Le silence du professeur dans le cours de langue : le partage des expériences publié le 03/07/2017  - mis à jour le 13/12/2021

La deuxième journée de formation sur le silence permet à tous d'échanger autour de son expérience

Rappel de la 1ère journée de formation

Diapo de la 2ème journée de formation : "le silence du professeur de langue"
  • C’est lorsque l’enseignant.e se tait que la possibilité et l’espace nécessaire sont offerts aux élèves pour s’exprimer en anglais. Il faut le comprendre comme le retrait de l’enseignant.e qui n’intervient plus en permanence pour valider ou vérifier les réponses des élèves et répondre dans l’instant à chaque sollicitation.
  • La prise de pouvoir et donc la progression vers l’autonomie se fait par les élèves.
  • Ce changement de posture est nécessaire à plusieurs titres.
    Il s’agit non seulement de faciliter la mise au travail de tous les élèves quels que soient leur niveau, compétences et appétence pour la matière mais aussi de permettre à l’enseignant.e d’aborder le travail moins frontalement. Il/ elle peut ainsi s’économiser pour être plus disponible et à l’écoute des besoins des élèves -mais aussi des siens.
  • Laetitia Hauquin explique ce que tous les enseignants ont expérimenté face à une classe bruyante :
    Insertion d'une déclaration d'un.e enseignant.e
  • Essayer de contenir la classe physiquement par un contrôle permanent en forçant la voix est un combat perdu d’avance. L’enseignant.e à plus ou moins court terme risque d’altérer son outil de travail, sa voix ou, par la tension accumulée quotidiennement, voir sa vie professionnelle et personnelle affectée.
  • Il faut accepter de perdre du temps avec sa classe et aussi admettre que face à nos publics, l’exigence du contrôle n’est plus adaptée.
  • Leur silence n’est pas preuve de leur engagement. Il faut donc faire évoluer ses méthodes en fonction des élèves et de sa propre personnalité. C’est par une préparation des séances et des séquences en amont que la mise au travail des élèves est possible. Ces méthodes nécessitent des ajustements constants en fonction des publics, des matières, de la fatigue des élèves et de celle de l’enseignant.e.
  • Sophie Humeau explique aussi qu’en tant qu’enseignante d’anglais, elle avait le sentiment que c’était elle qui devait apporter l’exposition à la langue et rappelle ainsi que l’enseignant ne peut plus être l’acteur principal de ce qui se joue dans classe.
Post it : remember!
Il faut transférer aux élèves la part qui leur revient en termes de responsabilité et de travail. Ils doivent être les acteurs de leurs apprentissages.

Le temps de l’accueil des élèves dans la classe

Illustration : Keep calm and carry on !
  • Face à un.e enseignant.e qui baisse la voix pour s’exprimer, les élèves ont tendance d’eux-mêmes à ajuster le niveau sonore.
    Il devient de plus en plus difficile de couvrir la voix des élèves. Il faut donc s’attacher à baisser le ton pour que les élèves le fassent également en prenant le temps nécessaire pour débuter le cours dans les meilleures conditions possibles.
  • De combien de temps les élèves ont-ils besoin pour se rendre disponibles au travail ?
    Certain.e.s enseignant.e.s disent cinq minutes, d’autres quinze. Ce n’est de l’avis de tous jamais du temps perdu car il s’agit du délai indispensable pour les élèves de :
  • quitter le cours d’avant ;
  • prendre le temps de réaliser où ils sont ;
  • ce qu’ils ont fait la séance d’avant ;
  • ce qu’ils vont devoir faire.

Exemple :

Une enseignante d’anglais en 1ère année de CAP parle du moment de silence imposé au début du cours puis du moment qui suit où les élèves, s’ils le souhaitent prennent la parole pour évacuer leurs préoccupations du moment et se rendre disponible pour la séance.

Insertion d'une déclaration d'un.e enseignant.e
Post it : remember!

