Marketing : Nous ne naissons pas consommateurs, nous le devenons publié le 23/05/2015  - mis à jour le 25/05/2015

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Nous ne naissons pas consommateurs...

Nous ne naissons pas consommateurs, nous le devenons

Pour comprendre nos comportements de consommateurs dès le plus jeune âge et notre rapport à la publicité, Julien Intartaglia, professeur et docteur à HEG Arc Neuchâtel, va au-delà des méthodes de questionnement direct. Il intègre l’apport des neurosciences et de la cognition implicite. « Générations Pub, de l’enfant à l’adulte, tous sous influence ? » (*) décortique les étapes et donne des pistes pour devenir un consommateur adulte.

INfluencia : le très jeune et le jeune enfant vous intéressent. Pourquoi ?

Julien Intartaglia : nous ne naissons pas consommateurs, nous le devenons et c’est bien le fruit d’un apprentissage depuis notre plus jeune âge. Or, pour comprendre ma génération et qui je suis en tant que consommateur adulte, il est pertinent de pister qui j’ai été. De plus, il y a peu de travaux universitaires sur l’enfant et ses comportements de consommateur.

INfluencia : que nous apprennent-ils de si particulier ?

Julien Intartaglia : en tout premier lieu que l’enfant est une proie de choix. En effet, les techniques des sciences cognitives appliquées aux enfants, pré-ados et ados permettent de comprendre l’impact sur notre inconscient et notre processus de décision. Elles ont notamment révélé que proscrire la publicité avant une certaine tranche d’âge n’était pas la vraie la question. Ainsi, on a constaté en Suède, où la publicité à la télévision avait été interdite dans les années 90, que les enfants avaient malgré tout développé une préférence pour une marque et étaient de vrais prescripteurs auprès de leurs parents. Et cela va bien au-delà de ce qu’ils peuvent verbaliser. Car sans qu’ils en aient conscience ni le souvenir, le simple fait d’être exposés (visuellement ou auditivement) à un produit ou une marque juste présents dans la maison ou ailleurs, et utilisés par la famille ou les amis, crée auprès d’eux de la notoriété, de la familiarité et donc de la préférence. Au point de l’intégrer dans leur top 3 lorsqu’ils doivent en choisir un plus tard.

Tandis qu’après 25 ans, ils garderont à leur esprit, 7 de ces marques sur 10 comme des références à consommer régulièrement ou occasionnellement. Ici, le contact publicitaire ne relève absolument pas du mass media et pourtant il est bien actif. Et en raison de son effet de répétition stimulé très tôt, il crée un réflexe à vie. L’enjeu est tellement fondamental, que déjà le fondateur de McDonald’s affirmait que s’il n’avait qu’un seul dollar à investir ce serait sur les enfants.