La place et le rôle de l'enseignant en classe de TPS publié le 08/10/2014

Faire agir et réussir chaque enfant

Viviane Bouysse

Viviane Bouysse, inspectrice générale, nous parle de la nécessité de faire agir et réussir chaque enfant avant de comprendre les stratégies de la réussite.

Les conférences du Canopé - Site de Lyon :
La refondation de l’école maternelle : continuités et changements - La place et le rôle de l’enseignant

Des postures d’enseignants qui favorisent la réussite des élèves

Les postures de l’enseignant présentées dans le film favorisent la réussite et le bien-être de l’élève :
L’enfant agit sous le regard bienveillant du maître qui étaye selon les besoins d’un geste, d’un mot, en provoquant l’interaction avec d’autres élèves


Témoignages d’enseignants

Au bout d’un an de pratique, le groupe des directrices ayant participé au stage « La scolarisation des élèves de moins de trois ans », organisé par la mission maternelle de Charente-Maritime au cours de l’année 2013-2014, nous soumet ses réflexions :

Témoignages de directrices (PDF de 44.8 ko)

Quels changements provoque la mise en place dans l’école d’une classe dédiée aux élèves de moins de trois ans ?


Six enseignants, exerçant en classe de TPS, ont bien voulu prendre le temps de confier leur évolution professionnelle sur l’année en répondant librement aux questions suivantes
Au cours de cette année d’enseignement avec les moins de trois ans, quelles sont les évolutions que je perçois dans ma pratique professionnelle ?

En septembre, je découvrais concrètement l’école maternelle.
Je m’étais fixé un objectif : que les enfants se sentent bien dans la classe, soient heureux d’y revenir et parallèlement que leurs parents nous les confient sereinement.
J’ai « œuvré » pour un « climat » de classe, un « climat » d’échange avec les familles.
Concernant les contenus, je ne savais par où commencer, ni comment s’y prendre… En observant les enfants, ce qui leur plaisait, ce que ma collègue de PS proposait à ses élèves, en échangeant au quotidien avec mes collègues, j’ai progressivement de mieux en mieux cerné ce qui était adapté : outils, démarches, activités à mettre en œuvre. Il me semble que je me suis définie comme un « cadre » ou un « champ » de ce qui est possible, réalisable dans le plaisir tout en introduisant doucement quelques contraintes, utile pour aller vers ce qui est attendu en PS ; je cherche ce peut être fait en amont, la manière de l’introduire pour asseoir un début de bases …
Je suis donc maintenant plus confiante, je me risque à chercher des ressources sur internet sans craindre de m’y noyer. J’ai conscience de n’avoir exploré, balayé qu’un tout petit pourcentage des champs disciplinaires décrit dans les programmes. Je dois aussi m’approprier de nombreux outils, supports d’activités, pour élargir, varier, diversifier, mieux rythmer mes propositions au quotidien. Je souhaite m’emparer plus à fond des programmes afin d’être plus à même de rebondir sur les opportunités liées au quotidien de la classe, et relier d’avantage, faire plus de lien entre les choses.
Mes premiers objectifs atteints, je me sens très portée par un désir de recherche et j’envisage la prochaine année scolaire avec un grand bonheur. Mon objectif étant de faire en sorte que « la ruche bourdonne », que les enfants et les trois adultes soient harmonieusement actifs …
N.B. : la formation tout au long de l’année m’a été précieuse, enrichissante de multiples échanges.

Arrivé en classe de TPS après 6 années de cycle 3...
Arrivé en classe de TPS après 6 années de cycle 3, le fossé entre ces deux niveaux semble conséquent.
Tout d’abord, du point du vue des contenus et des compétences à travailler, le cycle 3 étant bien cadré par les programmes de 2008, ceux de la TPS paraissent flous. De nombreuses questions se posent alors sur ce qu’il sera possible de proposer aux élèves, mais surtout sur ce que les élèves seront capables de faire.
D’autre part, la gestion de la classe (et du bruit) risque d’être bien différente. Comment interagir avec des élèves de cet âge-là ? Comment faire pour qu’ils apprécient l’école ?
Après une rentrée réalisée en douceur et les premières semaines pleines de sérénité (parents, enseignant, ATSEM, élèves), le rythme de la vie de la classe s’est imposé de façon naturelle : souplesse au sein des activités et rigueur dans la structuration du temps.
La richesse de l’exploitation des matières et l’intérêt porté par les élèves a été un facteur de motivation. La mutualisation des travaux, les échanges avec les collègues et autres intervenants du groupe de travail sur la TPS m’a amené à reconstruire, repenser ma préparation.
Je suis agréablement surpris par les possibilités offertes en TPS ainsi que par les progrès effectués par les élèves. Le discours des parents est lui aussi positif. L’envie de faire, de parler et de découvrir n’est pas mesurable mais il est ressenti.