Le moment de l’accueil est le temps indispensable à la connexion au moment présent pour les élèves et pour l’enseignant.e.


Les difficultés matérielles lors de l’accueil des élèves

Illustration humoristique du chapitre "Les difficultés matérielles lors de l'accueil des élèves"


De l’opinion de tous, l’accueil idéal est celui où l’enseignant.e est déjà dans la salle et fait entrer les élèves.

Mais cette facilité n’est pas offerte à tous et toutes les collègues.
Certain.e.s évoquent combien il leur est difficile changer de salle quasiment à chaque heure avec notamment pour quelques uns, leurs matériels sur un chariot à transporter avec eux.

Les inconforts pédagogiques résultant de ces répartitions de salles peuvent accroître les difficultés liées à l’accueil de la classe et ajouter de la tension à l’arrivée dans la salle. Il s’agit de points importants pour les enseignant.e.s à aborder pendant les conseils pédagogiques.

Des collègues évoquent leur difficulté de retrouver sa salle avec une disposition de tables que l’on ne souhaite pas, parfois pour permettre aux agents d’entretien de bien faire leur travail. Des aménagements peuvent être trouvés.

Post it : remember!
Lors des conseils pédagogiques également, les enseignant.e.s peuvent et doivent faire part de la nécessité de changer le moins possible de salle de classe et de pouvoir avoir son matériel stocké dans la salle ou il.elle travaille.

La nécessité du travail en groupes / ïlots ou binômes

  • Laetitia Hauquin travaille avec ses élèves en classe entière en ilots. Elle leur explique qu’elle leur laisse la responsabilité du silence. Elle leur dit :
Insertion d'une déclaration d'un.e enseignant.e
  • Elle évoque l’attentisme que tous les enseignants constatent dans leurs classes avec des jeunes qui se confortent en se dédouanant de leurs responsabilités tant dans leur attitude que dans leur travail.
  • La composition de groupes dans la classe s’impose pour que les responsabilités se répartissent différemment.
    La question des critères de composition de ces groupes se pose donc de fait :
    • est-elle plus efficace ou pertinente par niveaux ?
    • est-ce que les groupes par affinités ne fonctionnent-ils par moins bien ou mieux en terme de mise au travail ou de discipline ?
    • les groupes par affinités favorisent la bienveillance entre pairs indispensable pour co-constuire mais ne laissent-elles pas de côté ceux qui ne sont pas appréciés ?

Les impacts positifs du travail en groupes :

  • l’enseignant.e se fait oublier et peut s’économiser en prenant conscience que tout ne dépend pas que de lui/elle ;
  • les élèves interagissent, se posent des questions en langue cible ou non ;
  • l’enseignant.e peut mieux cibler ses interventions si nécessaires, il n’a plus le groupe classe face à lui ;
  • l’enseignant.e peut individualiser ses pratiques et mettre plus facilement en place la différenciation nécessaire à la mise au travail de tous.

Les points négatifs remarqués :

  • certain.e.s enseignant.e.s ne sentent plus utiles et s’interrogent sur leur rôle pendant la séance ;
  • le niveau sonore est souvent très élevé ;
  • certain.e.s élèves profitent de cette répartition pour échapper au travail en laissant l’élève le.la plus affirmé.e prendre les choses en main ;
  • la préparation des séances en amont pour définir au mieux les rôles de tous dans chaque groupe est déterminante ;
  • la composition des groupes nécessite d’être anticipée ;
  • le groupe parfait n’existe pas, il faut donc sans cesse ajuster et adapter ses méthodes et préparations.
Post it : remember!

Le bon groupe est celui qui fonctionne a un moment particulier pour une tâche donnée. Il apparaît important de ne rien figer et d’ajuster ses critères en fonction des tâches demandées, de la situation, de l’état d’esprit des élèves et de celui de l’enseignant.e.


