Bulle d’écoute : un dispositif pour retrouver l’estime de soi et la motivation publié le 07/06/2022

A l’origine du projet

Présentation par Mme Christie -Principale du Collège

" Le collège Norbert Casteret est un établissement de 620 élèves, qui accueille une population de CSP plutôt favorisées. Les résultats sont bons, les projets nombreux mais la taille de l’établissement fait que les professeurs faisaient souvent le constat qu’il y avait besoin de temps d’échanges avec les élèves qui exprimaient une difficulté d’apprentissage, dans la gestion de leur stress ou qui étaient confrontés à des difficultés méthodologiques. Le dispositif Bulle d’écoute a permis de se donner les moyens d’échanger sereinement. Le constat a été fait qu’il suffisait souvent d’une heure, en entretien individuel pour débloquer les situations".

Carte mentale créée à partir du travail réalisé par M Laurent Boutier
(professeur d’espagnol intervenant dans le dispositif « Bulles d’écoute »).

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Carte mentale créée à partir du travail réalisé par M Laurent Boutier (professeur d’espagnol intervenant dans le dispositif « Bulles d’écoute »).

L’environnement du projet

L’idée de ce dispositif est née du constat fait par des enseignants qu’il y avait de plus en plus d’élèves en souffrance ou en difficulté, momentanément ou de façon récurrente, élèves qui avaient besoin ponctuellement de voir un professeur seul pour résoudre une problématique et que des enseignants avaient l’envie et la capacité de le faire.
4 enseignants (Lettres Modernes, Langues Vivantes : anglais et espagnol) avaient été formés à l’entretien d’explicitation niveau 2 avec les formateurs Philippe Peaud et Annette Meunier Rivet (entretien qui vise une description aussi fine que possible d’une activité passée, réalisée par une personne en situation de pratique professionnelle ou engagée dans la réalisation d’une tâche), et ces professeurs ont suivi cette année le stage Apprenance avec Virginie Roche (appropriation de consignes dans la démarche d’apprentissage). Ces enseignants avaient les compétences pour amener ces élèves à trouver des solutions et souhaitaient les mettre à profit au service de tous les élèves de l’établissement en général.
Ce projet concerne 23 classes de la 6ème à la 3ème (622 élèves au total).
Le terme de «  Bulle » fait référence à une parenthèse, un temps de discussion en toute confiance qui permet à l’élève de trouver des pistes de solutions à ses difficultés pour ensuite aller de l’avant. Ce dispositif a été inscrit dans le projet de l’établissement afin de lui donner de la visibilité et de le poser dans un cadre et un lieu (un espace de discussion).

Objectifs et mise en œuvre du projet

Objectifs principaux

L’objectif du dispositif est de prendre en charge rapidement un élève qui serait repéré par une équipe enseignante, un professeur principal ou la cellule de veille pour des problématiques d’apprentissage afin de lever les obstacles par un entretien individualisé sur 1, 2 ou 3 séances d’une heure.

Ce temps réservé, dans la salle de classe du professeur, permet de répondre rapidement aux besoins afin de gagner en efficacité par une réponse rapide. Le fait de privilégier la salle de classe du professeur permet d’avoir toujours un espace disponible quand plusieurs demandes ont lieu en même temps.

Modalités de la mise en œuvre

Le dispositif a été lancé à la rentrée 2021. La présentation a été faite à tous les personnels à la rentrée 2020 avec un document d’identification, de repérage et de demande accessible à chaque adulte du collège. Ce document est ensuite traité par le professeur coordonnateur (Mme Maguy Peyront, professeur de Lettres Modernes) qui répartit les demandes auprès des professeurs impliqués afin que l’élève soit pris en charge dans les meilleurs délais. La disponibilité des adultes a une incidence sur la rapidité de la prise en charge, mais selon la problématique identifiée, le professeur intervenant est également choisi.
Un membre de l’équipe éducative détecte un élève en souffrance ou en difficulté, il le signale à l’équipe des adultes porteurs du projet (référents Bulle d’écoute) ; ensuite un rendez-vous est pris avec l’élève en accord avec ce dernier et sa famille sur un créneau identifié et prévu pour le dispositif dans l’emploi du temps des professeurs référents.

