trace d'écart (palindrome) publié le 02/07/2009  - mis à jour le 03/07/2009

L'intervention de Bernard Decourchelle ARt'RESEAU 2009

Pages : 123

La pratique de l’élève

Cheminement :

Si, comme toute autre discipline scolaire, l’enseignement des arts plastiques repose sur du connu, sur un corpus de connaissances objectives et de savoir-faire transmissibles, il ne se limite pas à cet ensemble fini. Il repose aussi sur une part d’inconnu, sur l’expérience artistique qui se vit1. Ce qui s’enseigne ce sont les savoir-faire et les connaissances que mobilise cette expérience. L’enseignement des arts plastiques procure aux élèves les conditions de cette expérience.

Celle-ci se concrétise dans une activité d’exploration des moyens plastiques et constitue les bases d’une pratique artistique. Cette pratique sollicite la part de subjectivité, de singularité, d’expérience personnelle de chaque élève1, pour la mettre à l’épreuve de contraintes matérielles communes, d’opérations à faire, de notions à mettre en jeu, toutes garantes d’une construction, d’un commencement. Le cheminement de chaque élève s’effectue ainsi sur un territoire de repères communs à tous. Dans cette objectivation, les élèves acquièrent maîtrise et savoir-faire en même temps que, très concrètement, se forme leur regard, c’est à dire leur faculté d’observer le monde, de le mettre à distance, de le représenter. La pratique s’inscrit donc dans une activité mais ne se confond pas avec cette dernière. Entre autre, la créativité de l’élève est un ressort qui contribue à l’exercice d’une pratique artistique1. Elle permet le cheminement qui donne loisir à l’élève de tâtonner, d’esquisser, de bifurquer, de réfléchir, de se documenter, de revenir sur ses pas, de découvrir des voies inattendues, de faire des choix.

La pratique artistique a toujours pour horizon d’affirmer un parti pris dont l’élève assume les choix formels et expressifs en regard d’une question posée dans le cadre d’une situation d’enseignement.
Programmes de collège du 28 aout 2008 »

Cette volonté de prise en compte de l’exercice d’une pratique abordant l’artistique est une volonté singulière -elle aussi- dans notre système d’enseignement national et a besoin de moyens singuliers.

Comment renvoyer, provoquer, aider l’élève à adopter ce regard distancié, auto-réflexif sur sa propre pratique, sans les conditions concrètes du temps de dialogue à partager tour à tour avec chaque élève de toute la classe ?
Car si on parle de subjectivité, on parle de sujet pensant. Si la socialisation – verbalisation de ces subjectivités est un moment fécond de nos cours, encore faut-il aussi un temps individuel – et duel quand le prof s’en mêle- pour faire émerger chez chaque sujet-élève la part singulière de son geste plastique.

Ces remarques n’avaient pas pour but d’ouvrir un énième débat sur les Moyens, mais de ne pas oublier que la spécificité d’un enseignement réellement tourné vers l’artistique passe aussi par une singularité des postures de l’enseignant, de l’élève, du cadre des cours et de leurs moyens.

Revenons à notre question charnière : Qu’est-ce qui me semble alors prioritaire de faire émerger de ma connaissance des processus de nature artistique ?

Si l’artistique est ce qui modifie notre rapport au monde -et à l’art- en dehors des voies de la stricte rationalité, il présente obligatoirement un écart par rapport au connu, au prévisible, au banal.

À ce titre j’ai fabriqué ce petit carton qui sera un peu l’étendard de mes propos sur lequel figure le palindrome

(1) souligné par moi