Ce dispositif m’a permis d’être au plus près de mes élèves
Satisfaction en fin d’année face à tous ces petits qui ont de façon flagrante progressé dans les domaines du langage, de l’autonomie, de la relation à l’autre et de la propreté. De l’individualité au groupe, ils ont partagé des activités telles que le langage, l’écoute, la lecture d’album, le chant, les jeux vocaux, sans que j’ai l’impression d’avoir réellement travaillé ce domaine du social. Je n’ai pas ressenti de fatigue liée au niveau sonore ou au mouvement dans la classe et ceci très certainement au grand espace dont nous avons bénéficié.
J’ai amélioré, me semble-t-il la fonctionnalité de mon cahier de bord et ma façon de travailler avec mon ATSEM (tout du moins je l’ai précisée).
Mon observation individuelle des petits demeure un gros travail (échelle de progressivité) mais reste faisable au vu de l’effectif correct (14 enfants). La transition entre les activités reste un peu floue et il me parait nécessaire de ritualiser un minimum certaines transitions telles que extérieur/intérieur, classe/cantine, classe/salle EPS.
Ce dispositif m’a permis d’être au plus près de mes élèves, de leur laisser une grande liberté de paroles, d’actions et d’exploration tout en ayant l’impression de faire un travail d’enseignante avec les exigences que cela suppose.
De même être « près » des parents est enrichissant et intéressant pour pouvoir travailler avec chaque enfant et établir une relation de confiance avec lui.
Travailler avec des enfants de 2 ans ½ (TPS), impose une connaissance minimum de ses besoins, des ses capacités, et donc de ce qu’il peut faire, comprendre, ressentir.
Approfondir mes connaissances dans ce domaine m’a vivement intéressée et permis de comprendre, tout du moins affiner ce qui pouvait être fait en PS, et à fortiori MS et GS.

Je me suis vite rendue compte que s’occuper d’une classe de 2 ans était vraiment différent
Lorsque j’ai accepté d’occuper le poste dans la classe des TPS dans le cadre d’un nouveau dispositif « accueil des moins de trois ans », j’étais ravie de faire évoluer (ou plutôt élargir) mes pratiques pédagogiques en maternelle.
Je me disais cependant, qu’après avoir eu une classe de PS ou PS/MS pendant plus de 10 ans, j’aurai une certaine habitude face à un jeune public. Finalement, malgré cette expérience professionnelle (qui m’a tout de même beaucoup servie), je me suis vite rendue compte que s’occuper d’une classe de 2 ans était vraiment différent.
Au début, j’avais l’impression de ne pas bien cadrer mes séances, de ne pas répondre aux objectifs scolaires, d’être partout à la fois et en même temps nulle part !
J’avais une certaine frustration lorsque les enfants décrochaient assez vite d’une activité ou lorsque je m’occupais individuellement d’un enfant alors que le reste du groupe était sous la surveillance bienveillante de Sylvie, l’ATSEM. Je n’étais jamais totalement satisfaite de l’aménagement de ma classe pour la rendre la plus fonctionnelle et induire des comportements adaptés chez les enfants. J’ai dû changer au moins 5 fois tous les meubles et les coins pédagogiques !
En fin de compte, repenser sans cesse ses pratiques, ses aménagements, ses activités, c’est vraiment cela qui me plait maintenant et qui me fait grandir professionnellement en même temps que mes élèves !
J’aime beaucoup observer mes élèves, les aider à progresser et les voir progresser. J’aime aussi beaucoup travailler avec mon ATSEM (c’est un vrai travail d’équipe) ainsi que tisser des liens avec les familles ; faire évoluer le regard des parents sur l’école et sur leur propre enfant.
Je suis, à présent, moins gênée de me « poser » avec un enfant ou très petit groupe d’enfants lorsqu’une situation intéressante se présente en langage par exemple car je sais que c’est bénéfique pour l’enfant et que le grand groupe classe est finalement en activité sur des espaces aménagés qui induisent un apprentissage ou un réinvestissement pédagogique.
Je sais aussi que j’ai le soutien de l’ATSEM qui approuve cette manière de travailler ; elle, qui avait déjà beaucoup d’expérience avec les 2 ans, m’a bien aidée et rassurée sur ma pratique de classe. Je me sens de plus en plus à l’aise dans ma classe, même si je suis souvent en train de me remettre en question.
J’ai hâte d’être à la rentrée prochaine pour mettre en œuvre toutes les idées dont on s’est enrichi durant le stage filé.
Ma posture et ce que j’ai changé :