Les retours d’expérience négatifs sur le travail en groupes

Témoignage 1 :

Une collègue témoigne de la difficulté de supporter le niveau sonore très élevé induit par les activités en îlots en classe entière.
Elle explique qu’elle a été contrainte de parler très fort pour se faire entendre. A telle enseigne qu’elle est devenue aphone.
Elle constate que les élèves s’installent en face à face dans leurs conversations personnelles et refusent d’en sortir. Le groupe devient le moyen d’être entre-soi.
Elle ne gardera pas le dispositif des ilots mais est intéressée par le fait de placer son bureau non plus devant les élèves mais sur le côté dans un souci de ne plus être face à la classe mais en retrait pour favoriser l’expression des élèves.

Insertion d'une déclaration d'un.e enseignant.e

Témoignage 2 :

Une autre collègue explique qu’elle a, elle aussi, testé les ilots mais qu’elle a également rencontré des problèmes avec sa voix parce que l’ilot favorise la conversation et le bruit. Elle rapporte aussi que cela accentue l’isolement de certain.e.s. élèves puisque personne ne souhaite travailler avec. Elle évoque aussi la difficulté des moments de restitutions où personne ne s’écoute.

Insertion d'une déclaration d'un.e enseignant.e

Témoignage 3 :

Une autre encore dit avoir tellement dû forcer sur sa voix que ses collègues dans les salles voisines se sont plaints.


Les retours positifs

Témoignage 1 :

Une collègue d’espagnol-lettres fait part de son expérience :
Elle rencontre une difficulté particulière avec sa classe de 1ère bac pro accueil. Celle-ci ne parle pas et attend que l’enseignante fasse le travail.
Après la 1ère journée de formation, la collègue décide de s’y prendre autrement. Elle leur propose une activité qui prend appui sur une vidéo et leur dit après avoir désigné qui sera le scribe (celui qui retranscrit les données importantes du cours) :

Insertion d'une parole d'un.e enseignant.e

Et elle se met au fond de la salle. Au bout d’un certain temps, un élève prend la parole en se retournant vers l’enseignante.
Celle-ci n’a pas l’intention d’intervenir.
Chacun se met à dire sa phrase, certains rectifient les maladresses des camarades et s’interpellent les uns les autres pour s’aider.
Ils se retournent enfin vers l’enseignante et disent : "Voilà, on a tout dit." L’enseignante en déduit qu’ils sont donc capable de s’exprimer. La séance suivante, forte de ce constat, elle reprend son fonctionnement habituel mais .... les élèves aussi !

C’est à ce moment qu’elle décide de changer sa manière de faire et de proposer de travailler sur un projet de voyage virtuel, chacun à son rythme.
Elle voit qu’une élève habituellement peu investie dans son cours, a produit un très beau travail personnel pendant ses vacances et a réalisé une pochette.
Elle propose de complexifier le travail et ce sont les élèves qui tirent au sort les contraintes dont il faut qu’ils tiennent compte.
Ils se prennent au jeu et s’encouragent mutuellement.
La collègue confesse "s’être fait violence" pour apprendre à se taire et a atteint son objectif de mise au travail des élèves de son groupe.

Témoignage 2 :

Une autre collègue d’espagnol admet qu’elle sollicitait toujours les mêmes élèves pour ne pas laisser le silence s’installer.
Elle a décidé de ne plus se précipiter sur les premiers qui lèvent la main pour obtenir des réponses et a constaté que cela laissait le temps à d’autres élèves de construire leur réflexion et de participer. Elle explique que cela n’a pas été facile, certains élèves plus participatifs que d’autres prenaient mal le fait de devoir restreindre leur participation. Instaurer un tour de parole a été nécessaire.

