Le thème de la Vierge à l'Enfant dans l'oeuvre de Raphaël publié le 30/12/2012  - mis à jour le 16/02/2022

La reprise d'un thème artistique dans l'histoire

« Le thème de la Vierge à l’Enfant dans l’œuvre de Raphael »

Raphael Sanzio. Chérubins.

Raphael Sanzio. Chérubins. Détail. Chapelle Sixtine. Vatican. Rome
Source Wikipédia

  • Disciplines conviées : lettres, histoire, géographie, arts plastiques, science/technologie/chimie, informatique.
  • Niveau : classes de cinquième
  • Références au programme de lycée. « La place de l’Eglise »
  • Objectifs disciplinaires.
     Approcher le genre de la peinture religieuse
     Connaitre et savoir lire la thématique de la Vierge à l’Enfant.
     Acquérir des éléments sur la Renaissance italienne, ses artistes, ses foyers, le statut de l’artiste.
     Connaitre un grand peintre de la renaissance italienne : Raphael Sanzio, dit Raphael, maitre des Madones.
     Connaitre les instruments nécessaires au lecteur averti, littéraires et scientifiques.
     Rêver de devenir des lecteurs avertis.
  • Présentation de la démarche pédagogique.
     Acquérir des éléments de méthodologie pour approcher la peinture religieuse
     Connaitre les instruments philologiques. (Bible, évangiles, témoignages d’érudits et d’artistes au service de l’art).
     Effectuer des lectures de témoignages.
     Savoir qui est Marie et connaitre son iconographie.
     Rappels sur les conditions des Premiers Chrétiens

Méthodologie

1- En théorie
Pour lire une œuvre d’art, on commence par la présenter. Ensuite, on la décrit, on l’analyse, puis on l’interprète. On donne enfin des informations générales sur l’artiste et son œuvre.

2- Dans la pratique
Le lecteur a donc besoin d’instruments de connaissance, ou clefs de lecture, qui vont lui permettre d’apprécier de manière plus satisfaisante l’œuvre. On va passer de « c’est beau » à « c’est sensible », « c’est nouveau »…. »ça me rappelle »….

3- Nous ne sommes pas des experts
Mais nous pouvons avoir envie d’en savoir un peu plus. Et surtout quand nous en savon s un peu plus, nous prenons plaisir à feuilleter ou consulter sur Internet des collections, des guides de musées. Les réflexes acquis par l’étude vont automatiquement nous éclairer sur d’autres œuvres que nous trouvons belles, mais que nous ne comprenons pas.

Les outils de l’historien d’art.

L’histoire de l’art dispose heureusement de nombreuses sources écrites, qui lui permettent une meilleure interprétation des faits et reconstruction des productions, sachant que beaucoup d’œuvres n’ont pas survécu au temps, aux destructions par interdits divers (l’Église elle-même), les guerres, les incendies, les pillages, les passions, etc.


I- La peinture religieuse

Pour la comprendre, il faut connaitre les épisodes bibliques les plus récurrents représentés par les peintres.

Pistes en arts plastiques et en histoire.
Quelles sont les thématiques récurrentes de la peinture religieuse que vous connaissez ? (ex. la Nativité…)

A- Les sources d’enseignement

1- Dans la religion chrétienne, il y a plusieurs sources d’enseignement : au premier plan évidemment, la Bible (la “Sainte Écriture”).
Si le Nouveau Testament parle peu de la Vierge Marie, très nombreux cependant sont les autres écrits, appartenant au trésor de l’Église, qui évoquent la Mère de Jésus (1) :
2- il y a tout d’abord les écrits de la Tradition : dogmes et enseignements du Magistère de l’Église (pontifical, conciliaire, apostolique), textes et homélies des Pères de l’Église, textes de la liturgie, traités des Docteurs de l’Église ;
3- il y a aussi les écrits et commentaires exégétiques des théologiens ;
4- il y a encore les innombrables témoignages des grands mystiques reconnus et canonisés ;
5- il y a enfin, très nombreux, les "Évangiles Apocryphes"(2). Bien que ces écrits ne soient pas canoniques (3), plusieurs d’entre eux cependant sont considérés néanmoins comme sérieux et sont cités ici ou là par la liturgie ou le magistère.
(Source Marie de Nazareth)
Les Évangiles apocryphes, les Proto-évangiles. Même si l’Église ne les reçoit pas comme révélation divine, elle les admet comme source historique, au même titre que d’autres écrits profanes de la même époque (2ème-3ème siècle)
On qualifie d’apocryphe (du grec ἀπόκρυφος / apókryphos, « caché ») un écrit « dont l’authenticité n’est pas établie » (Littré). Dans le domaine biblique, l’expression désigne, à partir de la construction des canons, un écrit considéré comme non authentique parce que jugé par les autorités religieuses comme non inspiré par Dieu. Cependant, saint Jérôme nommait « apocryphes » les livres deutérocanoniques de l’Ancien Testament et les considérait comme non-canoniques.
Ex. l’Évangile de Judas.
6- Le Coran partage avec les apocryphes chrétiens de nombreuses scènes de vie de Marie et d’enfance de Jésus :
La consécration de Marie dans la Sourate III, La famille de ’Îmran, 31 et le Proto-évangile de Jacques
(source wikipedia)

