Mesures de la Terre publié le 16/10/2005  - mis à jour le 25/04/2018

Eratosthène...

Mesures de la terre


Ces documents ont été réalisés par René Renaudet Lycée Cordouan (ROYAN). Ils peuvent être enrichis par tout apport ou remarque à leur sujet.

Eratosthène


Des ombres pour mesurer la Terre


Un peu d’histoire
Eratosthène vers 240 avant notre ère crée la géographie scientifique : Il conçoit la rotondité de la terre et propose de la diviser par méridiens et parallèles. Ayant entendu dire que le jour du solstice d’été le reflet du soleil était visible au fond d’un puits à Syène, il pense à mesurer à la même époque la longueur de l’ombre d’un obélisque d’Alexandrie : l’angle de la direction du soleil avec le zénith est alors estimé à 7,2° soit « 1/50 de cercle ». Disposant de la distance approximative de Syène à Alexandrie soit en unités modernes 833 km, il en déduit la méridienne : 50*833 = 41650 km.

Encyclopédie :
Gnomon : (du grec indicateur) instrument dont se servaient les anciens pour déduire de l’ombre portée d’un petit style la hauteur du soleil et, par suite, l’heure approximative. Le cadran solaire dérive du gnomon. On doit leur utilisation rationnelle aux savants de l’école d’Alexandrie.

Peut-on faire aussi bien qu’Eratosthène ?
Si le même jour, à midi solaire , heure locale solaire vraie, on mesure la hauteur du soleil (angle dont la tangente est le rapport de la longueur de l’ombre projetée sur le plan horizontal à la hauteur du gnomon) en des lieux différents on peut déduire facilement de la différence des deux hauteurs la longueur de la méridienne. Il suffit pour cela de connaître la distance des deux lieux, projetée sur le méridien de l’un d’eux, ce que l’on peut faire facilement à l’aide d’une carte et d’une règle graduée. Soit D la distance sur le méridien, a 1 et a 2 les deux hauteurs angulaires mesurées en degrés :
la méridienne vaut :
L = D x360 / |a 1 - a 2|
L’heure locale (temps moyen) : nos horloges donnent une heure légale, décalée d’un nombre entier d’heures selon le fuseau horaire et selon les saisons, par rapport à l’heure de Greenwich, dite aussi heure GMT. L’heure locale (temps moyen) est définie à partir de l’heure GMT et de la longitude du lieu par une relation horaire où la longitude L étant donnée en degrés, positive à l’ouest de Greenwich, négative à l’est, l’heure GMT notée Tu et l’heure locale Tl :
Tl = Tu - L*24/360
L’heure locale solaire vraie Tls est déduite de l’heure locale (temps moyen) Tl par addition d’une variation notée eq : équation horaire qui est pratiquement nulle aux périodes de solstice et aux périodes équinoxiales. Cette correction peut atteindre environ 15 minutes en plus ou en moins selon la période de l’année.
Tls = Tl + eq

Valeurs théoriques déterminées grâce au logiciel Redshift3 et Encarta.
Gnomon vertical d’une hauteur L = 2 m.
Date : 26/09/1999

distances/km Le HAVRE PARIS BESANCON LYON SAINTES NICE TOULOUSE
Le HAVRE 0 415
PARIS 0 590
BESANCON 0 400
LYON 0 300
SAINTES 415 0
NICE 400 300 0
TOULOUSE 0
VILLE Latitude Longitude Passage du Soleil au méridien (TU) Hauteur du Soleil Longueur de l’ombre / m
LE HAVRE 49°30’ N 0°6’ E 11 h 50 mn 39°20’ 2,44
PARIS 48°52’ N 2°20’ E 11 h 43 mn 39°58’ 2,38
BESANCON 47°15’ N 5°59’ E 11 h 28 mn 41°35’ 2,25
LYON 45° 45’ N 4°50’ E 11 h 33 mn 43°04’ 2,14
SAINTES 45° 45’ N 0°38’ O 11 h 55 mn 43°24’ 2,11
NICE 43°42’ N 7°16’ E 11 h 23 mn 45°08’ 1,99
TOULOUSE 43°37’ N 1°27’ E 11 h 45 mn 45°12’ 1,98

Peut-on faire mieux qu’Eratosthène ?
Le point faible de la mesure antique tient à la faible précision de la mesure de la distance Alexandrie-Syène (connue en "journées de chameau"). Au tout début du XVIIème siècle le hollandais SNELL met au point les méthodes de mesures à la surface de la terre. C’est l’invention de la triangulation. Ces méthodes conduisent à la réalisation des cartes précises et donnent pour le 1° de méridien la distance de 28500 étalons rhénans = 107,3 km.

