« Composer avec l’histoire » : de l’archétype, de la citation et de la trace… publié le 26/11/2007

des questions sur la thématique d'ARt'RESEAU 2008 par Chantal Coyaud

« De l’histoire personnelle à l’archétype, comme démarche artistique »

Dans la seconde moitié du XXème siècle, de nombreux artistes construisent leur démarche à partir de leur histoire personnelle ; Annette Messager et Boltanski exploitent des fragments de l’enfance ; l’expérience familiale nourrit le chemin féministe de Louise Bourgeois ; Georges Segal fige dans l’instant l’attitude de personnes réelles (serveuse, caissière de cinéma etc.) ; il banalise leur fonction dans un cadre sociétal ; Boltanski s’appuie sur des photographies d’époque pour travailler la mémoire de la Shoah ; l’œuvre d’Anselm Kieffer se fonde sur sa traversée de l’après-guerre allemande, celle de Shirin Neshat sur son vécu de femme arabe et musulmane dans une culture islamique, celle d’Ilya Kabakov sur l’ expérience de la Russie soviétique ; ces histoires personnelles, devenues œuvres, renvoient chacun à sa propre histoire et culture (que se soit de l’ordre de la psyché, du social, du culturel, de la mémoire …) et deviennent des archétypes.
Le vécu des élèves peut donc être convoqué dans un travail pédagogique en relation avec l’Histoire. On peut donc travailler pour « Composer avec l’histoire » avec, par exemple leur quotidien, le cadre scolaire, l’appartenance à un quartier, les migrations des familles…

« Composer avec l’histoire de l’art et citation ».

Le questionnement des élèves peut porter sur « Comment l’emprunt aux œuvres du passé peut-il participer à une production contemporaine ? » ou encore « Quelle est la part du passé, quelle est celle du contemporain ? ».
La citation, celle des Ménines de Picasso par exemple, est un procédé intentionnel relativement évident d’approche par des élèves de collège. L’emprunt au passé peut cependant être plus diffus : par exemple, Rubens « reprend » dans sa peinture les corps de Michel Ange et la diagonale du Caravage ; En faire l’analyse peut convoquer pour des élèves de lycée les questions de rupture et continuité des démarches artistiques. Le postmodernisme utilise la citation de façon évidente, par exemple en architecture (ex : Ricardo Bofill). Bertrand Lavier propose une sculpture avec la touche Van Gogh, peut-on parler de citation ou de pastiche ? Utiliser la citation pour un artiste suppose une volonté de la donner à voir ; l’emprunt lui n’est pas toujours de cet ordre.
Reconnaître et interroger la citation dans l’œuvre et/ou la démarche artistique participe de construction de la culture artistique et peut rencontrer la question de la référence.

« Histoire contemporaine / Histoire plastique » ou « Comment une démarche artistique peut elle fusionner avec une problématique du monde contemporain ? »

La société de consommation des années 60 a produit des postures artistiques qui la questionne et/ou la dénonce : les poubelles d’Arman , l’image de communication chez Warhol, la vidéo chez Nam June Paik … et au delà : on peut penser à la chirurgie esthétique chez Orlan, aux œuvres de Michel Blazy , lesquelles s’ élaborent à partir des énergies fébriles du vivant et montrent de façon inquiétante la décrépitude de tout organisme, à l’interactivité entre le spectateur et certaines œuvres comme celles de Fred Forest qui invite les internautes du monde entier à participer à « The digital street corner » …etc… L’architecture est également le produit du croisement entre des formes (liées à une histoire plastique) et les modes de vie et modes de production … ( liés à l’histoire).
Cette proximité entre les grandes questions d’une société et les démarches artistiques existe avant le XXème siècle. Elle est moins lisible par les élèves en raison d’obstacles culturels (notamment la culture historique).

Les œuvres sont aussi le produit des questionnements sociétaux et s’inscrivent dans un inconscient collectif. Prendre conscience de cette articulation rapproche l’élève de la démarche artistique.

« Faire trace, faire mémoire »

De nombreux artistes utilisent la trace, traces d’une histoire, ses restes, traces multiples du quotidien (empreinte, photographie, objet, fragment, etc.) pour évoquer, construire, poétiser la mémoire : on peut penser aux portraits pseudo biographiques comme les portraits-robots d’Arman ou aux tableaux pièges de Spoerri ; Boltanski utilise les traces photographiques pour « faire mémoire » ou encore des objets « Objets ayant appartenu à la jeune fille de Bordeaux », Roman Opalka poursuit une écriture -trace du temps...
Trace et Mémoire s’inscrivent donc conjointement dans le champ historique et celui des arts plastiques. La sculpture commémorative en est un exemple.
Par ailleurs, l’œuvre fait trace dans l’histoire de l’art et certaines d’entre elles nourrissent l’histoire.

Article proposé par Chantal Coyaud