B- Les études et témoignages de savants et de lettrés, contemporains ou non.

a. Une source extraordinaire sur la vie des saints, leurs attributs :

  • « La Légende Dorée » écrite par Jacopo de Varagine ou Voragine

L’auteur est né en 1228 à Varage, non loin de Gênes. Son nom latin Jacobus de Varagine fut mal copié et apparait aussi sous la forme de Voragine. C’était un des hommes les plus savants de son temps. Il entre à 16 ans dans l’Ordre des Frères Prêcheurs, fondé par Saint Dominique en 1215. Compilateur et conservateur, il travaille avec un souci pastoral et pédagogique très net, pour constituer un bréviaire pour les laïcs qui n’avaient pas accès à la cléricature. Il démontre toujours avant de raconter. Le récit n’est pas dénué de l’horreur du martyre des saints ou de celles de l’Inquisition.
Jacques de Varagine est contemporain de Thomas d’Aquin, de Saint-Louis, de la construction de la Sainte Chapelle, de la Sorbonne.
Ce livre a été le vadémécum des imagiers.

b. « Les vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes » de Giorgio Vasari

Une source extraordinaire écrite par Giorgio Vasari sur les peintres de Cimabue à Michel-Ange.


II. Le thème de La vierge à l’Enfant

A. Qui est Marie ?

« Saint Luc fut ordonné quant à son office, qui était d’écrire l’évangile. On croit, en effet, qu’il recourut tout particulièrement à la Sainte Vierge comme à l’arche de son testament et que c’est d’elle qu’il apprit bien des choses, notamment sur des sujets qu’elle seule pouvait connaitre tels l’Annonciation, la Nativité et autres sujets dont il est le seul à parler » .
Source  : « La Légende dorée »Jacques de Voragine - CLIV. Saint Luc, évangéliste.

  • Marie de Nazareth
    Marie, en grec Μαριαμ, Mariam, en araméen Maryam, en hébreu Myriam מרים, fille juive de Judée, est la mère de Jésus de Nazareth. Les Églises catholique et orthodoxe accordent une place spéciale à Marie, qu’elles appellent Vierge Marie (plus souvent chez les catholiques) ou Mère de Dieu (plus souvent chez les orthodoxes), et qui est l’objet d’une dévotion particulière.
    Les représentations de Marie et Jésus sont entendues comme symbole de la maternité.
    D’infinies variantes ont été imaginées. Tantôt l’enfant est un nourrisson, tantôt il est déjà âgé de trois ou quatre ans et tend les bras vers sa mère, mais il s’agit toujours de représenter l’amour réciproque.

La première vierge à l’Enfant de l’histoire de l’Art

Première vierge à l'enfant de l'histoire de l'art

Première vierge à l’enfant
de l’histoire de l’art.
Rome. Catacombe de Priscilla.
Vierge à l’enfant avec un
prophète pointant une étoile.
IIe siècle.
Source Wikipédia

C’est dans les catacombes, qu’on trouve les premières représentations de la Vierge à l’Enfant. La Madone embrasse vigoureusement l’enfant. On la distingue de toute autre femme grâce à la présence dune étoile au dessus de sa tête. Cette iconographie est destinée à rester immuable au cours des siècles.

Piste en Arts plastiques et en Histoire
Recherche sur les catacombes ? Localisation de celles de Rome ?
Quelles sont leurs fonctions ?
On pourra s’aider du projet déjà mis en ligne sur « Les Premiers Chrétiens »
Source : Les premiers Chrétiens sous l’Empire Romain

B-Comment reconnaît-on Marie ?

