Un exemple de dispositif pour lutter contre le harcèlement scolaire : les «protecteurs et les repères» publié le 07/02/2020

Le contexte

 Suite à la découverte de quelques situations de harcèlement scolaire au sein de l’établissement (collège rural de 220 élèves environ), une équipe de professionnels comprenant : la CPE, un assistant d’éducation, une professeur d’histoire-géographie-EMC et une professeur documentaliste a décidé de mettre en place des actions visant à informer les élèves.

 Les deux premières années, des actions de sensibilisation à destination de tous les élèves du collège ont été menées en partenariat avec un gendarme spécialisé dans la formation des jeunes notamment sur la question du harcèlement scolaire.

 Ces actions se sont prolongées par l’organisation de soirées « conférence-débat » avec les parents d’élèves.

 Depuis l’année scolaire 2018-2019, cette même équipe de professionnels a mis en place un dispositif de repérage et de lutte contre le harcèlement scolaire.

Le dispositif

Pour réaliser ce projet, plusieurs étapes ont été nécessaires :

Constituer une équipe d’adultes « repères »

 Cette étape a été réalisée en deux temps. Dans un premier temps, la CPE, la professeur d’histoire-géographie-EMC et la professeur-documentaliste se sont auto-formées en accédant à diverses ressources définissant le harcèlement scolaire et mettant en avant les apports bénéfiques de la médiation par les pairs.
Elles ont également exploité le réseau ECLORE pour demander des retours d’expériences notamment des dispositifs « sentinelles » en lycée.

 Une fois cette étape franchie, ce trio a élaboré une liste de critères pour constituer une équipe de « repères ».
Proposition a été faite d’intégrer l’équipe de « repères » aux personnes suivantes :

• Le chef d’établissement qui, par sa fonction même, est garant de la sécurité des élèves et favorise par ses actions le développement d’un climat scolaire favorable au développement de l’élève.
• L’assistante sociale qui a un regard global sur l’élève et peut l’appréhender dans son ensemble.
• L’infirmière scolaire qui recueille régulièrement les confidences des élèves et apparaît comme une personne de confiance eut égard au secret professionnel.
• L’agent de maintenance de l’établissement scolaire qui est rarement en contact direct avec les élèves mais circule dans l’ensemble de l’établissement et a une posture privilégiée pour repérer les élèves isolés et les espaces « sensibles ».

 Même si tous les acteurs de l’Éducation nationale sont sensibilisés à la question du harcèlement scolaire, une réunion des "repères" a eu lieu pour redéfinir le harcèlement scolaire, lister les signes à repérer et enfin présenter et expliciter le protocole officiel de gestion des cas de harcèlement au sein des établissements (pdf de 534 Ko)

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Constituer une équipe solide de « protecteurs »

 Définir les critères de recrutement :
N’est pas protecteur qui veut. Inversement, aucun élève ne peut être contraint à être protecteur. Partant de ce constat, les « repères » ont présenté le dispositif, ses objectifs et ses modalités d’application à chaque classe de l’établissement pendant une heure en utilisant les heures de permanence disponibles dans leur emploi du temps. Le mode de recrutement a également été explicité. (voir document joint)

Suite à cette présentation, une liste d’élèves volontaires a été établie. Dans chaque classe, le nombre d’élèves volontaires a été conséquent.

Pour les repères, un « protecteur » doit réunir les qualités suivantes :

• être volontaire
• être digne de confiance, respecter le secret partagé inhérent à ce dispositif
• être à l’écoute des autres
• être capable de se rendre disponible
• être bienveillant
• s’engager

Les « repères » ont précisé que pour le bon équilibre de l’élève entre travail d’apprentissage et vie scolaire, un « protecteur » ne pourrait pas cumuler les fonctions (membre du FSE, du CVC, délégué de classe...)

Une fois les listes de volontaires constituées, l’équipe des repères s’est réunit et a sélectionné deux ou trois protecteurs par classe en fonction des effectifs des classes.

 Former les « protecteurs » :
Pendant une journée, les élèves « protecteurs » sont retirés des classes pour assister à une journée de formation organisée par les « repères ».

• 1er objectif : Favoriser l’esprit de corps
  Pour le bien-être des « protecteurs », ceux-ci ne doivent à aucun moment se sentir isolés. Bien que la méthode de médiation par les pairs demande un investissement personnel important aux élèves, ils ne doivent à aucun moment être le réceptacle de situations qui les dépassent sans avoir de recours.
  Bien sûr, les « repères » sont disponibles à tout moment. Mais l’objectif de la médiation par les pairs est de libérer la parole d’éventuelles victimes qui n’oseraient pas parler à l’adulte. Si l’adulte est physiquement omniprésent, cette méthode ne peut fonctionner.
  Lors de la journée de formation des « protecteurs » (voir document joint), le premier objectif est de créer un réseau de « protecteurs ». Des jeux de socialisation sont mis en place, auxquels participent les adultes « repères ».
  Journée de formation des "protecteurs" (PDF de 39.3 ko)

  Un exemple de dispositif pour lutter contre le harcèlement scolaire : les « protecteurs et les repères » - Académie de Poitiers.

