Élections présidentielles françaises : mobiliser les jeunes publié le 05/05/2017

Pour la deuxième année consécutive, l’équipe pédagogique du CEPMO a décidé de reconduire un projet semestriel impliquant l’ensemble de l’établissement.

Alors que nous avions choisi la COP21 en 2015-2016 pour mettre en place un jeu de simulation, notre choix s’est très rapidement porté sur le thème des élections présidentielles 2017 en France.
En effet, ce sujet nous permettait d’ancrer notre démarche dans les programmes de l’Éducation Morale et Civique : nous pouvions par ce biais aborder les thèmes « Égalité et discrimination » en classe de Seconde, « Les enjeux moraux et civiques de la société de l’information » en classe de Première, « Pluralisme des croyances et laïcité » et « Biologie, éthique, société et environnement » en Terminale.

Afin de rendre ce sujet tangible, nous avons décidé d’organiser un jeu de rôle géant à l’échelle de l’établissement : tous les élèves devaient être concernés.
Des groupes d’élèves ont été désignés représentants d’un parti politique : ils devaient défendre les idées de ce parti dans le cadre d’un débat.
Nous souhaitions d’une part permettre à nos élèves d’agir en citoyens responsables et informés en allant voter, et d’autre part renforcer les compétences info-documentaires de nos élèves en leur permettant d’analyser des programmes électoraux, enfin consolider leurs compétences d’argumentation et de contre-argumentation lors d’un débat.

Créer des dossiers documentaires : connaissance des partis et des programmes

Pour ce faire, nous avons lancé dès le mois de septembre ce projet en amenant les élèves de seconde à collecter l’information nécessaire à une bonne connaissance des candidats et des programmes.
Afin de rendre ce travail plus concret, nous sommes partis des grandes questions soulevées par les jeunes autour de ces élections, plusieurs thèmes ont attiré leur attention : le pouvoir d’achat-l’emploi-la fiscalité, l’immigration, l’Europe, l’environnement, les inégalités, l’éducation.
Le fait que ce soit les élèves qui déterminent les thèmes à traiter a été très fédérateur pour la mise au travail et pour l’adhésion du groupe.

Ainsi à raison de deux séances par semaines, les secondes par groupe de deux se réunissaient et établissaient des dossiers documentaires sur les candidats et leur programme pour les uns, sur les différents thèmes pour les autres. (voir Annexe 1 exemple de séance pédagogique)

Dans le même temps d’autres élèves de seconde devaient endosser la fonction de journalistes, dépouillant la presse et collectant des données sur chacun des thèmes présélectionnés.

D’autres étaient les représentants des syndicats et devaient définir les questions majeures et les points de vue défendus par les syndicalistes. Même démarche pour ceux qui endossaient le rôle du patronat.
Enfin un dernier groupe se devait d’organiser l’événement et les différents rendez-vous fixés par ce projet global.

Ce travail de recherche s’est fait à partir des sites des principaux partis clairement définis ; les élèves devaient être à même de connaître l’histoire de la création de leur parti, les candidats en lice, les grands traits des partis politiques respectifs.

Après une période de travail, les élèves ont établi des fiches candidats pour chaque parti et ont dressé une première ébauche des programmes (voir Annexe 2).

Les autres groupes : syndicalistes, représentants du patronat, associations de protection de l‘environnement, se sont regroupés avec les journalistes et ont défini une charte éthique quant à leur positionnement dans la campagne. Après débat, ils ont opté pour la neutralité et l’objectivité de leurs propos au sein des débats.

Par ce biais les secondes, outre une première approche des partis politiques, ont aussi développé un certains nombres de compétences info-documentaires :

• Mobiliser ses connaissance : savoir identifier des documents (nature, auteur, date, conditions de production).
• Analyser, s’informer : savoir prélever, hiérarchiser et confronter des informations selon des approches spécifiques en fonction du document ou du corpus documentaire. / Savoir utiliser de manière critique les moteurs de recherche et les ressources en ligne (internet, intranet de l’établissement, blogs). / Distinguer les idées principales et secondaires / Mettre en lien les éléments de façon logique.
• Argumenter, justifier : savoir prélever, hiérarchiser et confronter des informations selon des approches spécifiques en fonction du document ou du corpus documentaire.
• Communiquer, rédiger, s’exprimer : connaître la déontologie des journalistes.
• Être élève : savoir mener à bien une recherche individuelle ou au sein d’un groupe. / Se remettre en question / Dialoguer, confronter, collaborer /Accepter un regard critique.