1. Les vêtements de Marie de l’antiquité au moyen-âge

  • Bleu, blanc, rouge : la symbolique des couleurs
    On pourra relire les travaux de Michel Pastoureau.

À Rome, le rouge est symbole du pouvoir suprême, la couleur des généraux, des patriciens et plus tard des empereurs.
Son usage est réglementé et interdit à ceux qui ne font pas partie de ces catégories.
Le Code Justinien (VIème siècle ap. J.-C) condamne à mort ceux qui achetaient ou vendaient le tissu de couleur porpora à mauvais escient.

Dans la culture chrétienne, la royauté spirituelle de la Vierge revêt des insignes de la royauté temporelle, dont le rouge. Ceci indique, aussi bien pour la vierge que pour le Christ, leur nature humaine, alors que pour tous deux, le bleu est indice de divinité ou d’étroite participation au mystère de la nature divine.
L’habillement caractéristique de Marie est une robe rouge, recouverte d’un manteau bleu. Le rouge signifie son lien avec le monde terrestre. Le bleu (plus ou moins foncé) est la couleur spirituelle par excellence. Par analogie avec le ciel. (pour cette raison et aussi parce que le bleu est la couleur la plus coûteuse pour les artistes, car elle provient du lapis-lazuli broyé), le bleu est utilisé au moyen-âge dans le vêtement des personnages sacrés les plus significatifs, en particulier pour la vierge.

Le blanc est pour les Romains la couleur de la toge virile, du pouvoir reconnu, de la consécration.
Aux premiers temps du christianisme, le vêtement blanc était revêtu juste après le baptême, comme symbole de la vie nouvelle.
Dans l’art médiéval, le blanc est utilisé pour le vêtement du Christ, dans les scènes de la passion, et aussi comme vêtement de la Verge dans les peintures qui représentent son couronnement.

2. L’auréole.

Elle représente sous une forme sensible, le caractère sacré de l’être humain. Elle est figurée comme un cercle de lumière qui entoure les êtres d’une profonde spiritualité, afin de mettre en valeur ce que l’homme a de plus noble : la tête, siège de l’intelligence, moyen de l‘élévation spirituelle.


III. A propos de Raphaël (Sanzio ou Santi)

[Parfait artiste de Cour de la Renaissance italienne : peintre, dessinateur, architecte. Urbain 1483 / Rome 1520]
Peintre de l’équilibre, de la sérénité et de l’harmonie.

Témoignage de Giorgio Vasari : le statut des artistes de la renaissance

Nous citons ici une étude « L’archétype du « costumato e virtuoso artefice » dans les Vies de Giorgio Vasari » de Michelle Bianchini Université Paul-Valéry - Montpellier III

Lorsque Giorgio Vasari rédige ses Vies, il ne fait pas seulement œuvre de biographe ou d’historien de l’art. Soucieux de contribuer activement au changement de statut social de l’artiste, il se pose souvent en moraliste, louant les qualités ou stigmatisant les défauts de chacun, afin de proposer à ses lecteurs l’archétype du « costumato e virtuoso artefice », l’artiste-gentilhomme, l’artiste-courtisan, qui peu à peu s’impose dans toutes les cours d’Italie.

Texte intégral en libre accès disponible depuis le 26 janvier 2010.

