L'émigration protestante en direction de la Nouvelle-France publié le 25/06/2007  - mis à jour le 21/06/2012

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Tout ceci explique donc l’exclusion de protestants dans la charte de fondation de la compagnie des Cent-Associés en 1627. D’autre part, il s’agissait par cette mesure de s’assurer de la fidélité des habitants de la Nouvelle-France vis-à-vis des voisins proches de la colonie, les Anglais et Hollandais protestants. Comment conserver cette colonie si, ces protestants se révoltaient comme les rochelais en faisant appel à leurs coreligionnaires des colonies voisines. D’ailleurs pour certains l’expédition anglaise des Kirk avait été organisée en 1628 avec la complicité de protestants français révoltés.
Malgré l’interdiction de venir s’établir au Canada, leur présence est attestée tout au long du régime français ; Il est difficile de les identifier et de les dénombrer. Rares sont ceux qui affichent leur croyance, mais, les « nouveaux catholiques » (les personnes ayant signé un acte d’abjuration), sont toujours considérés comme suspects. Ces hommes vont régulièrement occasionner des plaintes et de nombreux rapports permettent de constater leur présence pendant toute la période. De plus, le commerce de la colonie dépend toujours et en grande partie, des armateurs et des marchands protestants de La Rochelle. Leurs visites, les commis qu’ils entretiennent permettent de maintenir l’hérésie et cette présence continue d’inquiéter les religieux comme en témoigne les Relations des Jésuites.
L’arrivée à Québec de Mgr de Laval en 1659 va constituer une étape supplémentaire dans la lutte du clergé. C’est surtout la venue des colons originaires de La Rochelle qui inquiète Mgr Laval. Il va donc s’empresser d’expliquer, lors d’un passage en France, que ces personnes sont peu laborieuses et donnent le mauvais exemple aux anciens habitants du Canada ; à cela il ajoute qu’ils sont pas « fort zélées pour la religion ». En 1664, Colbert promet à l’évêque de faire cesser cet état des choses et de faire venir plutôt, à l’avenir, des colons de Normandie. Mais malgré ces promesses la situation concrète ne change pas et les protestants continuent à s’établir.
Jusqu’à la mort de Louis XIV, les autorités ecclésiastiques de Québec vont multiplier les règlements pour limiter l’impact des protestants dans la colonie. C’est un demi-succès, puisque l’autorité civile est consciente de la nécessité de la présence protestante pour le bien du commerce. Après 1715, la tolérance est encore plus forte, et l’arrivée massive de colons et de marchands en provenance de l’Aunis est attestée, ce dont se plaint l’évêque de Québec au ministre de la Marine. Désormais, on peut affirmer qu’il y aura des protestants jusqu’à l’entrée des troupes anglaises à Québec en 1759. Un soldat britannique note dans son journal que lors d’un service protestant célébré dans la ville, plusieurs protestants français y assistèrent avec les soldats anglais.
Ces hommes qui maintiennent le fait protestant en Nouvelle-France sous le régime français ont des origines géographique, sociale diverses. Mais pour un très grand nombre, ils viennent de la Rochelle et leur rôle a été prépondérant au 17ème siècle dans la colonisation. En plus des protestants de La Rochelle, le Poitou et la Saintonge vont fournir de forts contingents. En ce qui concerne la provenance sociale, l’inexistence d’état civil protestant rend la tâche difficile ; il faut reconnaître que le commerce a toujours été une occupation très prisée des protestants. A ces marchands il convient d’ajouter les soldats dont certains abjurent, puis les hommes de métier et même des prisonniers et enfin des prisonniers.

Bibliographie

 BAIRD C.W, Histoire des réfugiés huguenots en Amérique, 1880, p. 51
éditeur : Société des livres religieux

 1978, BEDARD Marc-André, les protestants en nouvelle-france,Québec de 1665 à 1760,
éditeur : Société historique de Québec.

 VOISINE Nive et autres, Histoire de l’Église catholique au Québec, 1608-1760, Montréal,
éditeur : Fides, 1971

 LALONDE Jean-Louis , Des loups dans la bergerie. Les protestants de langue française au Québec, 1534-2000, Montréal,
éditeur : Fides, 2002. 460 p.

 LARIN, Robert, Brève histoire des protestants en Nouvelle-France et au Québec (XVIe-XIXe siècles), Saint-Alphonse-de-Granby,
éditeur : Les Éditions de la Paix, 1998, 206 p

 Actes du colloque de l’ACFAS 1997, L’identité des protestants francophones au Québec : 1834-1997, Montréal, ACFAS,
_éditeur : « Les cahiers scientifiques » n° 94, 1998

 Mémoire de l’évêque de Québec sur les protestants, 1670 (Massachusetts Archives French collections, vol. II, p. 233) cité dans Hist. des réfugiés huguenots en Amérique, p. 87

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Auteur

 Jocelyn Sala

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