En effet le dispositif repose sur :

• l’acceptation de l’enfant et de sa famille. Un accord de principe est demandé aux parents via un imprimé ad hoc en début d’année. Toute non réponse implique accord. L’accord de l’élève est sollicité lorsque celui-ci est identifié par un adulte comme susceptible d’intégrer le dispositif qui lui serait bénéfique,

• la confidentialité (n’est diffusé que ce que l’élève autorise),

• la possibilité d’un second temps, une seconde bulle,

• une évolution vers du tutorat si cela semble pertinent.

Pour la 1ère année, les demandes émanaient des professeurs principaux, de la direction suite à des incidents ou des commissions éducatives par exemple ou bien de la vie scolaire
Pour la 1ere année d’expérimentation, ce sont 21 bulles qui ont éclos sur les 4 niveaux.

Un exemple de déroulé type d’un rendez-vous Bulle d’écoute

1. Explication à l’élève du dispositif par l’adulte (référent Bulle) : confidentialité, bienveillance, absence d’enjeu ;
2. Formulation des besoins par l’élève ;
   L’adulte, qui connaît ou pas l’élève, vérifie avoir bien compris la demande de l’élève
3. Observations des procédures de l’élève à travers des activités concrètes
4. Construction d’outils possibles en partenariat avec l’élève ;
5. Proposition d’un deuxième rendez-vous.

En ce qui concerne les élèves
Il s’agit d’élèves…

• Volontaires pour le dispositif ;
• Capables de verbaliser ;
• Qui font des efforts mais n’y arrivent pas ;
• Qui ont des difficultés récurrentes ;
• Dont les professeurs ne comprennent pas le fonctionnement.

Les effets du projet, les premiers bilans

Bilan côté élèves

Un questionnaire de satisfaction a été diffusé en fin d’année pour recueillir l’avis des élèves. Ce questionnaire, anonyme, a montré qu’à 89 % les élèves étaient satisfaits du dispositif, et à 11 % moyennement satisfaits. Aucun n’était pas satisfait.
D’après ce questionnaire, les élèves ont apprécié pouvoir donner leur avis, pouvoir s’exprimer. Cela les a aidés à remonter leur moyenne, à éclaircir les choses, à faire des fiches de révision, à évoluer dans les matières où ils rencontraient des difficultés, à trouver des méthodes d’apprentissage, à mieux s’organiser. Outre ces améliorations méthodologiques, l’aide apportée en Bulle les a aidés dans la gestion de leur stress, dans la confiance en soi ou en l’adulte quand il y avait un blocage avec un enseignant.

Ainsi, il ressort que 47 % d’entre eux ont évolué dans leur organisation personnelle, que 41 % ont progressé dans la compréhension des consignes, que pour 58 % les bénéfices ont été visibles dans les méthodes d’apprentissage, et pour 11 % c’est l’estime d’eux-mêmes qui a été travaillée.
Le créneau proposé leur a largement convenu (créneau inscrit à leur emploi du temps mais qui correspond à un moment où l’adulte est disponible).

Un second rendez-vous voire un suivi a été plébiscité par les élèves ce qui a conduit les porteurs du projet à clore désormais systématiquement l’entretien Bulle par la proposition d’un second rendez-vous.

Côté équipes d’enseignants

Les équipes enseignantes ont observé que les élèves pris en charge dans le cadre d’une bulle avaient effectivement évolué ensuite. Cela est particulièrement visible lorsque les professeurs ont dans leur classe les élèves Bulle.
Du côté des professeurs Bulle, il ressort que leur perception du rendez-vous est parfois tronquée puisque la satisfaction des élèves est réelle même quand l’adulte pensait ne pas avoir été très performant au cours de la séance.
Le bénéfice est évident. D’une part parce qu’il est toujours utile de mettre des mots sur les difficultés, car l’élève en fait toujours quelque chose -qui, à un moment donné, le fait bouger dans ses pratiques. Le simple fait de recevoir, écouter, donner un temps d’expression sans jugement leur permet d’avancer.

