Noël : quelle bibliographie en collège public ? publié le 26/11/2021  - mis à jour le 28/11/2021

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Noël et laïcité

Quelques éléments de réflexion...

Ce que dit la loi

La fiche 16 du vademecum La laïcité à l’école (mis à jour le 13/10/2020) parle de Noël comme d’une fête sécularisée et pose le cadre juridique de la célébration de telles fêtes. Il rappelle le principe de neutralité à l’égard des cultes qui s’oppose « à l’installation, dans (...) un emplacement public, d’un signe ou emblème manifestant la reconnaissance d’un culte ou marquant une préférence religieuse ». Ce texte de la loi de 1905 précise par ailleurs que « cette interdiction peut faire l’objet d’exceptions, notamment lorsque des signes ou des emblèmes religieux sont installés dans un établissement public à titre d’exposition. »

Un faisceau d’indices est proposé pour :

« rechercher s’il existe des circonstances particulières permettant de reconnaître un caractère culturel, artistique ou festif à une représentation religieuse et de concilier son installation avec la principe de neutralité du service public :
  • le contexte doit être dépourvu de tout prosélytisme ;
  • les usages locaux doivent être pris en compte ;
  • le lieu où est installé l’emblème ou la représentation religieuse doit également être pris en considération.

Charivari à l’école en déduit ce qui peut être fait à l’école publique ou pas mais peu de pistes en terme de littérature jeunesse.

Qu’en est-il de la littérature ?

D’une manière plus générale, l’article L’Enseignement du fait religieux sur eduscol (mis à jour en novembre 2020)
rappelle que l’Enseignement du fait religieux s’appuie sur des textes religieux :

Rites, textes fondateurs, coutumes, symboles, traces matérielles ou immatérielles, manifestations sociales, œuvres sont autant de faits religieux qui ont eu (et qui ont encore) une influence plus ou moins prégnante sur les sociétés antiques, médiévales, modernes et contemporaines. L’enseignement des faits religieux n’est pas une discipline à part entière, mais un enseignement transversal qui encourage le décloisonnement disciplinaire. Inscrit dans le socle commun de connaissances, de compétences et de culture, l’enseignement des faits religieux s’appuie par exemple sur les grands textes religieux, les œuvres d’art, et présente la diversité des représentations et des visions du monde.

Sauf erreur de notre part, nous n’avons pas trouvé de pistes concrètes pour l’enrichissement du fonds du CDI sur eduscol. Pour des éléments de réflexion plus précis à propos du fonds documentaire, il faut se tourner vers les bibliothèques.

 Extraits du rapport de 2016 Laïcité et fait religieux dans les bibliothèques publiques de Françoise Legendre, Inspecteur général des bibliothèques (pdf de 1,6 Mo)

6.2.1 Le pluralisme des collections

(…) Les collections, ressources et contenus disponibles dans ou par les bibliothèques reflètent la pluralité et la diversité de la société et doivent être exemptes de toutes formes de censure idéologique, politique, religieuse ou de pressions commerciales. »

6.6.7. L’offre en direction de l’enfance
Les principes concernant l’offre documentaire pour les enfants sont en grande part les mêmes que ceux qu’on peut recommander pour l’ensemble des ressources des bibliothèques.
(…)
Le paysage éditorial est spécifique il est vrai, les critères de maturité des enfants, les difficultés et capacités de lecture, les caractéristiques d’accessibilité générale des documents interviennent de façon différente.
(…)
Par ailleurs, le lien avec les programmes scolaires intégrant à divers stades l’enseignement des faits religieux, mais aussi les demandes ou réactions de parents ou familles, impliquent une attention spécifique.

Il est donc très important de penser l’offre documentaire et fictionnelle en appliquant les principes de diversité de religions et convictions, en étant attentifs aux albums, bandes dessinées, romans et contes comportant des aspects ayant trait à l’univers des religions ou des questionnements spirituels, en intégrant bien sûr les approches documentaires historiques, artistiques, comparatives, mais aussi humoristiques, décapantes ou dérangeantes qu’on peut notamment rencontrer dans certains contes.

