Ouverture sur l’Europe et enseignement de l’information-communication en anglais publié le 29/09/2008

Un projet innovant au lycée Marguerite de Valois (Angoulême), en classe de seconde IGC/SES

Margurite de valois- Angoulême

Ce projet transdisciplinaire est le résultat de réflexions et d’expérimentations menées depuis trois ans. Il a été mis en place par un professeur d’anglais et un professeur d’économie gestion et a visé en 2007-2008, à offrir aux élèves d’une classe de seconde mixte IGC/SES des opportunités différentes de s’exprimer à l’oral en anglais en réutilisant des notions vues dans d’autres champs disciplinaires spécifiques à la filière (information communication pour les IGC, économie pour les SES). Ce projet a deux objectifs principaux : répondre aux difficultés de certains élèves à s’exprimer à l’oral en anglais en proposant une approche différente de la langue mais aussi permettre aux élèves aimant la langue de pratiquer davantage en dehors du cours d’anglais.

Une réflexion commune et des constats à l’origine du projet

L’hétérogénéité en anglais des classes de STT, les effectifs souvent importants de ces classes dans notre lycée et les horaires réduits dans la discipline ne permettent pas de travailler suffisamment l’oral ni de développer chez les élèves des sections STT une véritable envie de communiquer en anglais ; or la maîtrise de la communication orale est indispensable à la poursuite d’études supérieures dans la filière tertiaire notamment pour les cursus avec ouverture internationale. Les difficultés avérées en langues étrangères de nos étudiants en BTS Commerce International et en BTS assistant de direction ont d’ailleurs été aussi à la base de notre réflexion.
Face à ces constats et dans le cadre de l’accompagnement de la réforme du Baccalauréat Sciences et Technologies de la Gestion, une ouverture de section européenne dans la série STG est envisagée ; un tel projet marque la volonté de notre établissement de valoriser la section et surtout de permettre aux élèves d’acquérir une meilleure maîtrise de la communication orale en anglais afin qu’ils puissent envisager sereinement des poursuites d’études vers les cursus souhaités sans que l’anglais ne soit un frein à leurs choix, mais plutôt un atout, une chance d’ouverture.


2005-2006 : première expérimentation pour développer la communication en anglais

Pour tenter de remédier aux difficultés constatées et afin de mettre en place une expérimentation préalable indispensable à l’ouverture d’une section européenne dans la série STG, nous avons constitué une équipe pluridisciplinaire de 3 professeurs : un professeur d’anglais rompu à l’enseignement en classes de STT / STG, un professeur de mathématiques et un professeur d’économie gestion ayant obtenu la certification complémentaire, enseignement en langue étrangère dans une discipline non linguistique- anglais.
Pour simplifier la mise en place de ce premier dispositif et tenir compte des contraintes d’organisation du lycée, nous avons décidé de l’appliquer à tous les élèves d’une même et unique classe de première STG option gestion à petit effectif (24 élèves).
L’objectif principal est de multiplier les opportunités pour les élèves de communiquer en anglais en utilisant la langue dans des disciplines non linguistiques, les cours de langues venant au secours des autres disciplines pour aider les élèves à acquérir du vocabulaire spécifique et des automatismes à l’oral. De plus, les élèves doivent bénéficier des supports des disciplines non linguistiques pour développer en cours d’anglais des compétences de compréhension écrite, orale et d’expression orale.
Pour cela, nous avons mis en place au cours de l’année, des activités ponctuelles dans le cadre de l’horaire normal de chaque discipline, sur les cours dispensés d’habitude en français.
En mathématiques, l’utilisation de l’anglais écrit a été privilégiée car cela semblait plus rassurant pour les élèves, le contenu des exercices proposés étant essentiellement constitué de chiffres ; de plus le professeur ne se jugeait pas suffisamment à l’aise à l’oral dans la langue.
En information communication, c’est la pratique orale qui a été privilégiée, la discipline et le programme se prêtant tout à fait à cette approche à travers des jeux de rôles, des recherches donnant lieu à des exposés oraux.
Pour fédérer la classe autour de ce projet, nous avons envisagé un voyage à Londres mais pour des raisons budgétaires, il n’a pas été possible de le réaliser.

Nous avons constaté pendant l’année, que la collaboration entre les trois professeurs impliqués a permis de développer des activités qui ont intéressé un groupe d’élèves qui a pu ainsi progresser (7 ou 8 sur 24). Une élève qui pratiquait l’anglais en LV2 a refusé systématiquement toutes les activités proposées en anglais que ce soit en mathématiques ou en communication. Globalement, les élèves se sont peu impliqués, ils ont ressenti le projet plus comme une contrainte que comme une chance d’ouverture et de progrès personnels. Ce manque d’intérêt et d’implication des élèves s’explique d’abord par le fait que l’enseignement des mathématiques et de la communication en anglais n’a pas pu faire l’objet d’un enseignement régulier suivi puisqu’il était inclus dans l’horaire normal et qu’il fallait respecter les impératifs imposés par le référentiel des deux disciplines concernées. A ce manque de continuité s’ajoute le fait que ce projet avait au départ été présenté aux élèves sans leur laisser le choix de participer ou non au projet. De plus, la classe entière constituait en fait un groupe trop important pour permettre de lever les freins à l’expression orale ressentis par un certain nombre d’élèves.