  • plus d’observation
  • plus de laisser faire de la part des enfants
  • plus de « théâtralisation » (scénario, marionnette, variation de ma voix, intonation différente, regard, jeux)
  • plus prendre son temps avec chacun
  • moins de consignes, formulation d’une consigne simple
  • accepter le désordre lorsque les enfants transportent, déménagent les objets, les petits jeux
  • être plus souvent en activité de plein air
  • accepter les pleurs d’un enfant fatigué ou triste ou frustré…
  • être plus à l’écoute des besoins de chacun
  • se laisser le temps pour refaire, recommencer, répéter une tâche
  • les mettre en réussite et noter leurs réussites

Ce que j’ai « gagné » dans l’école
J’avais déjà depuis quelques années, dans une classe des TPS.
J’ai une classe de TPS / PS
Malgré tout, ma prise de conscience professionnelle a été accrue cette année par ce travail spécifique que nous avons fait ensemble cette année sur la scolarisation des moins de 3 ans.
D’abord, l’aménagement de l’espace, grâce à un crédit spécifique obtenu de la mairie (5000 euros). Achat d’une structure de motricité (escalier - passerelle – toboggan – tunnel). Panneaux sensoriels – Table d’investigation.
Des banquettes confortables pour se regrouper d’une façon conviviale et un petit fauteuil de relaxation, de retour au calme, ou de mise à l’écart du groupe, pour un chagrin ou un besoin d’éloignement tout en observant ce qui se passe dans la classe.
Ce qui a changé pour moi donc : c’est l’ouverture de cette salle spécifique le matin à l’accueil et à d’autres moments (lors des ateliers, par exemple, car j’ai aussi la présence de l’ATSEM avec moi).
Une observation plus pointue de mes plus jeunes élèves. Un partenariat plus « d’aplomb » si j’ose dire et plus de matière
Avec les parents d’élèves où je peux m’appuyer sur des savoirs, sur des objectifs ciblés, sur du matériel et mobilier (que je peux montrer et expliquer les différentes actions et interactions).
Ce que j’ai « gagné » dans l’école :
un regard plus aiguisé de mes collègues sur la spécificité des plus petits. Mes journées de stage et les documents que j’ai rapportés, et la participation de l’ATSEM…m’ont permis de rendre compte de l’importance du travail effectué auprès des petits.
Que la clé de la réussite à l’école pour nos enfants, en ce qui concerne « le devenir élève »… tient beaucoup à l’accueil et à la relation de confiance que l’on instaure dès le départ auprès des parents… qui vont apprendre (eux aussi) à devenir « parents d’élèves ».

Je n’ai plus envie de changer de niveau
Avant :

  • peur / inquiétude
  • que vais-je faire avec eux ?
  • quel est leur intérêt à l’école ?
  • comment ne pas empiéter sur le travail des PS tout en apportant aux TPS
  • que faire durant toute une journée ?
  • impression de ne pas faire mon travail
  • challenge : occasion de se remettre en question dans la pratique
    Aujourd’hui :
  • je n’ai plus envie de changer de niveau
  • envie d’approfondir mon travail
  • un bonheur quotidien / curiosité accrue
  • j’ai trouvé ma place dans la classe et trouvé l’intérêt pédagogique – Remise en question
  • évolution des élèves flagrante
  • retour enrichissant des élèves
  • je travaillerais différemment si je devais prendre un autre niveau de maternelle
  • prendre plus de temps pour les apprentissages en considérant que chaque moment est important et doit être vu/revu/renforcé. (lavage des mains, conflits à régler, frustration, écoute de l’enfant).