Témoignage 3 :

Un collègue d’anglais-lettres raconte veiller à laisser le temps et l’espace pour que tous puissent s’exprimer y compris les plus lents. Il exprime aussi le paradoxe qui l’habite quant au retrait du professeur et du silence de sa part qui en résulte :

Insertion d'une parole d'un.e enseignant.e

La communication non violente

Dans le contexte scolaire, la communication non violente présente un intérêt particulier. Elle permet de s’écouter soi pour mieux écouter l’autre. La CNV est une façon de penser et de parler qui vise à mettre de la compréhension et du respect mutuel dans les échanges entre soi et les autres. C’est de l’écologie humaine. Elle aide chacun à se relier à la partie de soi capable de comprendre avec le cœur et de se faire entendre sans agresser.

On stimule ainsi la bienveillance en soi et en l’autre.

Une communication structurée en quatre étapes :

  • l’observation factuelle d’une situation ;
  • l’expression des sentiments ;
  • l’expression des besoins à l’origine des sentiments ;
  • la formulation d’une demande.

Pour être valable il faut : l’expression honnête de soi et l’écoute respectueuse de l’autre.

Pour Marshall B.Rosenberg, l’inventeur de la CNV :

"la violence est l’expression tragique de besoins non satisfaits."

L’observation factuelle

"L’observation est un petit capital dans la résolution des conflits car elle fait la distinction entre ce qui est ce qu’on pense. C’est un espace où le dialogue redevient possible."

En contrôlant ce qui se passe en nous, nous agissons sur ce qui est non-verbal dans notre formulation et notre expression. Ceci nous permet de ne pas mettre d’intention d’évaluer lorsque nous demandons aux élèves de réaliser quelque chose. Nous créons ainsi l’espace et la distance nécessaire au travail de l’élève.

Le sentiment

Nos sentiments nous animent et colorent chaque moment de notre vie qu’ils soient positifs ou non. Le sentiment est une sorte de messager, l’indicateur qui exprime qu’un besoin est comblé ou non.
Quatre sentiments de base existent : joie, tristesse, peur, colère, lesquels se colorent de nombreuses nuances. Un sentiment agréable correspond à un besoin satisfait. Un besoin insatisfait génère un sentiment désagréable.
Il est par conséquent important d’accueillir et de considérer les besoins de l’autre à égalité avec les siens.

Le besoin

Le besoin désigne en CNV ce qui est indispensable à notre vie autant que ce qui lui donne du sens et de la sécurité. Nous retrouvons là nos besoins vitaux de sécurité et d’épanouissement. Un besoin s’exprime toujours en termes positifs et n’implique ni une autre personne ni une action concrète.


La demande

  • la demande doit s’adresser à quelqu’un de précis directement ;
  • elle se situe dans l’instant présent ;
  • elle est concrète ;
  • elle est exprimée dans un langage positif ;
  • elle est réalisable ;
  • elle offre la possibilité de dire non, ce n’est pas une injonction.

L’empathie et l’honnêteté

L’empathie permet d’abaisser ses défenses et celles de l’autre et autorise petit à petit l’ouverture au dialogue et à la relation.
Être empathique c’est une qualité de présence, voir l’autre comme un être humain et créer avec lui une qualité de connexion
L’auto-empathie permet d’aller au cœur de soi-même pour que l’on trouve ce qui résonne en nous de l’autre.
Il est important de savoir dire non tout en respectant la personne concernée. C’est aussi respecter nos besoins.

L’appréciation positive

L’encouragement et l’appréciation positifs sont des ressources utiles à chacun, nos élèves comme nous mêmes. Ce sont des points d’appui indispensables qui permettent d’exercer cette bienveillance envers nous-même.s.

Post it : remember!

Se relier à soi, à ses propres besoins en tant qu’enseignant.e rend plus disponible aux élèves et leur permet de ne pas se verrouiller. Ils sont ainsi dans les meilleures dispositions pour réaliser une tâche et s’exprimer.

Document joint

Diaporama réalisé par Sophie Humeau et Laetitia Hauquin pour la 2ème journée de formation "le silence du professeur dans le cours de langue et la CNV."