Giorgio Vasari, Le vite de’ più eccellenti pittori, scultori ed architettori

  • 1. « Dieu mortel »1, c’est ainsi que Giorgio Vasari jugeait Raphaël. Cette formule met en évidence le long chemin parcouru depuis le Moyen Âge par l’obscur artisan qui travaillait dans son atelier, affilié à une corporation.
  • 2. Les Vies de Vasari entérinent ce changement de statut. Le peintre, le sculpteur ou l’architecte n’appartiennent plus aux arts mécaniques ; peu à peu ils vont se libérer des corporations, devenir des artistes-gentilshommes, des artistes-courtisans et se regrouper au sein d’Académies. Afin d’être digne de ce nouveau statut, l’artiste doit adopter certains comportements et en bannir d’autres. C’est ainsi que les Vies de Vasari n’apparaissent pas seulement comme un recueil de biographies : le lecteur peut en effet y trouver de très nombreuses notations permettant d’établir une liste de préceptes, ou de rédiger un guide de bonne conduite à l’usage des artistes. À plusieurs reprises, Vasari déclare que son but est de « dilettare » ses lecteurs, mais aussi de « giovare » aux artistes. Et c’est précisément pour être utile aux jeunes artistes qu’il s’efforce de présenter le modèle du « costumato e virtuoso artefice ».
  • 3. Selon Vasari, ses qualités étaient telles que tous ceux qui eurent la bonne fortune de le côtoyer furent touchés par sa bonté et devinrent eux-mêmes bons et excellents, adoptant ses « costumi santi »23. Et Vasari ajoute vers la fin de cette biographie : « Egli insomma non visse da pittore, ma da principe »24. Pour Vasari, Raphaël est le prince des artistes, l’archétype de l’artiste-gentilhomme de la Renaissance. Il le place au-dessus de Léonard de Vinci et de Michel-Ange, car la personnalité de ces derniers offrait des côtés plus sombres, une certaine « salvatichezza » qui dérangeait le courtisan policé qu’était Vasari.
    • 25 Ibidem, vol. IV, p. 547.
    • 26 Ibidem, vol. IV, p. 569.
    • 18. Mais, on le sait, Vasari admira par-dessus tous les artistes Michel-Ange. S’il accorde à Raphaël la palme du prince des artistes, il confère à Michel-Ange le qualificatif de « divin ».
    • 79. « Raphaël lui-même est présenté comme victime de son amour pour les femmes …et selon Vasari, c’est l’excès même de ces plaisirs qui le conduisit à la mort ».
    • 152 Ibidem, vol. IV, p. 467.

 Notes

  • 1. Giorgio Vasari, Le vite de’ più eccellenti pittori, scultori ed architettori scritte da Giorgio Vasari pittore aretino, con nuove annotazioni e commenti di Gaetano Milanesi, Florence, Sansoni, 1906, 9 vol., vol. IV, p. 316. Toutes les notes renvoient à cette édition. La première édition des Vies fut publiée à Florence en 1550 par l’éditeur Lorenzo Torrentino, la seconde à Florence en 1568 par Iacopo Giunti. C’est cette seconde édition qui fait généralement référence et qui a été publiée par G. Milanesi.
  • 2. Cennino Cennini, Libro dell’arte o trattato della pittura (écrit vers1398, première édition, Giuseppe Tamboni, 1821), Milan, Longanesi, 1984, 235 p.
  • 3. Ibidem, chap. XXIX, p. 44.
  • 4. Leon Battista Alberti, De la peinture, De Pictura, Paris, Macula, Dédale, 1992, 271 p., livre III, pp. 209-211.
    Pour citer cet article : [Référence papier] Italies, Revue d’études italiennes, Université de Provence, n°11, Bonnes manières et mauvaise conduite, 2007. [Référence électronique] Michelle Bianchini, « L’archétype du « costumato e virtuoso artefice » dans les Vies de Giorgio Vasari », Italies [En ligne], 11 | 2007, mis en ligne le 26 janvier 2010, Consulté le 14 janvier 2012.
    Consulter le texte intégral : L’archétype du « costumato e virtuoso artefice » dans les Vies de Giorgio Vasari

Piste en Lettres et en Arts Plastiques.
Présenter la biographie de Raphael Sanzio ou Santi.
Situez et localisez Urbino ? Quelles sont les régions limitrophes ? Montrez dans quel environnement culturel et affectif Raphael a évolué ? Identifiez les grandes étapes de sa formation et ses maîtres (Qui a été son premier maitre ? Où s’est-il déplacé ? Quels artistes ont eu une grande influence sur lui ?) Citez quelques unes de ses grandes œuvres. Relevez la date de sa mort et déduisez-en à quel âge il est mort.

Piste en géographie et informatique.
Construire une carte d’Italie retraçant le parcours de Raphaël en indiquant les années de permanence dans ces lieux et les artistes qu’il y a rencontrés.


IV- Des compositions religieuses calmes et ordonnées

A- Les représentations mariales de Raphael

Cherchez la définition de « mariale »

1- Le dessin
Le style de Raphaël se caractérise par une utilisation presque égale du dessin et de la couleur car, contrairement à un grand nombre de peintres, il ne laisse pas l’un dominer l’autre : il est aussi précis dans le trait que dans la répartition des teintes que dans le point de fuite. Cela se doit à sa manière de travailler : imiter les artistes de son époque et ses prédécesseurs en choisissant ce qui pourrait lui être utile.

