Projet « Filles-garçons : vivre ensemble » au Lycée Vieljeux de La Rochelle publié le 28/01/2019

Depuis 2015, le lycée Léonce Vieljeux à La Rochelle est engagé dans le projet "Filles Garçons : vivre ensemble" qui a concerné l’an dernier la totalité des 18 classes de seconde de l’établissement, 16 classes du lycée général et 2 du lycée professionnel.

Sophie Burlier, professeure de SES et pilote du projet, nous présente ce projet.

Quels sont les objectifs de ce projet ?

L’objectif du projet est d’offrir aux élèves l’occasion de réfléchir aux modes de relations entre les femmes et les hommes dans notre société et de leur donner du temps pour questionner les stéréotypes. La philosophie du projet est bien de montrer le caractère construit des différences et de favoriser des relations plus égalitaires entre les filles et les garçons et de manière générale entre individus respectueux les uns des autres.
Les sujets abordés sont multiples : droits des femmes, égalité professionnelle, lutte contre les violences faites aux femmes, liberté des filles et des garçons dans leurs choix amoureux, rôles sociaux qui conditionnent autant des trajectoires scolaires que des modalités de mise en couple, modes vestimentaires.... en partant le plus souvent de l’expérience des élèves présents et de leur questionnement.

Comment est né ce projet ?

Il est né des échanges en classe et de quelques confidences d’élèves autour de la difficulté d’être une fille, d’être un individu non conforme dans une société hétéronormée, des récits d’expériences gênantes, voire violentes entre filles et garçons ou entre garçons, de la faiblesse des échanges sur ces sujets avec les adultes. Il ne s’agit cependant pas de traiter des situations individuelles mais bien d’agir aux niveaux des représentations en s’appuyant notamment sur les apports des sciences sociales et des compétences des professionnelles de l’établissement.

Pour réaliser ce projet, vous vous appuyez sur l’intervention d’une artiste...

Effectivement, dès la première année, Justine Devin avec ses contes sur la rencontre amoureuse, la « première fois » et le non conformisme a été convaincante.

Justine Devin

Ses interventions sont toujours le support de temps d’échanges en groupes non mixtes et mixtes entre les élèves et entre les adultes qui encadrent le projet et qui sont là pour écouter, relancer les discussions, répondre aux interrogations avec bienveillance mais aussi avec un discours égalitaire et non différentialiste.
Les temps d’expression corporelle organisés par Justine permettent aux élèves de prendre en considération le corps de l’autre, de réfléchir à l’effet de groupe dans sa dimension « panurgienne », de travailler la confiance en soi par la prise de parole.

Comment ce projet est-il préparé en classe ?

Au préalable, le constat des inégalités entre les femmes et les hommes dans l’emploi notamment, la présentation des mécanismes de socialisation différentielle et de construction des rôles sociaux ont été vus en cours de SES. Nous travaillons sur les stéréotypes véhiculés par les jouets, la publicité et nous décrivons la répartition des tâches domestiques. A l’issue de ces cours, les élèves constituent anonymement un premier pot commun de questions sur les rapports filles/garçons. Ces questions enrichies au fur et à mesure des activités sont un peu le fil rouge de l’action.
Chaque professeur de SES/EMC pilote le dispositif pour ses classes avec des collègues de diverses disciplines (HG, SVT, EPS, Lettres, langues, Maths, Lettres/histoire).

Seuls les enseignants sont mobilisés dans ce projet ?

Non. L’ensemble de la communauté éducative est mobilisé pour rendre chacun sensible aux signes du sexisme (en classe, mais aussi dans les couloirs, dans les propos comme dans les comportements). Les enseignants peuvent ne pas être les seuls encadrants, et il est intéressant de travailler avec les ASSEDU, les animateurs culturels et les personnels techniciens qui sont très souvent au contact des élèves. Cette condition suppose un volet formation et échanges entre adultes. Quant aux infirmières et à l’assistante sociale, elles apportent aux élèves des informations techniques et précises et rappellent leurs rôles dans l’établissement.

Pourquoi une journée banalisée ?

Nous faisons le choix de ne pas saupoudrer au long de l’année les différents temps du projet mais au contraire de concentrer les activités. Les expériences précédentes montrent que le principe d’une journée banalisée avec des temps conviviaux dans des espaces hors classe, bien que dans le lycée, marque les esprit, intéresse les élèves et les pousse à participer activement (y compris pour des élèves discrets par ailleurs).

Quel est le programme de cette journée ?

Voici le déroulement d’une journée type

  • 9h Accueil des élèves de la classe ; café gâteaux ; constitution de groupes affinitaires pour tirer des questions dans le pot commun et commencer à y répondre.
  • 10h Première série de Contes
  • 11h Séparation en groupes non mixtes
  • 12h15 Repas en commun
  • 13h30 Deuxième série de Contes
  • 14h30 Groupes non mixtes (à la demande des élèves)
  • 15h Expression corporelle en mixité
  • 16h Plénière mixte, mise en commun
  • 17h30 fin de la journée

Et les élèves, qu’est-ce qu’ils en pensent ?

Quelques témoignages de filles et de garçons ayant participé au projet l’an dernier :

"J’ai trouvé cette journée très agréable. Tout le monde était de bonne humeur ce qui permet une bonne écoute. j’ai beaucoup aimé les histoires et j’ai trouvé que Justine les racontait très bien ce qui permettait une bonne compréhension et de se mettre à la place des personnages…. Le petit temps après les histoires du matin et celles de l’après midi où les filles et les garçons étaient séparés était très agréable et a permis de s’exprimer et de dire ce qu’on pense par rapport à la société actuelle sans que l’autre sexe nous juge ou critique."

"Quand on a discuté entre filles c’était un bon moment même si je n’osais pas vraiment prendre la parole. Mais il y avait certaines conversations avec elles où je ne me sentais pas concernée avec l’exemple des parents qui font des différences entre filles et garçons. Mon frère et moi n’avons jamais eu de différence. Mais d’autres filles ont pu se reconnaître."

"J’ai trouvé cette journée très intéressante car je pense que cela a permis de faire ou de refaire comprendre à certaines personnes les causes et les conséquences de certains de nos actes comme le harcèlement ou même le viol qui sont des actes très graves et punissables par la loi. Je pense que cette journée d’information ou de découverte devrait être être obligatoire à toutes les classes de seconde et au collège pour commencer à faire prendre conscience de la violence, de la gravité et de l’impact que certains actes peuvent produire sur les personnes victimes.
Merci pour cet agréable journée qui m’a appris beaucoup sur les rapports hommes femmes et m’a appris à avoir plus confiance envers les autres et que malgré nos différence physiques nous sommes tous les mêmes"

" Finalement je n’ai rien appris sur les faits mais il y avait une dimension qui permet de relâcher, de penser à comment on réfléchit, on agit. C’était une journée où on a pu se comporter et réfléchir ainsi que poser des questions comme s‘il n’existait aucun tabou. Tout cela était exposé de façon amusante ce qui n’a laissé place à aucun ennui."

"J’ai apprécié l’ouverture d’esprit de Justine qui parlait librement, sans tabou sur des sujets que nous n’abordons pas normalement avec les professeurs. Le conte que j’ai le plus apprécié est celui de la rose trémière où nous apprenons à gérer nos peines de cœur.
Ce que j’ai jugé le moins utile est la séance de relaxation. Je n’avais pas la tête à dormir mais plutôt à me poser plein de questions."