaux d’Ouranos, elle est l’épouse infidèle d’Héphaïstos le dieu du feu, maitre de la forge et du travail des métaux, et mère d’Héros et Antéros.
Dans le mythe de la pomme de la discorde, c’est elle qui sera choisie par Pâris, écartant Héra et Athéna. Il en découlera la guerre de Troie.
Aphrodite sera adoptée par les Romains sous le nom de Vénus

Activité lettres + arts plastiques
Répondre aux questions :
Qui est Ouranos ?
Racontez le jugement de Pâris.
Connaissez-vous l’expression « la pomme de la discorde » ?
Élaborez quelques phrases avec cette expression.


B La Vénus de Milo

Vénus de Milo

Vénus de Milo -
Source Wikipédia

1.Présentation

Aphrodite, dite « Vénus de Milo ». Sculpteur anonyme. Datation : 130-100 av. J.-C environ. Matériau : Marbre. Hauteur : 2,02 cm. Conservation : Musée du Louvre. Paris
La Vénus de Milo est découverte en avril 1820 à Mélos (ou Milos) dans l’archipel des Cyclades.
Les mesures principales de la statue sont les suivantes :

  • hauteur totale : 211 cm
  • largeur maximum : 36 cm
  • profondeur maximum : 64 cm
  • tour de poitrine : 121 cm
  • tour de taille : 97 cm
  • tour de hanches : 129 cm
  • Le poids est d’environ 1 000 kg soit 1 tonne environ.

2. Description : je dis ce que je vois.

La statue représente une femme plus grande que nature (hauteur sans la plinthe : 2,04 mètres), debout, en appui sur la jambe droite ; la jambe gauche est légèrement fléchie ; le pied (disparu) dépassant de la plinthe.
Le haut du corps est dénudé ; le bas est revêtu d’un himation roulé autour des hanches. Les bras sont manquants.
Les cheveux sont relevés en un chignon maintenu par un bandeau, dont s’échappent trois mèches tombant sur la nuque. Détails du bloc supérieur, partie droite : travail régulier de la section du bras, trous de fixation pour un bracelet métallique (disparu) et, en haut, à gauche du nombril, cavité rebouchée au plâtre (vraisemblablement pour l’étai qui soutenait le bras).

3. La technique des pièces rapportées.

La statue a été sculptée en marbre de Paros, un marbre de grain très fin, d’un blanc très pur et d’une grande transparence, extrait des carrières de l’île grecque de Paros dans les Cyclades.
La technique mise en œuvre est caractéristique des ateliers actifs à Rhodes et dans les Cyclades aux II ème et Ier siècles av. J.-C. : deux blocs sculptés à part : les jambes drapées et le buste nu, sont reliés par des scellements verticaux (avec gougeons). La jonction se fait au niveau de l’himation.
La déesse était parée de bijoux en métal dont ne subsistent que les trous de fixation : un bracelet, des boucles d’oreilles et un bandeau dans les cheveux. Une polychromie aujourd’hui disparue rehaussait peut-être le marbre.
Les seules restaurations sont celles de l’extrémité du nez, de la lèvre inférieure, du gros orteil du pied droit et de quelques raccords dans l’épaisseur de la draperie.

4. Le doute de l’interprétation : Les problématiques de l’archéologie

Les lacunes du marbre et l’absence d’attributs rendent difficiles la restitution générale de la statue et son identification. Aussi a-t-elle été imaginée dans les attitudes les plus variées.
Beaucoup s’accordent à y reconnaître une effigie d’Aphrodite, déesse de l’Amour
(Vénus est son nom latin) en raison de la semi-nudité de la figure, de la féminité de sa silhouette onduleuse et de la sensualité de ses formes. Elle tenait peut-être une pomme - allusion au jugement de Pâris -, une couronne, un miroir ou un bouclier dans lequel elle contemplait son reflet. Mais il pourrait s’agir aussi d’Amphitrite, déesse de la mer, vénérée dans l’île de Milo.