Le bilan dressé à l’issue de cette première expérimentation nous a permis de recadrer le dispositif afin de mieux atteindre les objectifs fixés au départ.


2006-2007 : recadrage et réajustements vers les élèves volontaires

Les réajustements ont pris en compte la nécessité d’offrir aux
seuls élèves volontaires des opportunités de s’exprimer à l’oral en dehors du « cadre officiel » des cours habituels, au sein d’un groupe réduit.

A la rentrée 2006,

  • nous avons proposé le dispositif à tous les élèves des classes de premières STG : ainsi 12 élèves issus de 3 classes de premières STG ont participé régulièrement tout au long de l’année ;
  • nous avons réservé ce dispositif aux seuls élèves volontaires, sans objectif d’évaluation officielle ;
  • une heure hebdomadaire a été ajoutée à l’emploi du temps habituel pour permettre l’enseignement de la communication et/ou du management en anglais en dehors de l’horaire obligatoire. La seule difficulté a été de trouver un créneau horaire libre commun aux 3 classes et au professeur d’économie gestion ;
  • nous avons concentré l’action sur les champs disciplinaires spécifiques à la filière (information et communication et management des organisations), ceci pour plusieurs raisons : ces disciplines se prêtent plus particulièrement à la pratique de la communication orale et elles intéressent a priori les élèves de cette filière ; ce choix devait permettre la réutilisation à travers des applications en anglais de notions déjà abordées par les élèves en français.

L’enseignement s’est fait à partir de :

  • une progression spécifique s’articulant avec les programmes de communication et de management suivis par les élèves en français dans le cadre de l’horaire obligatoire ;
  • un choix de thèmes permettant l’utilisation de supports authentiques variés en anglais ; ainsi ont été exploités par exemple, les sites institutionnels d’une entreprise et d’une ONG britanniques, deux annonces et deux films publicitaires, des courriers commerciaux ; l’analyse de ces supports a été faite à partir de grilles similaires à celles utilisées par les élèves en cours de communication et de management des organisations, ce qui devait permettre une meilleure appropriation des notions par les élèves et éventuellement un approfondissement des contenus disciplinaires.
  • une démarche fondée sur des activités rendant les élèves actifs car cette heure supplémentaire devait être l’occasion privilégiée de motiver la communication, de développer la communication orale en anglais et de permettre l’acquisition de réflexes favorisant l’expression courante. Pour cela, on a privilégié le travail en groupe de 2 ou 3, les mises en situation simples, les jeux de rôles, les exposés.
  • une collaboration entre le professeur d’économie gestion et les professeurs d’anglais des élèves concernés pour harmoniser les pratiques d’apprentissage et travailler des thèmes transversaux. Ceci n’a pas été possible de façon systématique car les élèves provenaient de 3 classes différentes, ayant chacune un professeur d’anglais différent ; ainsi la collaboration s’est surtout développée avec un des professeurs d’anglais.

Evaluation intermédiaire et régulation

Au cours de cette étape d’expérimentation, nous avons pu constater des attitudes plus positives chez les élèves réticents au départ, moins d’inhibitions à s’exprimer pour les élèves les plus timides, moins de freins liés à la crainte d’être jugés, évalués dans un cadre différent qui ne s’inscrivait pas dans le cadre officiel, une prise de confiance, une meilleure estime de soi (même un élève qui n’arrivait à rien dire en début d’année a réussi à faire quelques phrases par la suite). Tout ceci a conduit à une amélioration de la pratique de la langue orale de tous les élèves participants.
D’autre part, ces séances ont permis une meilleure appropriation par les élèves des notions vues en français grâce à leur réutilisation dans une autre langue et dans un cadre différent de celui de la discipline, les élèves ont aussi mieux compris et accepté le lien entre l’anglais et les autres disciplines, La plupart des élèves ont ainsi été amenés à appréhender concrètement l’anglais comme un outil de communication orale indispensable à leur poursuite d’études.
Au niveau de la démarche pédagogique, nous avons pu constater que
le groupe réduit permet une remédiation immédiate auprès de chaque élève ; toutefois, cette remédiation n’est pas systématique car il ne faut pas perdre de vue que la prise de confiance en soi et le plaisir de s’exprimer en anglais sont des objectifs principaux de ces séances.
Le faible effectif, le contexte différent de l’action et l’absence d’évaluation formelle classique ont aussi permis de développer une convivialité propice à la communication notamment pour les élèves les plus timides, qui s’étaient inscrits au projet parce qu’ « ils aiment l’anglais » mais qui ne pouvaient pas s’exprimer dans la langue.
L’absence d’impératifs de programme a permis de réajuster au fur et à mesure la progression des activités prévues en fonction des progrès des élèves et de leurs souhaits.
Aucun outil formalisé d’évaluation n’avait été mis en place lors de cette étape. Ce bilan a donc été le résultat des observations faites par le professeur de chaque élève et du fonctionnement du groupe. D’autre part, lors de la dernière séance de fin d’année, une discussion informelle avec les élèves sur leur ressenti a permis de confirmer en grande partie l’analyse ; de plus l’ensemble des élèves a déclaré vouloir poursuivre l’expérience en terminale.

