Arts populaires, arts vernaculaires, arts modestes publié le 04/07/2019

Entretien avec Hervé Di Rosa

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Hervé Di Rosa manifeste le désir d’apprendre des techniques exta-européennes très diverses (laques du Vietnam, sculptures de tressages du Cameroun ) mais lorsque ces techniques spécifiques sont trop longues à acquérir il délègue la fabrication de ces éléments qui feront partie de ses sculptures.
Il travaille parfois avec des micro ateliers au Cameroun en leur fournissant des dessins en perspective, la conception du volume n’est pas toujours entendue de la même façon par les artisans qui les interprètent . Faute de cette compréhension spatiale, ils créent à leur façon et créent ainsi un élément de surprise, « d’un coup il y a autre chose que moi, un genre de méta moi »il arrive à Hervé Di Rosa de laisser intactes ces sculptures hybridées par le travail des artisans .

Photo en médaillon d'Hervé Di Rosa

Les œuvres sont des « scories  » c’est ce qu’il reste de la relation entre l’artiste et l’artisan. Cet élément de surprise crée l’oeuvre. L’artiste , lorsque son travail n’est pas greffé de ces apports extérieurs ressent paradoxalement un certain manque.
Le hasard c’est la rencontre avec l’autre, l’œuvre est une œuvre de métissage et d’apprentissage, tout le travail est basé sur la recherche et l’expression, Dubuffet dit par exemple comment il mélange des matériaux qui ne doivent pas être mélangés (peinture à l’huile et acrylique par exemple)
Il attendait les effets qui pouvaient découler de ces mélanges hasardeux.
« Je ne cherche pas je trouve  !  » Moi, c’est le contraire , c’est de chercher qui m’intéresse.
Il s’agit de lever les barrières très établies entre savant et populaire. On s’est beaucoup battu pour abattre les hiérarchies. L’art populaire s’appuie sur ce dialogue.
L’art populaire demande parfois des compétences et techniques extrêmement savantes, ce sont des technologies extrêmes faites avec très peu de moyens.
Il y a par exemple une science énorme dans la musique populaire mais qui ne passe pas par les canaux de la musique savante , conservatoire, partitions, solfège... les artistes témoignent néanmoins d’une grande virtuosité.

Hervé Di Rosa va chercher une forme de science auprès de ces artisans. Au Vietnam par exemple il faut dessiner de façon très précise et remettre les dessins six mois avant , au Cameroun les techniques sont également très exigeantes.
Marchandisation
L’élément perturbateur est la marchandisation. On pense aux cadeaux Bonux ou Happy meal fabriqués par des enfants en Chine. C’est quand l’objet sort de la campagne publicitaire qu’il devient intéressant.
La nécessité de vendre amène à trouver des solutions esthétiques dans l’art populaire.

Au XIX ème siècle les premiers folkloristes qui sont allés chercher les arts populaires parlent d’un véritable plaisir.
Hervé DI Rosa cherche à dégager une énergie positive de plaisir et de joie
La peinture lui a permis d’échapper à des moments difficiles ; il cherche maintenant à retransmettre cette dynamique, le MIAM est comme une peinture sans peinture , son œuvre.
La compréhension des choses passe par les objets dans le musée Carnavalet on comprend que l’histoire ce n’est pas qu’un drapeau mais tous les objets qui ont été préservés  : des poupées, des cartes faites à la main, des papiers de bonbons , des choses très fragiles .
Le MIAM n’a été créé que pour une seule chose  : diriger le regard et diriger l’émotion. Voir qu’il y a de l’émotion dans les objets qui semblent anodins est important. Tout le monde aujourd’hui a son temple d’objets souvenirs, de tourisme.

Alayne Gisbert-Mora