5. Une création hellénistique : héritage classique et innovations

Le style renoue avec des thèmes classiques tout en innovant.
Le sculpteur anonyme paraît en effet citer les modèles du IV ème siècle av. J.-C. : le visage, le goût des contours clairs. Toutefois, il multiplie les audaces : la composition hélicoïdale du corps s’ouvrant dans plusieurs directions divergentes, l’allongement du buste à la poitrine menue, comme le glissement du drapé très fouillé sur les hanches créant un splendide effet d’ombre et de lumière en contraste avec la luminosité de sa nudité, font de cette statue l’un des chefs-d’œuvre de la fin de l’époque hellénistique.

6. La fortune critique de l’œuvre

L’œuvre jouit immédiatement d’une grande notoriété, et sera une source inexorable d’inspiration dans l’histoire des arts : photographies, images publicitaires, remake…

Activité histoire/géographie

  • Recherche sur la Sublime Porte, sur l’identité de l’Ambassadeur
  • Recherche sur les les Cyclades, les Sporades
  • Travail de la localisation des îles de Milos et de Paros sur la carte de la Grèce.
    La Grèce et sa myriade d’îles (source Wikipédia)
  • Recherche sur la Vénus de Milo et la raison pour laquelle elle est en France ? [Le marquis de Rivière, ambassadeur de France auprès de la Sublime Porte en fait hommage à Louis XVIII, qui l’offre au Louvre l’année suivante (1821)].

Glossaire de l’art
Une sculpture en ronde bosse est une sculpture indépendante d’un mur et sculptée sur toutes ses faces.

Activité technologie
Expliquer le système de fixation par des gougeons.


C. Poème de Charles-Marie Leconte De Lisle (1818-1894)

Activité français + langues de l’antiquité.

Ce poème est extrait des « Poèmes Antiques » de 1852.
Pour gagner sa vie, Leconte de Lisle traduit des chefs d’œuvres de la littérature antique grecque. Sa passion est la poésie. Les Parnassiens reconnaissent en lui un maitre par la variété de son inspiration, la diversité des images et la perfection formelles de ses poèmes.


Vénus de Milo
Marbre sacré, vêtu de force et de génie,
Déesse irrésistible au port victorieux,
Pure comme un éclair et comme une harmonie,
O Vénus, ô beauté, blanche mère des Dieux !

Tu n’es pas Aphrodite, au bercement de l’onde,
Sur ta conque d’azur posant un pied neigeux,
Tandis qu’autour de toi, vision rose et blonde,
Volent les Rires d’or avec l’essaim des Jeux.

Tu n’es pas Kythérée, en ta pose assouplie,
Parfumant de baisers l’Adonis bienheureux,
Et n’ayant pour témoins sur le rameau qui plie
Que colombes d’albâtre et ramiers amoureux.

Et tu n’es pas la Muse aux lèvres éloquentes,
La pudique Vénus, ni la molle Astarté
Qui, le front couronné de roses et d’acanthes,
Sur un lit de lotos se meurt de volupté.

Non ! les Rires, les Jeux, les Grâces enlacées,
Rougissantes d’amour, ne t’accompagnent pas.
Ton cortège est formé d’étoiles cadencées,
Et les globes en chœur s’enchaînent sur tes pas.

Du bonheur impassible ô symbole adorable,
Calme comme la Mer en sa sérénité,
Nul sanglot n’a brisé ton sein inaltérable,
Jamais les pleurs humains n’ont terni ta beauté.

Salut ! A ton aspect le cœur se précipite.
Un flot marmoréen inonde tes pieds blancs ;
Tu marches, fière et nue, et le monde palpite,
Et le monde est à toi, Déesse aux larges flancs !

Iles, séjour des Dieux ! Hellas, mère sacrée !
Oh ! que ne suis-je né dans le saint Archipel,
Aux siècles glorieux où la Terre inspirée
Voyait le Ciel descendre à son premier appel !

