Différencier, en temps "normal" et en période de confinement - Volet 1/3 publié le 13/05/2020  - mis à jour le 18/05/2020

Un dossier en 3 volets sur la différenciation pédagogique en anglais en collège et en lycée.

Le présent dossier est proposé en réponse à la fréquente demande de pistes pour la prise en compte de l’hétérogénéité des profils et besoins des élèves.
Composé de trois volets (un propos général sur les enjeux de la différenciation + une présentation synthétique des pistes de travail à explorer pour commencer, un exemple fourni par un professeur d’anglais pour le collège ensuite et un exemple pour le lycée pour finir), sa publication couvre, pour des raisons de lisibilité, trois articles distincts.
Celui-ci correspond au premier volet. Vous trouverez les autres ci-dessous :
 Deuxième volet : un exemple pour le collège ;
 Troisième volet : un exemple pour le lycée

Nous remercions les enseignants qui ont bien voulu communiquer leur travail ainsi que les collègues qui ont accepté de faire une relecture critique des documents, tout particulièrement Mme Lalanne et M. Renaud, formateurs d’un stage sur la prise en compte de l’hétérogénéité en cours d’anglais.

Le dossier complet est téléchargeable au bas de l’article

Qu’est-ce que différencier ? Pourquoi différencier ? En temps normal ? Pendant le confinement ?

Il existe de nombreuses définitions de la différenciation pédagogique et notre objet n’est pas ici de les commenter. Nous retiendrons simplement le propos de Philippe Meirieu, selon lequel il s’agit d’ « introduire des chemins adaptés aux besoins, aux profils, aux types de rapport au savoir, aux motivations des élèves pour que, par des itinéraires différents, tous puissent s’approprier les mêmes savoirs1. »

Le contexte du confinement que nous venons de vivre et continuons en partie à vivre actuellement, parce qu’il déconstruit la classe traditionnelle conçue comme un collectif, a contraint les enseignants à porter un regard différent sur les élèves. Ils ont dû en particulier tenir compte de contextes d’apprentissage très divers (possibilité de connexion sur un smartphone, sur un ordinateur personnel ou familial, accès limité aux supports papier, accompagnement par les parents ou travail solitaire, disponibilité pour l’apprentissage ou empêchement par l’agitation du voisinage, etc.). La variabilité des conditions d’apprentissage à la maison n’est pas apparue avec la situation de confinement mais ces éléments prennent une dimension bien plus importante lorsqu’il n’est plus possible d’agir dans la classe et que les élèves sont isolés. Ceci s’ajoute aux différences de profils déjà connues des professeurs2, à la diversité des rythmes, l’hétérogénéité des niveaux de maîtrise des activités langagières, de la maîtrise des « bases » grammaticales, du bagage lexical, de l’intérêt pour l’anglais…

Même si la mise en place de « classes virtuelles » permet de réunir ponctuellement le « groupe-classe », celui-ci apparaît plus que jamais constitué d’individualités qu’il est impératif d’appréhender comme telles sans renoncer au projet collectif que cadre le programme et ce, bien sûr, dans la limite du faisable au vu des conditions dans lesquelles chaque enseignant travaille.

La différenciation pédagogique prend tout son sens dans ce contexte. Il s’agit d’éviter de perdre des élèves (découragés par un excès de sollicitations ou au contraire manquant de stimulation), de répondre au défi posé par les élèves à besoins éducatifs particuliers3, et ainsi tout simplement de garantir la continuité pédagogique pour tous.

Si le propos tenu et les préconisations faites ici ne sont pas spécifiques à la situation du confinement, ils nous semblent devoir y avoir une résonance particulière. Encore une fois, il n’est pas question d’ajouter à la charge des enseignants, déjà particulièrement lourde, mais de fournir des pistes de réflexion et, pour ceux qui pourront les mettre en œuvre (dès maintenant ou plus tard), quelques éléments d’accompagnement ou de guidage.

Pourquoi différencier pendant le confinement ?

  • Pour tenir compte des contextes (aide familiale, accès aux outils numériques, conditions matérielles, psychologiques…).
  • Pour entretenir la motivation, éviter le découragement et le décrochage.
  • Pour témoigner son intérêt à chacun, reconnaître son individualité et la valoriser (estime de soi…).
  • Pour répondre aux besoins de chacun (profils d’apprentissage, points d’appui, difficultés, besoins…).
  • Pour favoriser l’acquisition de l’autonomie en invitant chacun à « piloter » son propre apprentissage.
  • Pour tenir compte de la variété des projets de poursuite d’étude (élèves de troisième, élèves de terminale).

