Révolution cognitive et numérique publié le 16/10/2015  - mis à jour le 16/07/2018

Une étude de l’OCDE parue le 14 septembre 2015 sur les compétences numériques des élèves fait un bilan plutôt positif des compétences développées dans le système français, mais souligne que les performances scolaires ne sont améliorées que lorsque l’intégration du numérique en classe s’accompagne d’une évolution des pratiques pédagogiques.

Ce constat nous incite à résumer la conférence de Britt-Mari Barth1 donnée en avril 2014 sur la révolution cognitive et son lien avec la révolution numérique. L’origine de sa recherche part de l’expérience du terrain et de la réflexion sur les processus enseigner/apprendre (sciences cognitives). L’approche pédagogique qu’elle propose met en avant la co-construction des savoirs, la motivation pour les apprentissages et le rôle de médiation de l’enseignant.

Britt-mari Barth

Comment la révolution cognitive peut-elle guider la révolution numérique ?

Les recherches indiquent qu’une révolution cognitive est en marche depuis les années 50. La construction du sens, et la mise en place d’un environnement d’apprentissage ont pris plus d’importance.

L’enseignant doit désormais viser non pas d’apporter le savoir mais de permettre à chacun de construire, ou plutôt co-construire son savoir. Il s’agit d’initier les élèves à l’utilisation des outils de pensée et de les guider dans leurs efforts de compréhension et de conceptualisation.

Aspect cognitif 

Pour apprendre il faut réfléchir, faire avec effort et patience des aller retours entre l’abstrait (le concept), et le concret (les applications) afin de construire une compréhension en profondeur, condition pour le transfert. L’enseignant accompagne ce travail et peut faire bénéficier avec le numérique d’une grande variété de situations, d’expériences, d’exemples. 

Aspect relationnel

Notre conception de l’apprentissage comme étant individuel (l’idée que chacun apprend seul, dans sa tête) est en train de changer. Il doit y avoir interaction entre des personnes, ainsi qu’entre l’apprenant et le savoir, pour que l’élève construise sa pensée individuelle. L’activité cognitive émerge dans ces espaces relationnels. L’enseignant peut faciliter ces interactions et l’attention conjointe des apprenants, et s’appuyer pour ce faire sur les outils numériques.

Aspect affectif 

Intention, cognition et émotion sont inséparables. L’intention d’apprendre conditionne l’engagement. Les élèves doivent voir le sens de ce qu’on leur propose, et chacun a besoin de se sentir comme un interlocuteur valable dans les structures d’interaction mises en place.
Aux enseignants de se questionner ensemble sur ce qui engage leurs élèves pour mieux apprendre et sur les formes d’évaluation qui valorisent les savoirs.

Evolution du rôle de l’enseignant

Il est à la fois connaisseur et organisateur, inspirateur et catalyseur, modèle et accompagnateur. Son rôle est devenu plus complexe, plus exigeant, mais plus valorisant : la transmission est maintenant une transaction qui vise la transformation – c’est à dire le développement de l’intelligence des élèves.
Pour aller plus loin sur ce sujet : résumé de "l’apprentissage de l’abstraction".

L’usage de supports numériques aide l’enseignant à observer ce que l’élève comprend ou pas, et à l’accompagner. Il peut varier et personnaliser les supports en fonction des besoins constatés, choisir des activités individualisées, grouper ensemble les élèves avec des difficultés similaires pour travailler avec l’enseignant ou une autre « ressource humaine », réelle ou virtuelle. Il peut mettre l’évaluation formatrice au service des apprentissages.
Pour les activités d’approfondissement et d’entraînement, le numérique peut aider l’enseignant à présenter des contenus ou des exercices différemment, donner le temps aux élèves d’approfondir les connaissances à leur rythme, leur laisser un choix dans les ressources, pour les rendre plus conscients de la fonction de ces ressources – et ainsi plus responsables. La différenciation peut ainsi être soutenue par le numérique. 

Qu’est-ce qui a changé chez les élèves ?

Les jeunes sont devenus rapides, ils font plusieurs tâches en même temps, zappent d’une information à l’autre – mais leur capacité à se concentrer et à approfondir un sujet en souffre parfois.
Ils ont plus de mal que leurs aînés à s’exprimer par écrit selon un modèle classique, qui hiérarchise les idées, les développe, les justifie, les argumente. Ils ont tendance à simplifier le langage plutôt qu’à le cultiver.
Ils ont l’habitude d’être en communication constante avec « le monde » grâce aux réseaux sociaux ; ils communiquent au-delà des frontières, ils ont accès à des mondes virtuels, ils sont ouverts au monde et sensibles aux problèmes sociaux et écologiques de la planète. Profitons de cette ouverture, de cette curiosité.

Voir la conférence en vidéo (extrait du colloque "apprendre avec le numérique", académie de Rennes (34’, voir chapitrage à droite de la vidéo)
Lire la conférence en texte.

(1) Britt-Mari Barth dirige le Laboratoire de recherche pour le développement socio-cognitif LAREDESCO. Ses travaux apportent une aide méthodologique aux enseignants.