Si mon berceau, flottant sur la Thétis antique,
Ne fut point caressé de son tiède cristal ;
Si je n’ai point prié sous le fronton attique,
Beauté victorieuse, à ton autel natal ;

Allume dans mon sein la sublime étincelle,
N’enferme point ma gloire au tombeau soucieux ;
Et fais que ma pensée en rythmes d’or ruisselle,
Comme un divin métal au moule harmonieux.

Activité langues de l’antiquité.
Explication du poème.

  • Qui sont tous les personnages évoqués : Kythérée, Adonis, Astarté ?
  • Qu’est-ce qu’Hellas ? Thétis ? Quel est le saint archipel ?
  • Dire ce qu’évoquent les connotations : fronton attique, déesse victorieuse, acanthes, les Grâces enlacées, divin métal au moule harmonieux.
  • Quelle est donc cette beauté pour l’auteur ? Est-ce un poème d’actualité ?


II. Les élucubrations surréalistes de Salvador Dalí

A. L’artiste (1904-1989)

Dali et son ocelot

Dali et son ocelot
Source Wikipédia

Salvador Dali
Source possible pour voir et savoir beaucoup sur Dalí (œuvres, corpus photographique et filmique, archives, etc.)

Salvador Dalí (1904-1989) est un artiste unique. Même s’il a fréquenté le groupe constitué en 1924 autour d’André Breton, qualifié par un critique de « Surréaliste », et défini par un manifeste…, Dalí s’est toujours projeté loin en avant. Il s’est essayé avec brio à tous les styles picturaux de son temps (impressionnisme, pointillisme, futurisme, cubisme, fauvisme) et a continué à nous surprendre infiniment.

Il n’y a pas de recettes pour décrypter les œuvres de Dalí. C’est en regardant attentivement l’ensemble de ses réalisations que l’on pourra appréhender un certain vocabulaire iconographique récurrent, qui n’est que sien.

Activité arts :
Relevez des représentants de ces mouvements artistiques et présentez une œuvre au moins pour chacun d’eux.

Poursuite possible / Activité langues vivantes.
Interaction sur la biographie de Dalí

Modalités de travail proposé :
Constituer des groupes. Un groupe pose des questions à un autre groupe. Compter le nombre de bonnes réponses par groupe.
Quels sont les artistes espagnols contemporains de Dalí ? Dalí les a-t-il connus ?

B. Dalí est l’homme d’une énième renaissance

  • 1. C’est un artiste pluriel curieux de tout
    Pour Dali, l’art ne se limite pas aux arts plastiques ou à l’écriture, il doit envahir la vie et se mêler de tout. C’est un art de vivre ; sa créativité étant extrêmement féconde, Dali a des fulgurations à tout moment. Son art déborde du cadre classique de l’art. Il étend son champ d’investigation à tous les domaines de la création : design de vêtements et accessoires de mode (pour Elsa Schiaparelli et Coco Chanel), architecture intérieure meubles et objets, décors de théâtres, scénographies pour ballets (Metropolitan Opera. NYC), agencements de vitrines de grands magasins, design publicitaire (Vogue, « Harper’s Bazar », « Town and Country ».
  • 2. Sa peinture est minutieuse, d’une très grande précision
  • 3. Il est passionné par la photographie.
    Il accroche des photos d’étude de détails comme des papillons à ses cadres et il peint des images minutieusement précises et hyperréalistes, presque photographiques. Il a une prédilection pour les tableaux de dimensions 3 x 4m.
  • 4. Passionné par l’image et donc le cinéma, il réalise deux films avec Luis Buñuel.
    Son intention est de « Matérialiser avec la plus impérialiste rage de précision les images de l’irrationalité concrète, qui provisoirement ne sont pas explicables ni réductibles par les systèmes de l’intuition logique, ni par les mécanismes rationnels. »
  • 5. Il exulte dans la sculpture en modelant la troisième dimension.
    Depuis ses premiers tableaux, Dali traite tout avec le même souci du modelé, de la valeur, des angles et des courbes qu’il use en sculpture, signifiant bien que son travail va au-delà de toutes les qualifications du genre. Son œuvre sculpté est bien plus qu’un intermezzo parmi son œuvre pictural ou graphique. « Je suis beaucoup plus important comme génie cosmique que comme peintre, mon délire et ma lucidité ont beaucoup plus d’importance que ma peinture » souligne-t-il, pour lequel les grandes découvertes de la peinture passent d’abord par la troisième dimension.
  • 6. Il travaille tous les matériaux
    Avant d’en arriver au bronze, Dali a, dès sa jeunesse, travaillé tous les matériaux. Des plus naturels aux plus sophistiqués, y compris le plastique et le plexiglas. Dans le verre, il fera décliner la plupart de ses œuvres fétiches, en petit format, y trouvant, outre des couleurs profondes et chaudes, un rayonnement et une luminosité exceptionnelles. En outre, il a utilisé les plaques de cuivre comme graveur et assemblé le fer et le métal dans des sculptures-objets composites, souvent mélangés à des aliments tels que les œufs, le chocolat ou les homards, pour en générer des objets les plus insolites. (tables, divans, chaussures, téléphones)