Françoise Legendre cite ensuite Evelyne Cévin dont l’article Le conteur et les sources religieuses de son répertoire (pdf de 704 Ko) fait partie du dossier Comment faire avec Dieu ? du n° 288 de la Revue des Livres pour enfants

« Ces histoires sont ancrées dans une certaine culture, une certaine religion, mais par leur caractère universel et souvent leurs ressemblances au-delà des clivages religieux, elle ont toute leur place dans cette édition pour la jeunesse ».

Puis, elle ajoute :

Cette mise en perspective et sa visibilité même dans l’offre de la bibliothèque participe de la formation citoyenne et de la construction du cheminement, chez les enfants, même très jeunes, vers la reconnaissance des autres, semblables ou différents (dans la classe, le quartier, le monde), vers la conscience de la permanence des questions et de la multiplicité des réponses.

Si le pluralisme des collections participe à la formation citoyenne, l’article d’Evelyne Cévin soulève cependant des réticences quant à l’utilisation des contes comportant des éléments religieux.

 Extraits de Le conteur et les sources religieuses de son répertoire, Evelyne Cévin, La Revue des livres pour enfants n°288 d’avril 2016 (pdf de 704 Ko)

Evelyne Cévin s’interroge :

Il est étrange que, dans un pays où l’on chôme le 15 août, fête de la Vierge, le lundi de Pâques, le jeudi de l’Ascension et le jour de la Nativité, on hésite à raconter les histoires afférentes à ce folklore chrétien. Les écoles ferment ces jours-là, mais on en dit rarement la raison aux enfants ! Et si les enfants ne connaissent plus rien de ces imageries, de ces symboles et tout ce qui va avec, comment liront-ils plus tard Tartuffe, regarderont-ils « La Descente de croix » de P.P. Rubens ou écouteront-ils « La Passion selon saint Jean » de J.-S. Bach ? Ces histoires peuvent contribuer à susciter des questions, des curiosités, des interrogations, sans nul doute à cultiver.

(...)

Donc, méfiance, méfiance à l’égard de tout ce qui pourrait contenir des éléments jugés « religieux », soit par répulsion, soit par crainte de provoquer des réactions de certains, ceci au nom d’une laïcité bien mal comprise. Et cela, avant même d’avoir eu le moindre débat avec les personnes directement concernées. Remarquons que ce souci ne s’applique en réalité qu’à l’égard des trois religions monothéistes et que tout ce qui peut concerner les autres religions du monde est envisagé plus sereinement, sans trop d’inquiétude de blesser qui que ce soit.

(...)

Dans l’ensemble, on a donc l’impression que l’on hésite moins à raconter des contes de traditions religieuses « exotiques » que ceux issus des trois monothéismes et plus particulièrement ceux de la tradition chrétienne. Celle-ci devrait pourtant nous être la plus familière puisque la plus connue en France, au regard de notre calendrier, de nos monuments, de notre littérature, de notre peinture et de nos musiques traditionnelle ou classique. On n’hésite pas à se lancer dans des contes étiologiques kabyles, australiens ou comoriens, alors qu’on ne connaît rien (sauf exception) de ces cultures, mais on refuse de dire ou de lire à haute voix « La Genèse » comme le poème magnifique qu’elle est. Peur d’être accusé de prosélytisme ? Peur de se trahir ? Derrière le côté politiquement correct affiché (« Je ne veux pas blesser »), ne s’agit-il pas plutôt d’un refus de s’engager pleinement dans ces récits énigmatiques et poétiques ?

Nous l’avons compris, proposer un fonds comportant des éléments religieux n’est pas simple, encore moins lorsqu’il s’agit du christianisme dont la Nativité et l’épiphanie (fête des rois en janvier) font partie.

D’une manière générale, les ouvrages documentaires spécifiquement sur Noël et encore disponibles sont peu nombreux pour un public de collégiens.

Quant à l’offre fictionnelle, elle nécessite un travail d’approfondissement. Pour l’instant, plusieurs titres lus partent du principe que l’histoire de la Nativité est connue ; des raccourcis sont faits rendant le texte incohérent pour le néophyte.

Dans les sélections qui suivent, nous avons mentionné lorsqu’un personnage est croyant ou que des éléments "religieux" sont présents.