Le Petit Chaperon Rouge entre Tradition et modernité publié le 17/06/2015

Adapter et réécrire un conte avec son appareil connecté personnel en classe de seconde Bac Professionnel.

A l’heure de l’entrée du numérique à l’école, comment allier la tradition littéraire et la modernité ? Comment optimiser l’enseignement, l’acquisition des compétences, susciter l’intérêt de nos élèves pour la culture littéraire classique et populaire ? Comment le numérique peut-il être un auxiliaire précieux et innovant au service des lettres ?

Le projet

Dans le cadre des EGLS (Enseignements Généraux liés à la Spécialité) d’une classe de seconde Bac Professionnel ASSP (Accompagnement, Soins et Services à la Personne), j’ai mis en place un projet annuel de réadaptation d’un conte pour enfants.

En effet, dans le cadre de leur formation, ces élèves sont amenés à effectuer leurs stages en crèche ou dans des écoles maternelles. La culture de la littérature jeunesse et notamment des contes traditionnels européens est un des paramètres fondamentaux de leur cursus scolaire.
Il s’agit ainsi de s’approprier un conte traditionnel, celui de Charles Perrault, Le Petit Chaperon Rouge, et de le réécrire en l’ancrant dans la modernité. L’objectif final étant de créer un webmagazine (A paraître début juillet 2015 sur le site Madmagz.fr) complet comportant les réécritures et les illustrations des élèves et de les lire à un jeune public, des élèves de maternelle ou d’école primaire.

La démarche BYOD

L’originalité et l’intérêt d’un tel projet reposent surtout sur l’utilisation des appareils connectés personnels des élèves en classe, c’est à dire sur une démarche AVEC (Apportez Vos Equipements Connectés) ou BYOD en anglais (Bring your own Device), il s’agit en réalité de l’ensemble des objets personnels et connectés : smartphones, ordinateurs portables, tablettes.
Les élèves travaillent avec leur propre matériel qu’ils apportent en classe, en groupe ou seuls, à leur convenance.

Cette démarche nouvelle est possible si certaines précautions sont adoptées préalablement :

  • Rédiger une charte d’utilisation des BYOD ;
  • Assurer la sécurité physique du matériel (armoire fermée à clefs par exemple) ;
  • Assurer un accès WIFI sécurisé ;
  • Rédiger un avenant au règlement intérieur de l’établissement scolaire pour déroger à l’article L511-5 du code de l’éducation ;
  • Communiquer et expliquer le projet aux familles.

Lorsque ce travail préparatoire est mis en place, la pédagogie peut réellement commencer.

Selon leurs matériels respectifs, les élèves peuvent se servir de différents logiciels ou applications. Dans le cadre de ce projet, ils ont dû utiliser les logiciels de traitement de texte, de transformation de l’image mais aussi d’Internet pour effectuer des recherches, communiquer au sein du groupe, créer le webmagazine.


Les réseaux sociaux ou le travail hors de la classe

S’agissant d’un projet annuel, à raison d’une heure hebdomadaire seulement, il a fallu respecter un échéancier et trouver des solutions afin d’optimiser ce temps de travail.
Nous avons donc créé un groupe sur Facebook puisque chaque élève y avait déjà un profil et pouvait ainsi facilement s’y rattacher.

Pour des raisons de sécurité évidente, j’ai choisi d’être administratrice de ce groupe et de le paramétrer afin de préserver sa confidentialité. Ce fut aussi l’occasion de parler de la trace numérique et du respect des autres en travaillant sur une charte.

De plus, nous y avons invité différents acteurs susceptibles de nous aider, de nous conseiller quant à notre travail. Nous avons par exemple convié un illustrateur jeunesse de Poitiers, Monsieur Luc Turlan, un jeune comédien parisien de talent, Monsieur Quentin Faure, ainsi que l’École des Lettres.

Les bénéfices de la création d’un tel groupe sur Facebook sont incontestables et ont même dépassé mes espérances. Mieux qu’un journal de Bord, ce groupe intitulé « projet Petit Chaperon Rouge » nous a permis de mutualiser le travail de chacun, de partager des informations, de communiquer entre nous et avec les professionnels invités (désenclavant ainsi notre petit lycée professionnel de campagne) et tout cela en dehors de la classe.
L’heure hebdomadaire d’EGLS s’est ainsi démultipliée très simplement et avec beaucoup d’enthousiasme.

Tradition littéraire et modernité

Avant de réécrire ce conte et de l’ancrer dans la modernité, nous avons étudié plusieurs contes traditionnels, insistant sur leur structure, leur démarche pédagogique et psychologique.
Ainsi ai-je pu aborder différentes notions de littérature comme le schéma narratif, le schéma actanciel, le conte et l’oralité, le merveilleux… et lire des extraits de La Psychanalyse des Contes de Fées de Bruno Bettelheim…
Lorsque les bases étaient suffisantes, les réécritures ont pu débuter. Des groupes de deux, trois ou quatre personnes se sont constitués tout naturellement au gré des envies et des idées. La consigne était la même pour chacun, à savoir, ancrer le conte dans la modernité pour donner une « leçon » de vie à un jeune public. Par exemple, un groupe a rédigé une courte pièce de théâtre sur les dangers de l’alcool, le héros, petit Chaperon Rouge moderne est confronté à un personnage (loup) qui le tente mais l’arrivée d’un véritable ami (bûcheron) règlera la situation. Un autre exemple, celui d’un Petit-Chaperon proie d’un Cybercriminel sur Facebook, etc…
Les élèves ont construit eux-mêmes leurs illustrations sous différentes formes : dessins, montage photographique, vidéos…Ils ont ainsi pu mettre en avant leur créativité, pour certains leurs talents de dessinateurs et pour d’autres leurs compétences numériques.

Le numérique permet donc de conjuguer tradition littéraire et modernité sans dénaturer l’un ni travestir l’autre. Il permet également d’optimiser l’enseignement des lettres, de renforcer certaines compétences, de susciter l’enthousiasme et l’intérêt des élèves pour la littérature car il offre une autre focale. Il devient alors un outil précieux et pertinent dans le cadre de l’enseignement du Français, il est au service de la Littérature et de l’Humanisme.

Documents joints

Charte des usages de Facebook écrite avec les élèves

Charte réalisée avec les élèves pour l’utilisation des appareils personnels