Des pâtes pour comprendre l'expression des gènes publié le 12/09/2019

Thème : corps humain et santé / expression du patrimoine génétique / enseignement de spécialité en première.

Pages : 123

Analyse de pratique

Les élèves ont déjà travaillé sur la réplication de l’ADN lors d’un précédent TP (expérience de Meselson et Stahl), en raisonnant également sur des mini pâtes pennes de deux couleurs (nucléotides avec ou sans thymine radioactive). Le fait de ressortir ce type de matériel ne les surprend donc pas.

L’activité "bonus" : les mutations de l’ADN

Certains élèves fonctionnent plus rapidement, ces derniers parviennent à la dernière étape non décrite dans la fiche d’activité. Il s’agit de simuler une mutation. Quand la protéine est terminée, les élèves l’apportent au bureau, une étiquette avec leurs noms identifie leur peptide. Les lettres signalant les acides aminés sont inscrites sur les pâtes (nomenclature anglo-saxonne). Conformément aux consignes, ils ont normalement noté toutes les séquences primaires obtenues au fil des manipulations sur un compte rendu, de l’ADN codant au peptide final. Ce travail est vérifié par l’enseignant puis :

  • Les élèves lancent deux dés, le score donne l’emplacement de la mutation sur la séquence d’ADN initiale.
  • Un deuxième lancé, avec un dé sur lequel on a collé des gommettes permet de "décider" de la mutation qui survient.

Le code couleur utilisé sur le dé déterminant la mutation à effectuer est identique à celui utilisé pour les pâtes (A = bleu, T = vert, C = rouge, G = jaune). Puisqu’il y a 6 faces, on ajoute deux gommettes blanches : une avec une croix (qui double le nucléotide concerné, A devient AA, etc...) et une sans aucune inscription (qui simule une délétion).

Les élèves recommencent leur synthèse avec le nouveau brin muté, mais sur le papier cette fois. Dans le cours suivant, leurs résultats permettent d’illustrer les conséquences sur le peptide des différents types de mutation (hasard = jeu de dé). On espère bien entendu avoir quelques gommettes blanches sur le deuxième lancé (dé modifié avec gommettes) afin d’avoir des décalages du cadre de lecture.

Détails sur la mise en œuvre

La première étape, volontairement non détaillée dans la consigne, est là pour vérifier que la complémentarité des bases et la structure en double brin de la molécule d’ADN a bien été comprise. En effet, le matériel génétique sur lequel "Paul" doit travailler est le brin complémentaire de la séquence donnée à l’élève. Il leur faut donc, pour "démarrer", reconstituer le brin codant. La plupart des groupes bloquent à ce niveau.

Une fois le brin codant validé, la deuxième erreur très fréquente est le remplacement direct de T par U, mais sur le brin codant, sans appliquer la complémentarité des bases, ce qui donne une séquence fausse.

Les deux obstacles précédents franchis, la suite des manipulations se passe plutôt bien. Après plusieurs tentatives infructueuses, il est préférable de ne plus leur demander d’enfiler les pâtes sur le fil de laine et de les placer directement, alignées correctement, sur leur table. Quand une erreur s’est glissée au milieu du collier de pâtes, ils le refont sans rechigner une première fois, mais pas une deuxième...

Ils ont tendance à détruire au fur et à mesure les séquences validées par le professeur, il est préférable de leur demander de les conserver (sous forme de colliers de pâtes), bien visibles sur leur paillasses.

On pourrait croire que la validation visuelle de toutes les étapes, pour chaque binôme n’est pas gérable. Avec le code couleur des pâtes, quand le début et la fin de la séquences sont corrects, le reste l’est également aussi, la vérification se fait rapidement sans trop de difficulté. En outre, les 9 séquences d’ADN proposées diffèrent, mais elle ne produisent que 5 protéines, ce qui facilite la correction (protéine n°1 = protéine n°3 ; voir la correction de l’activité).

L’anecdote que vous constaterez peut-être si vous réalisez cette activité, c’est de retrouver dans l’évaluation sommative du chapitre, Paul ou Roby à la place de l’ARN polymérase ou du ribosome. Les pseudonymes "bizarres" n’éveillent pas vraiment leur curiosité durant le TP... Par contre, repérer les éclairs de lucidités de certains qui font le rapprochement entre le nom des enzymes et les personnages du TP, apporte c’est vrai, une certaine satisfaction, qui était d’ailleurs recherchée.
On espère ensuite que les erreurs de manipulation des pâtes, couplés aux rôles des molécules humanisées, facilitera la mémorisation et la chronologie des processus moléculaires impliqués dans l’expression du patrimoine génétique : Paul pour l’ARN polymérase et la transcription, Le sage Hépice pour l’épissage de l’ARN prémessager, Roby pour la traduction opérée par le ribosome et enfin Mat pour la maturation des protéines (même si ce dernier point figure dans les limites du programme).

Un objectif n’est pratiquement jamais atteint durant cette activité, il s’agit de la localisation cellulaire des différentes étapes. En 1h30 de manipulations, pratiquement aucun binôme n’y arrive. Certainement à cause de la multitude de tâches à accomplir, ils oublient systématiquement que le permis de travail des ouvriers n’est pas valable dans tous les compartiments cellulaires. Ce point est bien sûr détaillé dans le cours.

Améliorations possibles pour cette activité

Un certain nombre de pistes ci-dessous pourraient améliorer la séance d’investigation :

  • Des références aux expériences historiques.
    Dans le cadre de la réforme et des évaluations qui accompagnent le programme, la référence aux résultats expérimentaux et aux expériences historiques occupe une place importante. L’aspect expérimental doit faire partie du schéma de pensée des élèves. Dans les séances suivantes, on pourrait concevoir une activité où chaque étape doit être associée à un résultat ou un texte historique rappelant la démarche originale ayant démontré le mécanisme moléculaire impliqué.
    • Expérience de Taylor (1957) pour la constitution du brin codant (réplication semi-conservative)
    • Expérience de Robert et de Sharp (Nobel 1993) pour le sage Hépice et les hybridation ADN-ARN et la notion de gène fragmenté
    • Expérience de Nirenberg et Matthaei (1961) pour le disque-code de Roby et la découverte du code génétique
    • Expérience de Beadle et Tatum 1940 pour la mutation...
  • Des supports différents pour les nucléotides et les acides aminés.
    Les élèves confondent souvent nucléotides et acides aminés. Pour éviter de fausses représentations, on pourrait remplacer les "grosses" pâtes (AA) par des perles, mais elle sont assez onéreuses. On peut aussi utiliser des flocons de maïs colorés que les jeunes enfants collent avec leur salive (dans le TP, avec une éponge) pour fabriquer des objets ou animaux divers. Des pâtes pour les nucléotides et des flocons de maïs en guise d’acides aminés me semble être un bon compromis.
  • Dissocier dans le temps, réplication et expression génétique.
    Les deux mécanismes n’interviennent pas au même moment dans le cycle cellulaire et leur fonction est très différente. On pourrait d’emblée leur donner les deux brins d’ADN et leur laisser le soin de repérer le brin codant avec les consignes écrite du TP. Une autre alternative : plutôt que de renoncer au fil de laine pour enfiler les pâtes suite aux erreurs de réplications, on les mettrait à profit pour modéliser l’action du complexe enzymatique de réparation de l’ADN (ciseaux + nœud).
  • La localisation cellulaire des étapes.
    C’est un objectif de séance qui n’est pas atteint, il suffirait de délimiter sur les paillasses les différents compartiments cellulaires et de demander à placer les pâtes au "bon" endroit lorsqu’ils appellent l’enseignant pour validation.