  
  De plus, lors de la pause méridienne, « protecteurs » et « repères » déjeunent ensemble.

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• 2ème objectif : Conscientiser et verbaliser les émotions.
  Les émotions sont au cœur de bien des situations de harcèlement. Les « protecteurs » comme les « repères » seront amenés à y faire face.
  Les « repères » et les « protecteurs » sont invités à se positionner sur « l’arbre des postures » (voir document joint). Ainsi chacun choisi un petit personnage en fonction de l’état émotionnel dans lequel il se trouve à l’instant T puis il explique son choix à l’ensemble des participants.
  Ainsi, chacun doit se recentrer sur soi, conscientiser son état puis sélectionner les mots pour partager cet état avec l’ensemble de l’assistance.
  Ce travail n’est possible que si un climat de confiance a précédemment été instauré.
  

  L’arbre des postures

• 3ème objectif : Définir le harcèlement scolaire
  Le harcèlement scolaire est un phénomène largement médiatisé et les exemples mis en avant sont le plus souvent extrêmes et dramatiques.
  Les « protecteurs » travaillent ensemble pour bien comprendre ce qu’est le harcèlement scolaire et qu’une situation dramatique ne le devient qu’après un processus long et récurrent.
  L’objectif du dispositif « protecteurs et repères » est de repérer des situations précocement, avant qu’elles ne puissent se développer.
  Les « protecteurs », en travaillant en groupes, ont pour consigne de représenter le harcèlement scolaire (carte mentale, dessin, BD…). (voir documents joints)

Les « repères » font alors une intervention détaillant le protocole d’action de l’Éducation nationale.

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• 4ème objectif : Concrètement, un « protecteur », ça fait quoi ?
  À cette étape, les élèves « protecteurs » sont encore dans l’incertitude. Ils savent théoriquement ce qui est attendu d’eux, mais se questionnent sur leur attitude une fois retrouvé le quotidien.
  À l’aide de l’ouvrage : D’Emmanuelle Piquet, Je me défends du harcèlement, publié chez Albin Michel Jeunesse, les « protecteurs », par groupe, sont face à un témoignage écrit d’un adolescent harcelé.
  Les consignes sont les suivantes :
  • repérer dans le témoignage, les signes du harcèlement.
  • repérer dans le témoignage, s’il y a des témoins.
  • repérer dans le témoignage, l’attitude du ou des harceleurs, qui ils sont, comment ils agissent.

Enfin, ils doivent répondre à la question suivante : je suis « protecteur » et j’ai connaissance de ces faits, "comment est-ce que je réagis ?"

Lors du temps de restitution, chaque groupe expose aux autres la situation qui lui a été confiée et propose des manières d’agir. S’en suit un débat.

Lors de ces deux derniers points, il est intéressant de travailler en partenariat avec l’équipe mobile de sécurité (pdf de 1,6 Mo) du Rectorat et/ou avec la gendarmerie locale pour remettre l’établissement scolaire au sein de l’espace proche. Il est possible de faire appel aux services de police en milieu urbain.
Par ailleurs, on assiste à une judiciarisation de nombreuses situations de harcèlement et il est souhaitable que les élèves aient connaissance de la législation interne à l’établissement scolaire comme de celle de la société.

 Se réunir
Des réunions incluant "repères" et "protecteurs" ont lieu entre chaque période de vacances sur la pause méridienne. L’objectif est de faire un bilan périodique des observations et actions menées.

Le bilan

Celui-ci n’est pas arrêté puisque nous n’avons qu’une année scolaire complète comme référence. Ce que l’on peut retirer de cette courte expérience c’est que le dispositif fonctionne puisque la première année, deux cas susceptibles de mener à du harcèlement ont été identifiés très rapidement.
Nous notons également que de nombreuses situations de conflits ou de mal-être nous sont apparues. Même si ces situations ne relevaient pas du harcèlement, une aide a pu être apportée.
Ce dispositif joue un rôle notable dans l’instauration et la pérennisation d’un climat scolaire favorable aux élèves.

Les documents joints :

Les documents de référence :

La bibliographie :

PIQUET Emmanuelle, MANDEL Lisa. Je me défends du harcèlement. Albin Michel Jeunesse. 2016
inter cdi
InterCDI n°282. Novembre-Décembre 2019. Dossier spécial Harcèlement scolaire.