Les distances des cartes

Au sujet des déterminations de distances sur les cartes IGN et dérivées

  • La carte de France :
    _ Le tracé d’une carte précise de tout un pays a été entrepris, sur l’ordre de Louis XIV, par Jean Dominique Cassini. Pour cela il mesure avec soin avec l’abbé Picard, la distance entre AMIENS et LA FERTE-ALAIS. Ce travail est achevé à la mort de Cassini en 1712.
    Le fils de Jean Dominique, jacques continue l’œuvre autant vers le nord que vers le sud toujours en restant sur le même méridien. Il lui fallait pour cela mesurer plus de 1000 triangles dont les sommets étaient autant de points de repères pour pouvoir dessiner une carte (sommets, moulins, tours, clochers.).
    Le petit fils puis l’arrière-petit-fils poursuivent et enfin la carte de CASSINI est achevée, gravée sur cuivre, sous forme de 180 cartes qui assemblées dessinent une carte de 11,5 m de côté ! L’échelle correspond à peu près au 1/86400.
    Entre 1818 et 1881 les cartes de Cassini sont remplacées par les cartes d’état-major au 1/80000. Les 267 cartes d’état-major dessinent une France de 12.5 m de côté. Ces relevés sont faits maintenant à partir de 100000 points géodésiques dont les positions angulaires sont très précisément déterminées, (récemment par GPS) et triangulés par les méthodes des Cassini.
    C’est au début des année 30 que le Service Géographique des Armées commence à appliquer les méthodes de la cartographie aérienne. Ce travail est poursuivi après 1947 par le nouvel Institut Géographique National (créé en 1940). Depuis 1986 les satellites SPOT couvrent la surface terrestre en 26 jours. Il semble selon les spécialistes que les prélevés par satellites ne soient pas appelés à remplacer les clichés aériens, les deux méthodes étant plutôt vues comme complémentaires.
  • Sur les méthodes de mesures :
    Les mesures de distances sont depuis le hollandais Snellius effectuées par triangulation. Celui-ci se propose dès 1500 environ d’améliorer la mesure d’Eratosthène en mesurant avec précision la distance Alkmaar, Bergen op Zoom ayant un écart angulaire de 1° par une méthode de triangulation. Il trouve 28500 étalons rhénans (107,3 km) ce qui conduit pour le méridien à 38628 km. Sa méthode dite par élargissement de la base, permet à partir d’une petite base très précisément mesurée, puis ensuite seulement par des mesures angulaires de mesurer de proche en proche des distance bien plus longues : les seules relations utiles sont celles qui expriment dans le triangle quelconque le carré du coté a² = (b² + c² - 2.b.c.cos(a ))1/2 et la loi des sinus qui exprime l’invariant a/sin(A) = b/sin(B) = c/sin(C).

Sa méthode est conservée aujourd’hui dans son principe sur des bases de 30 à 50 km de côté déterminées aujourd’hui avec une précision de l’ordre de 1 cm pour 10 km !. Les calculs font appel aussi aux méthodes de la trigonométrie sphérique pour projeter les résultats dans le plan de carte.

  • Conclusion :
    Il apparaît donc que les distances sur les cartes ne font pas appel à une quelconque mesure préalable du rayon de la terre. Au contraire, ce sont des mesures à la surface de la terre et résumées par nos cartes qui permettent d’estimer le rayon moyen du géoïde. Par contre il ne faut pas que nous utilisions les latitudes portées sur la carte, car notre mesure est justement d’obtenir directement une double mesure de latitude (Une différence en fait) !

Les cartes IGN sont aux trois échelles : 1/25000 1/100000 1/250000.

La triangulation

Méthode de mesure des distances entre points éloignés par des mesures angulaires.

Deux relations fondamentales fondent cette technique :
La relation des sinus BC/sin(A) = AB/sin(C)=AC/sin(B)
La généralisation du théorème de pythagore :
AC² = AB² + BC² - 2.AB.BC.cos(ABC)

image1-3

Si l’on mesure avec soin au théodolite les deux angles B et C ainsi que la base BC par exemple, le troisième angle est connu par A = 180°-(B + C), les deux autres cotés sont connus par les relations : BC / sin(A) = AC / sin(B) = AB / sin(C)
Ce qui conduit à :
AC = BC sin(B) / sin(A) AB = BC sin(C) / sin(A)

image2-2

La méthode d’élargissement de la base :

On a mesuré avec soin la base AB. Le but est alors de déterminer DC (en général DC>AB d’où le nom de la méthode)

Dans le triangle ABC les mesures des angles BAC et ABC permettent de déterminer AC et BC.
De même dans le triangle ABD, des mesures des angles BAD et ABD on obtient les côtés AD et BD.
CAD = CAB + BAD CBD = CBA + ABD
La mesure de DC est obtenue alors par les relations :
DC² = AC²+AD² - 2*AC AD cos(CAD)
DC² = CB²+BD² - 2*CB BD cos(CBD)

image3-2

En se plaçant ensuite en C et D on peut viser les points inaccessibles H et K, et résoudre facilement le triangle CDH, CDK, pour finir par la détermination de HK. On se place en C et on mesure DCH, et DCK. On se place en D et on mesure CDH et CDK.
L’angle DHC est égal à 180°-(CDH + DCH) et l’angle CKD est égal à 180°-(DCK+CDK).
On a alors
HK² = HD² + DK² - 2*HD*DK*cos(CDH+CDK)
HK² = HC² + CK² - 2*HC*CK*cos(DCH+DCK)
C’est la méthode mise au point et employée par le hollandais SNELL pour mesurer la longueur d’un arc de méridien.
Il reste à examiner la question du calcul de la précision obtenue sur HK compte tenu de la précision sur AB, et des précisions sur les mesures angulaires.