Adieu Mirjam Pressler ! publié le 19/01/2019

 Si on jette un coup d’oeil au catalogue des livres de Mirjam Pressler (1940-2019) disponibles en langue française, on ne peut qu’être abasourdi. Comment ? Les lecteurs francophones n’auraient accès qu’à "Chocolat amer" (Bitterschokolade, 1980), "La promesse d’Hanna" (Malka Mai, 2006) et "Anne Frank" (2015) ? Comment est-ce possible ? L’édition française aurait oublié en cours de route les autres grands succès de cette auteure prolifique (pas moins de 300 titres) qui ont été couronnés par de nombreuses distinctions littéraires. Au nombre des prix prestigieux qu’elle a remportés figure le prix allemand de la littérature pour la jeunesse dont elle a été lauréate à 3 reprises : une fois en 1995 pour "Quand le bonheur arrive" ("Wenn das Glück kommt, muss man ihm einen Stuhl hinstellen"), une fois en 2002 pour "La promesse d’Hanna" ("Malka Mai") et une dernière fois en 2010 pour son oeuvre intégrale.
Auteure mais aussi traductrice (de l’hébreu, de l’anglais, du hollandais et de l’afrikaans), Mirjam Pressler était en outre la voix d’Amos Oz en Allemagne. Et c’est bien pour son rôle de passeur entre Israël et l’Allemagne qu’elle s’est vue remettre en 2018 la croix fédérale du Mérite.

 Toute l’oeuvre de Mirjam Pressler est habitée par l’Holocauste et le nazisme. Ses romans réalistes sont particulièrement touchants car nourris de son expérience personnelle. Ses personnages toujours très attachants sont des enfants ou adolescents qui nous entraînent dans la tourmente de la Seconde Guerre mondiale. Jamais le lecteur ne sort indemne de ses lectures car elles le marquent et le hantent à jamais. C’est une des forces des romans de Mirjam Pressler : faire vibrer en chacun la corde sensible et développer l’empathie.

 A une époque où la littérature pour la jeunesse n’était pas encore le parent pauvre de nos manuels scolaires, on trouvait encore des extraits de son oeuvre. Le manuel "Perpektiven" (Nathan, 2010) propose encore un extrait de "Kratzer im Lack" (p.32, Herbert, un jeune victime de harcèlement à l’école) mais on peut regretter qu’aucun éditeur ne se soit à ce jour emparé d’extraits du livre "Die Zeit der schlafenden Hunde"(2003) (sombre histoire d’une entreprise familiale allemande sur plusieurs générations) ou de " Nathan und seine Kinder " (un classique de la littérature allemande, "Nathan le Sage" de Lessing, revisité par Mirjam Pressler). Mirjam Pressler mérite vraiment d’être réhabilitée dans nos manuels. Si vous ne connaissez pas l’oeuvre de Mirjam Pressler, il est urgent de la découvrir ! Vous pouvez justement commencer par la lecture de "die Zeit der schlafenden Hunde" (non traduit en français) ou de "Malka Mai".

 Notons pour finir que son dernier roman " Dunkles Gold " paraîtra à titre posthume en mars 2019.