Le style dans l'art publié le 16/06/2009  - mis à jour le 18/06/2009

Monique Varieras, psychologue, psychanalyste : l'intervention à ARt'RESEAU 2009

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En 1930, dans son allocution pour le prix Goethe, Freud rapproche les deux hommes Goethe et Léonard de Vinci en ce qu’ils étaient l’un et l’autre savants et artistes. Mais il dit que Léonard de Vinci « ne s’accordait pas avec l’artiste qu’il le dérangeait et peut-être même l’étouffait-il à la fin. » Il lui manquait, dit-il, un intérêt pour ce qui est érotique. Il considérait Goethe à bien des égards proche de la psychanalyse, et plus épanoui.

Il cite Méphisto dans le « Faust » de Goethe :
Le meilleur de ce que tu sais,
Tu ne saurais, pourtant, le dire aux écoliers.

Freud souligne une possible incompatibilité entre un certain savoir, et la démarche artistique, un savoir bouchon, obturant l’énigme accolée à tout savoir, celle du sexe et de la mort.

Revenons à Lacan :
Dans un Dans un bref passage de « L’éthique de la psychanalyse », Lacan pose « l’architecture primitive comme quelque chose d’organisée autour d’un vide (…), le vrai sens de toute architecture ». L’architecture serait donc un arrangement structurel dans un espace qui fait bord au non-lieu et tente de définir l’habitable, se heurtant du même coup à la limite toujours fragile entre un dedans et un dehors.
Lacan opère un renversement par rapport à Freud (et ce n’est pas le seul renversement). Sa visée n’est pas la capture du refoulé de l’artiste ou de l’œuvre, mais d’y trouver ce qui peut faire enseignement pour la théorie psychanalytique.

Il fait du trou une place topologique enserrée par trois éléments, représentés par le nouage de trois cercles : le réel, irréductible au sens, il surgit, chaque fois, dans la rencontre comme impossible ; le symbolique qui implique l’acte du sujet dans son rapport au désir ; et l’imaginaire qui fabrique le fantasme, les histoires qu’on se raconte, et tisse l’enveloppe corporelle.

Du trou s’échappent les choses, marquées du style du sujet, inféré par le cycle des répétitions, comme tentatives toujours manquées de retrouver un objet, cause d’une jouissance perdue. Le style serait ce qui vient de loin, un trait, comme témoignage d’une rencontre primordiale, du signifiant, de l’Autre, et des effets de jouissance de cette rencontre sur le corps. La première rencontre engendre la première séparation. À ce moment, l’Autre se constitue (à travers la mère), et du même effet se trouve dépositaire de l’objet. Le sujet s’inscrit dans le désir de l’Autre, lui emprunte ses premiers signifiants, et sans recevoir d’accuser réception, la réitération de sa demande, ne fait que creuser le trou. Un circuit s’établit où l’entrée égale la sortie.

En somme :

 La naissance de l’objet inclus en même temps sa perte.
 Du trait émerge une jouissance primordiale.
 Sur le bord du trait, l’angoisse fait naître le désir, et fonde la structure subjective.