Quand différencier ?

La différenciation est une préoccupation de l’enseignant à chaque étape du cours, de la préparation de la séquence à sa conclusion en passant par le / les temps d’évaluation.
Le schéma ci-dessous en présente de façon très synthétisée les 4 temps forts :

Les 4 temps de la différenciation pédagogique - SLT (PDF de 112.6 ko)

Académie de Poitiers - Mai 2020.

Comment différencier ?

En temps normal et au retour du confinement, au moment de prendre en compte des écarts creusés par la situation…

Inventaire (non exhaustif4) des objets de la différenciation, par champs d’action :

Les leviers de la différenciation pédagogique - SLT

Présentation synthétique des leviers de la différenciation pédagogique

Différenciation pédagogique - SLT (PDF de 296.6 ko)

Académie de Poitiers - Mai 2020.

Et pendant le confinement ou en situation de télétravail ?

La majorité des leviers reste mobilisable, hormis ceux qui font appel à des personnes extérieures (AESH et AVS, assistant d’anglais…) ou au travail en « îlots ».
Par certains aspects, la contrainte du travail à distance peut même fournir un contexte véritablement favorable à la différenciation.

  • Le travail en binômes ou en groupes est envisageable sous certaines conditions si les élèves disposent d’outils numériques et de connexions internet, grâce aux espaces collaboratifs et espaces de partage, ENT, murs (type Padlet), « drives » et outils de traitement de texte collaboratif type Framapad, TitanPad sur lesquels la rédaction progresse par l’intégration des diverses contributions.
  • De même, la classe virtuelle peut intégrer des temps d’échanges et de collaboration entre élèves ou même se concevoir comme un facilitateur de différenciation en offrant la possibilité de créer des « salles de travail » différentes entre lesquelles les élèves peuvent être répartis pour travailler avec des consignes propres à chaque groupe.
  • L’enseignant peut également choisir de regrouper pour une classe virtuelle seulement certains élèves sur une plage horaire donnée pendant que les autres ont à réaliser des exercices, activités, tâches ne nécessitant pas de voir, écouter, échanger directement avec le professeur.

Attention : différencier ne doit conduire ni à exclure ni à « ghettoïser ». Il ne s’agit pas de créer des sous-groupes constitués uniquement d’élèves en difficulté ou à besoins éducatifs particuliers pour lesquels on diminuerait les exigences ou on mettrait de côté certaines compétences. La constitution de groupes à effectifs réduits, en classe virtuelle comme dans la classe physique du collège ou du lycée, peut faciliter le travail collaboratif entre élèves de profils et niveaux de maîtrise des contenus différents mais dont l’enseignant a des raisons de penser qu’ils pourront s’entraider. Comme toujours en la matière, il convient de rassembler des élèves ayant suffisamment de points communs pour motiver la collaboration et des différences suffisamment importantes pour donner sens à l’échange.

  • La diversité des rythmes d’apprentissage peut être plus aisément prise en compte dès lors que l’enseignement fixe des échéances déconnectées de la variable « heure de cours ». Alors qu’il peut être difficile de tenir compte en classe à la fois du besoin de temps long pour certains élèves « lents » et du besoin de nourrir (voire « occuper ») les plus rapides une fois qu’ils ont terminé une activité, l’enseignant en télétravail peut, dans les consignes, conseiller à titre indicatif un temps de réalisation inscrit dans une fourchette plus large (« l’activité n° 2 devrait prendre entre 5 et 15 minutes »…) ou même envoyer des préconisations différentes selon les profils et rythmes.
  • D’une manière générale, le professeur peut personnaliser les consignes sans qu’aucun élève ne se sente stigmatisé puisque chacun n’aura connaissance que de celles qui lui auront été données.

Pour aller plus loin :
La littérature sur le sujet est extrêmement riche et bien diffusée. Il serait impossible de fournir ici une bibliographie et sitographie exhaustive. Nous nous contenterons donc d’inviter à la consultation du très précieux dossier issu de la réunion de la conférence du CNESCO de 2017.

(2) Cf. les références connues aux postulats de Burns, à la théorie de la gestion mentale de La Garanderie, aux intelligences multiples d’H. Gardner, etc. En dépit des controverses, il y a bien là matière à nourrir la réflexion.

(4) Nous ne détaillerons pas ici, en particulier, ce qui concerne les temps et modalités de « feedback » (à faire le plus tôt possible, le cas échéant avec des démarches autocorrectives telles qu’en permettent diverses applications) et surtout d’évaluation.

Document joint

Académie de Poitiers - Mai 2020.