La plupart des élèves reçus ont le sentiment de « ne pas être comme les autres  », voire « inadaptés » au système scolaire. Mettre en lumière leurs atouts et leur rappeler qu’ils ont leur place dans la société permet d’améliorer l’estime de soi.

Des exemples pour éclairer ce constat :

• Elève qui apporte « sur un plateau » la solution de sa réussite, mais n’ose pas le dire à ses profs.
• Elève qui découvre avec l’adulte sa procédure de réussite.
• Elève qui a une procédure très compliquée : l’adulte opère des choix avec lui afin de gérer la fatigabilité et rappelle que ce n’est pas une tare.
• Elève qui manque d’organisation, d’anticipation.
• Elève qui comprend que son problème n’est pas dans ses apprentissages propres mais dans la formulation des consignes qui crée un blocage, à lever avec une meilleure explicitation.
• Elève qui prend confiance en son professeur principal et se confie sur son orientation.

Quelques points de fragilité du dispositif

A côté de ces aspects positifs du dispositif ou de sa mise en œuvre, plusieurs points de fragilité sont à noter au terme de la 1ère année de fonctionnement :

• La difficulté voire l’incapacité à recevoir rapidement un élève en raison de motifs divers : réunions, fatigue, professeur principal trop pris, etc. La Bulle est un espace-temps qui demande une entière disponibilité au service de l’élève, et donc une énergie particulière au niveau de la concentration.

• L’hyper sollicitation de la personne demandeuse (type « Alors, tu n’as toujours pas reçu tel élève ? »).

• La difficulté à trouver un temps de réunion entre adultes pour savoir quelles décisions prendre, quel retour faire (solution envisagée : visio conférences en soirée pour ne pas tarder à prendre les décisions et faire un retour plus rapide aux demandeurs et professeurs principaux).

• Le petit nombre d’adultes ressource. Il apparaît important et nécessaire de former d’autres personnels pour les intégrer au dispositif.

• Il est possible de passer « à côté » d’un élève qui a des difficultés qui sembleraient surmontables alors qu’un spécialiste (neuro-psychoogue) détecterait des troubles neurologiques avérés. Le besoin d’une formation de détection, d’identification des troubles est apparu.

• Il est important de respecter l’accord de l’élève et de ne pas insister en cas de refus. En effet, pour une situation, la Bulle faite à la demande insistante de la famille mais sans adhésion de l’élève est vouée à l’échec.

• Le retour fait à l’adulte peut déplaire car il implique parfois une invitation pour les professeurs à changer leurs pratiques. Cela marque la limite du champ d’action de l’adulte bulle qui ne peut obliger son collègue à changer son fonctionnement

Des pistes afin d’améliorer la prise en charge

Les entretiens devraient avoir lieu dans une salle vitrée, avec une table ronde et équipée d’un ordinateur pour accéder par exemple à PRONOTE ou à internet. La piste de la pièce contiguë au bureau actuel de la CPE est envisagée quand le dit bureau sera rapproché de la vie scolaire.

Il est important de recruter des personnels et de leur proposer une formation plutôt que d’informer du besoin de formation. Les animateurs Bulle pensent qu’une sorte de pré-sélection doit pouvoir s’opérer pour réfléchir avec les candidats potentiels à leur adéquation avec les attendus et les modalités du dispositif. La pluralité des ressources (enseignants, AESH) est importante.

Pour la rentrée 2021, des moyens ont été alloués dans l’enveloppe de la DHG. Des formations complémentaires ont été proposées. Le professeur coordonnateur centralise les demandes, évalue les besoins et oriente éventuellement vers un tutorat si besoin.

Nouveauté 2021-2022 :

• Mise en commun des HSE Bulle et Tutorat pour répartir au mieux selon les besoins identifiés et organisation de réunions régulières en ce sens avec la Direction.

• Liaison plus étroite avec la cellule de veille, cela permet d’être plus attentifs et de signaler plus rapidement certains élèves à la cellule de veille.