C. La psychanalyse au service du Surréalisme

Dalí évoque souvent Sigmund Freud, le père de la psychanalyse (voir plus bas, vidéo INA 1964).
Le Surréalisme recherche de nouvelles formes d’expressions.
Les thèmes sont : l’irréel, l’inconscient, le fantastique, l’onirique (le monde des rêves), voire la folie. Le surréalisme en peinture, c’est l’intégration de pensées philosophique à la création graphique. Ce sont, pour la plupart, des peintures très abstraites et symboliques. Voici quelques artistes de ce courant : Max Ernst, Jean Arp, Miró, Tanguy, Magritte, Picabia, Masson, ou encore Man Ray.
Le surréalisme n’est pas seulement une orientation esthétique qui s’attache à tout ce qui jaillit de l’esprit, sans contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique et morale. C’est la recherche d’une expression de l’étrange dans sa banalité, où l’objet devient l’outil de premier plan, car il apporte un résidu irrationnel bien déterminé, et peut devenir porteur de rêve, du moment où l’humour, l’absurde, l’insolite en font un support de fétichisme.

Piste en chimie.
Connaitre les matériaux : marbre, bronze, cuivre, fer, verre, plastique et plexiglas.


III. « Je suis fou… » de la Vénus de Milo

A. Les reformulations de Dalí

1. La Vénus spatiale

Vénus spatiale

Reproduction de La Vénus Spatiale (1977) de Dalí,
installée devant la Tate Modern de Londres.
Fond de l’auteure

La Tate Modern : un musée à connaitre.
Piste en Arts Plastiques.
Citez des œuvres connues exposées dans ce musée. (Ex. Boccioni, Louise Bourgeois…)

La Vénus spatiale (1977-1984) : Dalí a une excellente connaissance de l’art antique et de celui de la Renaissance (il se réfère souvent à Michel-Ange ou Raphael). Il a en outre fréquenté l’Académie des Beaux Arts de Madrid. Il a admiré Velázquez au Musée du Prado.
Vénus, déesse de la Beauté semble avoir été la première femme admirée et modelée par Dalí enfant. Cette sculpture illustre bien le processus dalinien de reprise d’un modèle : le buste de la déesse, pour lui ajouter ses propres symboles, ce qui a pour effet de corrompre la signification initiale de la sculpture. Il scinde toutefois le buste en deux, décalant les deux blocs, exactement au niveau de la césure antique placée sous le bourrelet de l’himation.
La montre molle posée sur le cou de Venus peut nous délivrer deux messages : la beauté de la chair est éphémère et la beauté de l’art, elle, est éternelle. Les montres molles sont chères à Dalí.
L’œuf est un objet que Dalí affectionnait pour le contraste de texture qui le caractérisait : pour la dureté de sa coquille et la mollesse de sa matière interne. (Sa théorie du dur et du mou ; la beauté comestible).
Ici, il est placé à l’endroit où devrait se trouver normalement l’utérus, symbolisant ainsi la renaissance et l’ultime renouveau.
Enfin, les fourmis symbolisent chez Dali l’anéantissement et la destruction. Elles sont présentes ici pour nous rappeler le caractère périssable de l’être Humain.
(La référence à la fugacité des choses nous ramène aux vanités, et bien avant encore, à la philosophie du Carpe Diem).