Les tempi Madonna

Les tempi Madonna
Raffaello Sanzio ou Santi,
dit RAPHAEL (peintre et dessinateur)
Italie, 1507-1508
Source Wikipédia

2- Description de la symbiose entre la Mère et l’Enfant
« Ce célèbre carton provient de la collection de F. X. Fabre, grand admirateur et connaisseur de l’œuvre de Raphaël dont il copia à plusieurs reprises la fameuse Vierge à la chaise (Florence, Palais Pitti). Fabre fit sans doute l’acquisition du carton directement à Florence chez la famille Tempi qui possédait le tableau depuis le XVIIème siècle et le vendit en 1829 au roi Louis I de Bavière. Il est probable que dés cette époque on procéda au découpage du carton sous forme d’ovale pour le maroufler sur un morceau de toile, elle-même contrecollée en plein sur un carton épais. Malgré son évident état d’usure, particulièrement dans la partie gauche, où le papier usé laisse apparaître la toile, elle aussi sensiblement dégradée, ce carton demeure un témoignage essentiel pour comprendre les recherches de l’artiste autour de l’imbrication des formes de la mère et de l’enfant Jésus durant la période florentine qui va de 1504 à 1508. Le découpage ancien et le cadrage resserré accentuent, il est vrai cette impression de sublime intimité physique entre les deux figures avec le crâne délicat de l’enfant parfaitement emboîté dans l’orbite du visage de la mère. La vierge, paupières baissées semble protéger avec douceur l’enfant à l’expression vaguement apeurée et absente comme s’il pressentait déjà le sacrifice à venir. Dans le tableau final (Munich, Alte Pinacothek) cette impression s’atténue et se relâche avec la forme rectangulaire du tableau, le cadrage à mi corps de la vierge, le lourd drapé sinueux et l’esquisse d’un ample paysage en arrière plan. Quoiqu’il en soit, rarement par la suite, Raphaël retrouvera un tel équilibre entre réalité familière et aspiration au divin. L’œuvre que l’on peut dater de l’extrême fin du séjour florentin a peut-être été exécutée comme le suggère Vasari pour Taddeo Taddei qui fut également mécène de Michel Ange (le fameux tondo Taddei qui date de 1502-1505 exerça une influence sur de nombreux artistes dont Raphaël lui-même). »
Voir « la Madonna Tempi » œuvre achevée , conservée à Munich, Alte Pinakothek :


B- La peinture « Vierge à l’Enfant » ou « Madone du Grand Duc”

La Madone du Grand Duc

La Madone du Grand Duc
Source Wikipédia

1 – Présentation

  • Auteur : Raffaello Sanzio ou Santi, plus connu en France sous le simple nom de RAPHAEL.
  • Lieux et dates de naissance et mort du peintre : (Urbino 1483- Rome 1520)
  • Titre de l’œuvre, Vierge à l’Enfant ou Madonna del Granduca.
  • Date de production : vers. 1505-06
  • Support : Bois.
  • Dimensions : on indique toujours la hauteur du tableau, puis sa largeur : 84,4 x 55,9 cm.
  • Lieu de conservation : Galerie Platine du Palazzo Pitti à Florence (Italie)

La Madone du Grand-Duc tient son nom du fait qu’elle ait appartenu au grand-duc de Toscane, Ferdinand III de Toscane. Par contre, nous ne connaissons pas sa provenance, ce qui va nous poser une question mystère.

2. Description
Marie est représentée debout avec sa traditionnelle robe rouge et son manteau bleu. Elle porte dans ses bras l’Enfant Jésus et semble avancer vers le spectateur pour le lui présenter. Elle émerge de l’ombre dans une monumentalité affirmée mais douce. Marie baisse humblement les paupières. Son visage ovale, jeune et doux est surmonté de l’auréole.
Jésus est un bébé potelé. Son modelé est tout à fait humain : il est joufflu. Ses orteils effectuent la torsion visant à agripper ou tâter dans le vide, typique de tous les nouveau-nés.

Son ventre est enveloppé d’un linge. Il porte l’auréole crucifère, symbole de la Trinité, du Sacrifice et de la vie éternelle.
Entre la Vierge et Jésus on remarque une interaction affective harmonieuse et très forte : Jésus est tendu vers sa mère et elle le protège et le soutient de ses mains, avec grande douceur.
Le regard de l’enfant appelle des réactions en matière de sentiments et de dévotion. En se tournant vers le spectateur, il l’invite à participer à la sublime correspondance affective être la mère et l’enfant.

