
Conférence Cité Educative de Chatelerault. Judith Helson publié le 19/03/2025
Synthèse 1 : Comprendre et accompagner le développement de l'enfant
Le développement de l’enfant est un processus dynamique qui repose sur l’évolution de multiples facteurs cognitifs, émotionnels et sociaux. Lors de sa conférence, Judith Helson met en lumière les différentes trajectoires de développement et les enjeux liés à l’accompagnement des enfants en milieu scolaire.
L’intervenante : Judith HELSON
Judith Helson est une psychologue belge spécialisée en neuropsychologie. Diplômée de l’Université catholique de Louvain, elle a acquis une expertise en neuropsychologie infantile en travaillant au Centre d’Évaluation Neuropsychologique et d’Orientation Pédagogique (CENOP) à Montréal. De retour en Belgique, elle s’est également formée en orthopédagogie et en psychoéducation, lui permettant d’accompagner des enfants, adolescents et jeunes adultes dans la gestion de leurs difficultés d’apprentissage et comportementales. Elle est cofondatrice de l’association NeuroTransmetteurs, qui vise à diffuser des informations fiables sur la neuropsychologie.
1. Un processus dynamique et individualisé
Chaque enfant suit une trajectoire de développement unique. Bien que des repères existent quant à l’évolution des capacités motrices, langagières et cognitives, il est essentiel de considérer la variabilité interindividuelle.
- Par exemple, il est attendu qu’un enfant de trois ans commence à former des phrases simples et puisse exprimer ses besoins de manière compréhensible. Cependant, certains enfants présentent un retard de langage sans que cela soit pathologique. Il est alors nécessaire d’observer si ce retard se comble naturellement ou s’il révèle une difficulté sous-jacente.
- De même, en matière de motricité, un enfant de cinq ans doit être capable de sauter à cloche-pied et de coordonner ses mouvements pour attraper un ballon. Ces repères servent à situer un développement "typique", mais ils doivent être maniés avec souplesse.
2. Les fonctions exécutives et l’autorégulation
Un aspect central du développement est la mise en place des fonctions exécutives, qui regroupent plusieurs processus cognitifs de haut niveau facilitant l’adaptation de l’enfant à son environnement.
Parmi elles, trois fonctions principales se distinguent :
- L’inhibition : la capacité à contrôler ses réactions impulsives.
- La mémoire de travail : la faculté de maintenir et manipuler des informations en cours de traitement.
- La flexibilité cognitive : la capacité à adapter ses stratégies et son comportement face aux changements.
Ces fonctions se développent lentement, avec un pic de progression entre 3 et 5 ans, puis une amélioration continue jusqu’à l’âge adulte.
Dans un contexte scolaire, un enfant de six ans avec un développement typique devrait être capable de rester concentré plusieurs minutes sur une activité. En revanche, un enfant qui se lève constamment de sa chaise ou interrompt sans cesse la classe peut présenter des difficultés d’inhibition. Ces comportements doivent être analysés avec attention, car ils peuvent relever d’une immaturité normale ou d’un trouble comme le TDAH.
3. La notion d’adaptation permanente
Le développement de l’enfant repose sur une adaptation constante à son environnement. Cette adaptation implique des ajustements continus de la part des enseignants et des professionnels de l’éducation.
L’école a une double fonction : l’instruction (transmission des savoirs) et l’éducation (apprentissage du vivre-ensemble et des règles sociales). Cependant, la gestion de classe et la prise en charge des comportements perturbateurs sont souvent sous-estimées dans la formation des enseignants, alors qu’elles conditionnent l’accès aux apprentissages.
Judith Helson rappelle qu’en Belgique, seuls 15 à 20 % du temps de formation des enseignants est consacré à la gestion de classe, alors que ce domaine représente un défi majeur du quotidien scolaire.
4. Impact des difficultés d’autorégulation sur l’apprentissage
Les enfants présentant des difficultés d’autorégulation peuvent rencontrer des obstacles dans leur parcours scolaire.
L’autorégulation déficiente
Une autorégulation déficiente se manifeste souvent par :
- Une impulsivité marquée (difficulté à attendre son tour, réactions vives et incontrôlées).
- Des problèmes de concentration et d’attention.
- Une gestion des émotions difficile, conduisant parfois à des crises ou des troubles du comportement.
Les difficultés comportementales ne relèvent pas toujours d’un trouble pathologique, mais elles exigent une adaptation des pratiques pédagogiques. Une approche proactive, favorisant le renforcement positif et la gestion des comportements, est essentielle pour soutenir ces enfants dans leur apprentissage.
Par exemple, un enfant de quatre ans peut avoir du mal à attendre son tour pour parler. Ce comportement est attendu à cet âge, mais s’il persiste à huit ou neuf ans, il peut poser des problèmes d’intégration sociale et d’apprentissage. Les enseignants peuvent alors mettre en place des stratégies comme des "cartes de parole" pour aider l’enfant à mieux réguler ses prises de parole.
Le développement de l’enfant est un processus en constante évolution, influencé par son environnement, ses expériences et les interactions sociales. L’école joue un rôle majeur en ajustant ses pratiques pour s’adapter à la variabilité des trajectoires de développement. Une meilleure compréhension des fonctions exécutives et de l’autorégulation permettrait de réduire les difficultés comportementales et d’améliorer la qualité des apprentissages.
Les recherches de Judith Helson montrent que la capacité à différer la gratification est un prédicteur plus fiable de la réussite scolaire que le QI. Un enfant qui apprend à attendre une récompense plutôt que de céder à une impulsion immédiate développe des compétences d’adaptation essentielles pour sa réussite future.
Un nouvel article sera prochainement publié sur le site synthétisant cette conférence : il s’agira d’un focus sur la posture des enseignants et les stratégies pédagogiques face aux comportements perturbateurs.