B. Les arcanes d’un mythe

1. Documents vidéos à visionner

Consignes possibles :
Comment Dalí fait-il voyager son œuvre d’art ?
D’où Dalí est-il originaire ? Pourquoi est-il attaché à Perpignan ?
L’œuvre doit être exposée à Tokyo, en 1964, en même temps que la Vénus de Milo du Louvre. Quelles sont les expectatives du peintre ?
Quelle procédure adopte-t-on aujourd’hui pour réaliser une installation dans une exposition ?
Quels termes liés à la nourriture utilise Dalí ?
A quoi la mouche emprisonnée dans une matière fait-elle penser ?

2. La Vénus aux tiroirs. Dalí. (1936-1964)

La Vénus de Milo aux tiroirs

Document n° 3 : « Vénus de Milo aux Tiroirs » Salvador Dalí -1936- bronze peint. Ajouts de pompons en place des boutons de tiroirs.
98 x 32,5 x34 cm. Rotterdam. Museum Boysmans van Beuningen
(N.B- différentes versions existent de cette statue : en plâtre, en bronze, avec pompons…)

La Vénus aux tiroirs. Dalí. (1936-1964)

En 1936, Dali transforme une reproduction en plâtre de la célèbre sculpture grecque, la Vénus de Milo, en l’ouvrant par le biais de 6 tiroirs situés : 1 sur le front, 4 sur le buste et 1 sur le genou gauche.

Vêtue du seul drapé consacré traditionnellement à Aphrodite, dénuée de bras, elle présente mêmes torsion, déhanché, position de la jambe genou fléchi, même coiffure.
Le remake  :
Les personnages à tiroirs font partie de l’iconographie de Dali, ils reviennent souvent dans ses dessins, sa peinture, mais ici c’est à la sculpture classique qu’il applique son motif. Dans la symbolique freudienne les tiroirs correspondent aux profondeurs du psychisme et Dali, qui vénérait le père de la psychanalyse, suit cette conception.
Réunir dans une œuvre d’art la Grèce antique et la psychanalyse signifie pour l’artiste dépasser les codes de la beauté idéale, pour accéder à la vérité d’un corps travaillé par l’inconscient, avec ses zones d’ombre et ses parties cachées. (les choses refoulées, interdites par des codes) - (En ce sens, son allusion au christianisme dans l’interview est très intéressante. Dalí est profondément mystique)
Seule la psychanalyse peut, pour Dali, ouvrir ces tiroirs. En s’attachant à ce modèle canonique de l’art occidental, Dali est au cœur de l’esthétique de la profanation si chère aux surréalistes.
Lorsque Dali évoque son travail de réactualisation pour sa fameuse Vénus de Milo aux tiroirs, il le fait en ces termes : " J’invente la Vénus de Milo aux tiroirs et le cabinet anthropomorphique " soulignant par là qu’au-delà du sculpteur, Dali en appelle à une vision paranoïa-critique de l’art.
Dès lors il va multiplier toutes les interprétations de l’icône antique pour une sculpture réinventée par le filtre de son propre surréalisme. Dali dit « Avec les tiroirs, il est désormais possible de regarder l’âme de la Vénus de Milo à travers son corps » Pour Dali, les tiroirs représentent les pensées cachées et l’inconscient des gens.
Théoricien de l’art convaincu de la justesse de ses affirmations, Dali se positionne face aux artistes de son temps et développe ses places fortes dans un texte fondamental " La conquête de l’irrationnel " où seules quatre personnalités du mouvement surréaliste lui servent de référence pour illustrer « les nouvelles images délirantes de l’irrationalité concrète » : Eluard, Breton, Magritte et Picasso.