3-Analyse
Les rapports entre les volumes et la disposition des protagonistes sont bien équilibrés avec une légère rotation de Marie vers la droite à laquelle correspond un geste analogue, dans le sens opposé, de Jésus.
La composition est simple et pyramidale, répondant aux schémas de l’époque.
L’effet vaporeux de l’ensemble démontre l’influence du sfumato de Leonardo da Vinci, que Raphaël eut l’occasion d’apprécier lors de ses premières années de présence à Florence.
Le sfumato : est une expression de la poétique figurative de Léonard de Vinci. Cette technique consiste tant dans le passage graduel, imperceptible car fondu de l’ombre à la lumière, obtenu par des nuances vaporeuses ouatant les contours. On observe une perte graduelle de la précision des contours, qui ne sont plus nets et continus, mais délimités par une multitude de petits traits.
L’extrême douceur de la scène compose un rare équilibre entre le sens de la manifestation divine et la forte humanisation du sujet.

4. Interprétation. Les intrigues de l’histoire de l’art.
Cette œuvre a pourtant fait couler beaucoup d’encre, car un dessin préparatoire et une copie du 16 ème siècle du tableau, montrent que la Vierge n’est pas nimbée de noir, mais qu’elle se trouve sous un portique, où court un ban de pierre, et que derrière elle et l’enfant s’étend un paysage.
Les radiographies effectuées sur l’œuvre, qui analysent la composition chimique du pigment, ont montré que le fond noir a été peint successivement.
Comment devait se présenter l’œuvre à l’origine ?
Le maquillage se situe entre la fin du XVIe et l’achat du tableau par Ferdinand III de Toscane au cours du dernier tiers du XVIIIe siècle. Nous savons que Raphael place toujours ses figures dans l’espace. Le fait d’enfermer de noir l’imagine de la Madone à l’Enfant enlève à la figure la notion d’espace et ne correspond pas à la manière adoptée par Raphael au contact de Léonard de Vinci (entre 1505 et 1506).
Pour Léonard, et donc Raphael, inscrire les formes dans l’espace signifiait continuité de la création et fine adhésion à la philosophie de la Lumière (néoplatonicienne).
Il est donc impensable que Raphael ait peint la « Madonna del Granduca » sur fond noir.

5. L’intrigue
Qu’est ce qui a pu induire à couvrir un précieux document de Raphael, qui comme le prouvent les radiographies existe toujours ? Un dégât marginal ? La table est elle intégrale ou coupée dans le bas ?

  • 1. Dessin préparatoire du Cabinet des Dessins et Gravures du Musée des Offices, Florence Data : 1500-1520.Dimensions : 20 X 17 cm
  • 2. Radiographie de la Madone du grand Duc
    La radio met en évidence la peinture couverte par un fond noir peint autour de la Madone à l’Enfant (1) avec à l’arrière, une balustrade (2) et un paysage (3) ; une structure munie de corniche ferme la vue en arrière de la Vierge (4) et une autre structure s’entrevoit sur la gauche (5)
    Voir article “Madonna del granduca” par Umberto Baldini dans “ Critica d’Arte” (1984)

Piste en science/technologie/chimie
Expliquer les principes de la radiographie
Voir La radiographie

Piste en Arts Plastiques.
On pourra interroger les élèves sur la nécessité de nettoyer le tableau ? Est-ce possible ?
Voir Centre de recherche et de restauration des musées de France

Piste en Lettres.
Production écrite : Quelles grandes intrigues de l’Histoire de l’Art ou de l’Archéologie vous passionnent-elles ? Motivez votre récit.

Piste en informatique.
Construire une galerie des Vierges à l’Enfant que vous préférez.
Voir les œuvres de Raphaël conservées en France.

Au Louvre :

  • La Sainte Famille (1505-1506), Musée du Louvre, Paris.
  • La Vierge, le Christ et saint Jean-Baptiste dit La Belle Jardinière (1507-1508), 122 x 80 cm, Musée du Louvre, Paris.
  • Baldassare Castiglione (vers 1514-1515), musée du Louvre, Paris.

À Chantilly  :

  • Les Trois Grâces (1504-1505), 17 x 17 cm, Musée Condé,
  • La Madone dite de la Maison d’Orléans (1506), 29 x 21 cm, Musée Condé Chantilly.
    La_Madone_d_Orleans
  • La Madone de Lorette (vers 1509), 120 x 90 cm, Musée Condé, Chantilly.

À Strasbourg

  • Portrait de jeune femme (vers 1520), 60 x 44 cm, Musée des Beaux-Arts de Strasbourg.