L'histoire bouleversante d'une réédition : "Rien où poser sa tête" de Françoise Frenkel publié le 11/01/2016

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 Cette fin d’année 2015 gratifie les lecteurs d’une très belle réédition. "Rien où poser la tête", préfacé par Patrick Modiano, est en effet un récit autobiographique de premier plan. Françoise Frenkel en est l’auteure. Si ce nom ne vous dit rien, ce ne serait guère surprenant. Françoise Frenkel fait partie des oubliées de l’Histoire. Elle a laissé à la postérité un seul et unique ouvrage publié en 1945 à Genève. C’est son témoignage qu’il nous est donné de redécouvrir à présent dans cette réédition.

 Françoise Frenkel a ouvert en 1921 la première librairie française de Berlin. Au début du livre, elle raconte son combat pour y parvenir. De nombreux obstacles se sont dressés sur son chemin mais, à force d’acharnement, elle a quand même réussi à réaliser son rêve. D’origine juive polonaise, Françoise Frenkel est rattrapée par l’Histoire. Elle est contrainte de fuir l’Allemagne nazie en 1939 et d’abandonner sa librairie. C’est un déchirement pour elle. Elle cherche alors refuge en France, sa deuxième patrie. A la lecture de ses confessions, on sent à quel point cette femme est viscéralement attachée à ce pays dont elle maîtrise parfaitement la langue. De Paris à Nice en passant par Avignon, Vichy, Grenoble et Annecy, Françoise Frenkel est sans arrêt sous le coup d’une arrestation. Sa vie est marquée du sceau de l’errance et des tourments. Mais Françoise Frenkel est une femme forte et clairvoyante. Jamais elle ne sombre dans la rancoeur ou l’aigreur vis-à-vis des Français qui la trahissent. Elle ne jette la pierre à personne. Elle va même jusqu’à saluer à plusieurs reprises les marques de générosité dont la plupart des Français font preuve à son égard. Le lecteur suit avec intérêt et admiration le combat quotidien qu’elle engage pour sa survie. Ne baissant jamais les bras, elle réussira à passer clandestinement la frontière suisse en 1943 au bout de sa troisième tentative.

 Vous l’aurez compris, il s’agit là d’un témoignage bouleversant sur les années noires de l’occupation. Au-delà de l’oeuvre littéraire, il faut retenir la valeur historique de cette publication. Ce livre conserve soixante-dix ans plus tard un caractère authentique frappant et il n’a aucunement perdu de sa force d’évocation. Un ouvrage à lire sans plus tarder et à faire découvrir !