A l’issue de cette année de transition, il est apparu que la réussite et la pérennité de ce dispositif impliquait de :

  • proposer ce dispositif dès la seconde IGC et ce, si possible jusqu’en terminale STG.
  • regrouper dans une même classe les élèves participant au dispositif afin d’une part, de faciliter la collaboration indispensable entre le professeur d’anglais et le professeur d’économie gestion et d’autre part de créer une dynamique de groupe.
  • mettre en place un projet collectif transdisciplinaire sur un an ou plus, afin de fédérer le groupe.
  • organiser l’emploi du temps de façon à ce que des séances co-animées par les deux professeurs soient possibles ponctuellement.

Concrètement, quelles actions menées en 2007-2008 ?

Pendant l’année 2007-2008, nous avons tenté de remédier aux problèmes constatés ; ainsi les actions mises en place pour 2007-2008 ont été les suivantes :

  • dès juin 2007, nous avons fait passer l’information auprès des élèves de troisième lors de leur inscription en seconde IGC au sein de notre lycée et nous avons répertorié les élèves intéressés afin d’évaluer le nombre d’élèves volontaires.
  • en septembre, les élèves volontaires ont été regroupés dans une même classe IGC ; 6 élèves s’étaient inscrits, nous avons donc décidé d’élargir le dispositif aux élèves de la classe inscrits en SES afin d’étoffer le groupe ; le groupe de 12 élèves ainsi constitué était plus hétérogène mais ceci s’est avéré être source de stimulation et a permis de dégager une bonne dynamique de groupe.
  • deux heures hebdomadaires ont été ajoutées à l’emploi du temps habituel : une heure d’anglais assurée par le professeur d’anglais LV1 de la classe et une heure intitulée information et communication en anglais assurée par le professeur d’économie-gestion, n’intervenant pas par ailleurs dans la classe. Les deux heures hebdomadaires ont été positionnées de telle sorte que les enseignants ont pu parfois intervenir en coanimation.
  • nous avons repris les démarches pédagogiques qui avaient bien fonctionné l’année précédente en insistant en début d’année sur le renforcement des structures de communication pour permettre aux élèves de prendre la parole dans le groupe et en multipliant les jeux de rôle et les mises en situation lors des séances d’information/communication.
  • trois projets collectifs transdisciplinaires ont été mis en place sur l’année :
    • un voyage à Londres effectué en février : les élèves ont travaillé en petits groupes à la préparation du voyage et des visites guidées puis ont réalisé des « travel books » à leur retour ;
    • l’intervention en mai de l’auteur américain, Eddy Harris récompensé par le 21ème prix du livre en Poitou-Charentes ; ceci a donné lieu à la lecture en français et pour partie en anglais, d’un livre autobiographique de l’auteur sur sa jeunesse dans l’Amérique des années soixante. Il a été aussi l’occasion de recherches par les élèves sur la question noire aux Etats-Unis. La venue de Monsieur Harris au lycée a permis aux élèves du groupe -auxquels nous avions associé une dizaine d’élèves de terminale ES spécialité anglais- de parler directement avec l’auteur de son parcours personnel et d’échanger des points de vue sur les thèmes qui touchent beaucoup nos élèves, de la tolérance, de l’identité et des communautarismes.
    • un « débat historique » dans le courant avril en coanimation avec le professeur d’histoire-géographie (ayant obtenu la certification anglais DNL) ; la toile de fond de ce débat était l’Indépendance des Etats-Unis.

Conclusion

Nous devons cependant admettre que les retombées sur le travail de la classe, ou sur les résultats des élèves en anglais sont décevants. Ce constat est à nuancer dans la mesure où il s’agissait d’une classe d’un niveau très hétérogène et qui a posé beaucoup de problèmes de discipline tout au long de l’année.

La réussite globale de ce dispositif tel qu’il a été recadré cette année, est donc indéniable. En effet, les différents réajustements ont permis aux élèves d’aborder et d’apprécier l’anglais comme un outil de communication orale indispensable à leur poursuite d’études, à leur vie professionnelle future et à leur ouverture culturelle.