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  Élaborer une argumentation et une contre-argumentation

Après les vacances d’octobre, nous avons consacré 1h30 pour tout l’établissement afin de présenter le projet aux autres élèves : rendre les élections présidentielles plus concrètes et leur permettre d’acquérir une meilleure connaissance des programmes électoraux.
Le jeu de rôle géant était lancé, avec pour commencer un quizz sur les répliques des hommes politiques afin de déterminer l’ordre de passage du tirage au sort. Les élèves répartis en groupe ont tiré au hasard leur parti sachant que les groupes ont été élaborés par l’équipe pédagogique pour équilibrer les niveaux, les âges, les compétences de chacun selon leur filière.
Les équipes étaient alors déterminées par parti. Un autre groupe d’élèves représentait les journalistes.

Chaque groupe avait une mission bien précise :

• Étudier le programme de chaque parti pour en tirer une argumentation construite et élaborée.
• Étudier les programmes des autres partis pour être en mesure de contre argumenter lors du débat.
• Déterminer l’identité du parti : slogan, flyer, costume.

Les élèves avaient à leur disposition les programmes des différents partis, à partir desquels ils ont construit leurs arguments (Annexe 3  : exemple sur le thème de l’Éducation).

Les journalistes quant à eux devaient avoir une bonne connaissance de leur thème afin de pouvoir relancer le débat et être à même d’amener de l’objectivité et des chiffres plus représentatifs des faits.
Deux élèves avaient en charge chaque thème : l’éducation, l’environnement, le pouvoir d’achat-l’emploi-la fiscalité, l’immigration, l’Europe, les inégalités.
L’objectif des journalistes : arbitrer les échanges en corrigeant les affirmations des uns et des autres ou en relançant le débat.

D’autre part, ils devaient élaborer un questionnaire pour chaque parti, sur chaque thème afin de mener une interview le jour du débat. Interview qui a donné lieu à l’enregistrement d’une émission de radio.

Débattre, échanger, se questionner

Ainsi, nous avons passé deux périodes, de novembre à février à nous retrouver toutes les trois semaines autour du thème des élections. Les élèves ont pu prendre le temps de comprendre les programmes, d’échanger, de discuter des enjeux de chaque thème et de se mettre dans la peau des personnages politiques. Tout cela au gré des changements de candidats, des résultats des primaires, des alliances.
La perspective longue donnée à ce projet nous a permis de véritablement comprendre la façon dont se déroulait une année électorale, la manière dont la vie politique se jouait.
Pour faciliter la circulation de l’information, un fil d’actualité permettait de suivre les événements sous forme de panneaux d’informations.

Puis le jour du débat est arrivé (voir Annexe 4) et chaque parti s’est installé autour de la table. Nous avons abordé les thèmes sur lesquels les élèves avaient décidé de travailler, et nous avons échangé sur les différentes propositions des partis politiques.
Le débat animé par les journalistes et les organisateurs a été riche en rebondissements mais surtout a permis d’éclairer les élèves sur ce qui se jouait réellement dans ces élections : les politiques à venir dans des domaines qui touchent l’ensemble des questions sociétales en cours.

Bilan

L’organisation pour la deuxième année consécutive d’un jeu de simulation géant, consolide nos premières analyses. En effet, nous constatons qu’il permet aux élèves d’exercer pleinement leur citoyenneté, de développer leur esprit critique, de prendre des responsabilités et des initiatives au sein du collectif, de travailler en équipe et de construire une argumentation pour défendre leurs idées.

Ce jour là, Antoine était un anticapitaliste, Chloé une frontiste, Camille une militante écologiste, Aloha une républicaine, Sarah était Debout la France, Mano socialiste, Louis défendait les ouvriers, Céleste était insoumise et Clémence organisait les débats, exprimant aussi le point de vue du parti manquant car arrivé en lice tardivement, En Marche.

Du côté des journalistes, Bastien était le défenseur des chiffres justes, Léo et José ont élevé le débat autour des questions essentielles de la transition écologique et nous avons assisté à de véritables prises de position de journalistes dont l’éthique était irréprochable. Une belle leçon de déontologie !
Titouan a été durant tout le débat le maître du temps pour bien marquer que le temps d’expression devait être équivalent pour tous, c’est aussi ça la démocratie, ne pas privilégier ceux qui parlent le plus aisément mais laisser la parole à chacun, la place à toutes les idées.
Mais ce jour là, au-delà des partis, au-delà des candidats, ils étaient plus que tout des citoyens éclairés, des citoyens à part entière qui le jour des élections auraient toutes les cartes en main pour choisir de façon objective leur parti, leurs idées.

Au Cepmo la citoyenneté se construit au jour le jour, fait parti de notre quotidien par le biais d’échanges, d’agora qui amènent nos élèves à vivre pleinement leur liberté d’expression dans le respect de chacun, dans l’écoute de chaque opinion. Néanmoins, ce jeu de simulation vient renforcer nos autres dispositifs pédagogiques en axant la communication autour d’enjeux sociétaux plus globaux.

“L’homme est pleinement homme dans le citoyen.” Marcel Gauchet